Le Maître de guerre - Eastwood

La reco couch potato du week-end : Le Maître de guerre

Profil 1 : Vous n’avez pas envie de bouger. Vous êtes là, assis sur votre canapé à faire votre couch potato. Vous vous demandez quoi regarder à la télé. Vous disposez de 150 chaînes dont une vingtaine dédiée au cinéma. Vous zappez. Mais que choisir ?

Profil 2 : Vous êtes toujours aussi flémard. Vous disposez d’une connexion fibre ou ADSL +, vous êtes abonné à une ou plusieurs plateformes VOD légales ou vous avez l’habitude de passer votre temps sur des sites pas trop halal à télécharger comme un porc… Bref l’un dans l’autre le choix est pléthorique et là encore vous ne savez quoi choisir.

Profil 3 : Le canapé est toujours autant votre ami. Vous avez une collection de Blu-ray / DVD qui gonfle votre compagne ou compagnon tellement il y en a partout. Vous aimez posséder mais devant de tels gratte-ciels de boîtiers il vous faut la soirée pour prendre une décision et le temps de revenir, votre moitié s’est bien entendu endormi(e).

Bref, on est tous passé par là. Et ce rendez-vous pas forcément hebdo est là pour vous enlever cette terrible épine du pied qui se résume en une seule et unique question : on regarde quoi ce soir ?

Ô, on ne cherche pas à faire dans l’original mais on va essayer pour le coup de parler de films qui nous causent, qui nous ont marqués ou qui mériteraient d’être (re)vus sans pour autant chercher à faire dans de la cinéphilie de comptoir où le lever du coude est aussi important que de débiter des théories de cinéma fumeuses dans une langue devenue pâteuse.

L’idée est donc de vous conseiller un ou deux films à se mater seul ou en couple, entre potes ou en famille le temps d’un week-end ou plus si affinité. On va aussi essayer de vous guider quant à la meilleure façon de le (re)voir tant en DVD, en téléchargement légale ou illégale (on n’est pas sectaire à DC) ou s’il devait y avoir un passage en téloche. Vous pouvez aussi vous garder cette reco (pour recommandation, un terme de marketeux qui fait florès chez les distributeurs de films branchouilles de la capitale) pour vous la mettre derrière l’oreille et la fumer pour plus tard (oui, la chute n’est pas terrible mais on n’a pas trouvé mieux).

Ce week-end on vous propose de (re)découvrir

Le film

Le sergent Tom Highway, dur à cuire et vétéran de la guerre de Corée et de la guerre du Viêt Nam, revient chez les Marines, qui l’ont déjà rejeté auparavant, pour entraîner une unité de reconnaissance, peu habituée à la rigueur et à l’effort. Paria et anachronisme vivant, le sergent va prouver l’efficacité de sa méthode au cours d’un assaut réel lors de l’invasion de la Grenade.

Quand Le Maître de guerre sort en salles, l’Amérique n’en finit plus de lécher ses plaies d’un passé guerrier peu glorieux où elle n’a pas fait mieux que de laisser une Corée coupée en deux et d’abandonner le Vietnam aux mains des communistes après y avoir perdu près de 50 000 hommes. Le moral est donc en berne d’autant que Le Nouvel Hollywood des années 70 ne lui fait pas de cadeau entre un Voyage au bout de l’enfer pour le moins traumatisant signé Cimino et un Apocalypse Now psychédélique, mortifère et anxiogène de sieur Coppola. Mais c’est sans compter sur un Ronald Reagan qui entame alors son deuxième et dernier mandat. Le nouvel espoir qu’il insuffle depuis 1981 fondé sur un libéralisme économique poussé à l’extrême et qui est propre au commercial multi carte qu’il est devenu, passe aussi par le cinéma qui se met à vouloir refaire l’histoire tout en redorant le blason de son armée. C’est le cas des Rambo 2 et 3, la série des Portés disparus, Top Gun, Delta Force… Il s’agit là d’une véritable entreprise de reconstruction censée rappeler aux américains que leur pays s’est bien érigé par les armes et qu’il serait de bon ton de ne pas trop cracher dans la soupe.

