Le voyage d'Arlo

Le Voyage d’Arlo : Tout là-haut !

Le Voyage d’Arlo est un projet de longue date puisqu’il débute en 2009. Depuis, le film a changé de réal, de compositeur mais aussi de doubleurs. Ce n’est pas une première chez les gens de la petite lampe bondissante dont on connaît le goût prononcé pour l’excellence. Ainsi Ratatouille avait, on se souvient, lui aussi suivi le même cheminement de production tortueux pour déboucher sur le petit bijou d’animation que l’on sait. Un nouvel accouchement dans la douleur donc qui donne naissance à un film d’animation qui remet l’Église Pixar au centre du village comme on dit.

Le Voyage d'Arlo - Affiche française

Plus tôt dans l’année, Vice Versa avait déjà amorcé ce constat. Celui d’une renaissance en bonne et due forme après des années passées à tenter de se reconstruire une identité que l’on craignait peu ou prou diluée dans celle de Disney. Entre les suites sans aspérités (Cars 2, Monstres Academy) et la production alambiquée marquée au fer rouge par la Maison dorénavant mère (Rebelle), il y avait en effet de quoi se désespérer de retrouver la fibre créatrice des débuts doublée de cet esprit pionnier en matière de systématique bond en avant technologique. Et si Vice Versa n’allait pas encore tout à fait au bout de cette mutation pour rester in fine à l’état de très belle chrysalide, Le Voyage d’Arlo est un magnifique papillon doté d’atours techniques sans précédent tout en s’affranchissant subtilement des codes narratifs de son aîné aux grandes oreilles.

Ainsi, dès les premières secondes on est subjugué par le réalisme outrancier des images qui nous sont données à voir. Non que l’on soit des adeptes de la course à la vérité graphique engendrée par les calculs de plus en plus puissants des ordinateurs ad hoc, mais là on est bien obligé de reconnaître qu’elle engendre avec Le Voyage d’Arlo une forme de plénitude visuelle tout simplement jamais expérimentée. La nature, décor intégral et limite agoraphobique ici, n’aura par exemple jamais été aussi bien mise en valeur. Jusqu’à l’eau qui, comme on le sait, est une tannée à reproduire en numérique et qui phagocyte plus de 15% du métrage, devient un pur nectar pour nos rétines soumises pourtant au taylorisme numérique. Tout y passe. Les crues dramatiques, la rivière translucide et calme, les pluies diluviennes… On assiste tout simplement à un gap technique extraordinaire qui restera à n’en pas douter dans les mémoires.

Le voyage d'Arlo

Mais tout cela ne serait rien sans la poésie imprimée par les génies hantant les couloirs de chez Pixar qui, au détour des deux personnages du film que sont pour l’un une sorte d’enfant chien et pour l’autre un dinosaure tout vert (peut-être évadé de croquis dédiés à Toy Story 4), rebattent aussi simplement que drastiquement les cartes de l’animation familiale. Au-delà de l’idée basique en apparence qui est d’affirmer que les dinosaures n’ont pas péri mais qu’au contraire ils ont continué leur évolution pour devenir éleveurs (les carnivores) ou cultivateurs (les herbivores), on donne à cette nature plus végétale, minérale et vivante que jamais une touche d’uchronie verte bienvenue. Elle contrebalance généreusement cette réalité (on aurait envie de dire augmentée) et emmène le film vers des cieux qui restaient  encore vierges.

Ô attention, Le Voyage d’Arlo ne révolutionnera pas l’arc narratif disneyen hérité ici au hasard du Roi Lion. Il y est en effet question d’un voyage initiatique en dehors du cocon familiale provoqué par une « tragédie ». Rien de bien nouveau mais en inversant les rôles du mammifère dominant qui rappelle un peu finalement dans son process celui de La Planète des singes, le (jeune et le moins jeune) spectateur devra sans cesse opérer à un retour sur lui-même pour se forcer à suivre les traces du dinosaure et non celui de son side-kick mini humain. Et puis, on pouvait reprocher à Vice Versa sa réussite à la limite clinique. Il y manquait en effet les émotions pures et triviales qui avaient su donner ce supplément d’âme à des réussites tels que Wall-E, Là-Haut ou encore Montres & Cie. Et bien Arlo et son pote nous en gratifient de jolies jusqu’au final qui atteint des sommets dans le genre.

Le Voyage d’Arlo est donc sans conteste à ranger dans la vitrine des trophées comme étant celui du renouveau que l’on espère suivi d’effets définitifs. Il est aussi et mine de rien un orgasme visuel qu’il sera bien difficile ne serait-ce que de cloner dans les quelques années à venir… sinon par Pixar lui-même.

Le Voyage d’Arlo (The Good Dinosaur) de Peter Sohn – 25 novembre 2015 (The Walt Disney Company France)

RésuméEt si la catastrophe cataclysmique qui a bouleversé la Terre et provoqué l’extinction des dinosaures n’avait jamais eu lieu ? Et si les dinosaures ne s’étaient jamais éteints, et vivaient parmi nous de nos jours ?  
Arlo, jeune Apatosaure au grand cœur, maladroit et craintif, qui va faire la rencontre et prendre sous son aile un étonnant compagnon : un petit garçon sauvage, très dégourdi, prénommé Spot.

Note : 4/5

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