Le Maître de guerre s’inscrit parfaitement dans cette mouvance. Il y est question d’un Marine plus proche de la quille que de choper sa première chtouille qui rentre au bercail (entendre par là, au sein d’une unité de Marines) pour un dernier « tour ». Le poitrail blindé de décorations les plus prestigieuses, il n’a pourtant que le grade de Sergent car il a un peu du mal avec la hiérarchie. Un comble pour un militaire à qui l’on va toutefois confier une unité de tirs au flanc qu’il va transformer en maîtres de guerre. Des hommes qui pourront alors s’illustrer lors de l’invasion de l’île de la Grenade que Reagan avait justement voulu pour redonner à son armée un peu d’estime de soi. Une sorte d’entraînement grandeur nature se situant dans son pré-carré des caraïbes. D’ailleurs, cela permet au sergent interprété par Clint Eastwood de cocher enfin une victoire dans ses comptes persos qui jusqu’ici affichaient un match nul pour la Corée et une défaite pour le Vietnam. 1-1-1 donc.

Le Maître de guerre

L’autre intérêt du film réside aussi dans la façon dont Eastwood s’est emparé du sujet pour en faire quelque chose de très personnel, lui le Républicain patriote pur et dur qui ne se prive toutefois jamais de critiquer les institutions d’un pays qu’il idolâtre. En ce sens, on peut d’ailleurs très facilement rapprocher ce Maître de guerre d’American Sniper, son dernier film en date. On y trouve le même angle d’attaque ainsi qu’un traitement idoine des thématiques (héros en perte de repères vis-à-vis d’une société qui le rejette et qu’il ne comprend plus trop mais qu’il continue de défendre bec et ongles). Mais la comparaison s’arrête là car Heartbreak Ridge (en VO, du nom d’une bataille sanglante et bien entendu inutile de Corée que Lewis Hamilton illustrera sans la mentionner frontalement dans Pork Chop Hill en 1959) n’est pas tant un constat sans concession d’un héros de guerre laissé sur le bas côté de la société qu’un film catharsis censé fêter ce même héros une fois rentré à la maison.

Pour ce faire, Eastwood fait de son Sergent instructeur une caricature de militaire de carrière qui restera dans les annales au même titre que celui du Full Metal Jacket de Kubrick qui sort d’ailleurs quelques mois plus tard. Et c’est bien cette caricature qui a permis à son film de traverser les décennies comme jamais et non le message très premier degré qu’il insuffle dans les bronches du spectateur. Pourtant, et c’est souvent un bon signe, l’armée américaine, d’abord intéressé, se détournera du projet à la première lecture du script. Il faut dire que l’on se gondole encore aujourd’hui au détour de quasiment toutes les répliques proférées par un Eastwood qui s’en donne à cœur joie. Sa façon de débiter son credo de vie dès qu’il le peut en saupoudrant abondamment le tout de mots pour le moins fleuris est quelque chose qui ne pouvait devenir que culte à la longue. On conseillera d’ailleurs, une fois n’est pas coutume, la VF qui à l’instar d’un Tom Selleck dans la série Magnum se permet des digressions, libertés et autres déviances salutaires qui rehaussent encore l’intérêt de ce Maître de guerre qui une fois découvert ne pourra que devenir une sorte de film de chevet inavouable que l’on se mate comme le diabétique qui se bouffe en cachette une tablette de chocolat.

Le réalisateur

Est-il besoin de présenter Clint Eastwood ? On connaît bien entendu l’homme de cinéma qui traverse le medium depuis les années 60 sans coup férir devenant aujourd’hui de facto le dernier géant d’Hollywood encore en activité. Il est le fils spirituel de John Wayne au même titre qu’un Charlton Heston mais en moins bas du plafond. Encore que sa diatribe donnée à la dernière convention Républicaine a un tantinet écorné cette image iconique en quelque chose de partisan et conservateur à la limite de la nausée. Qu’à cela ne tienne. On ne voudra retenir ici qu’une filmographie d’une rare richesse traversée par d’innombrables fulgurances et quelques chefs-d’œuvre incontestables. Le cinéaste associé à l’acteur ont pour le coup façonné l’image de l’Amérique de ces 40 dernières années. Il n’est bien entendu pas le seul, on pense au hasard à Cimino ou Coppola, mais il est celui qui l’aura fait avec le plus de persévérance à la limite de l’obsession. Il suffit de voir comment la plupart de ses films se répondent d’une décennie à l’autre pour constater à quel point il ne lâche jamais le morceau. L’exemple typique étant la série des Dirty Harry (où il n’est qu’acteur à l’exception de Sudden Impact) à rapprocher de son Gran Torino réalisé en 2008. Bien entendu, il s’agit là d’exemples connus et sans cesse analysés. Mais Eastwood c’est aussi un amoureux transi de cinoche. Il lui a d’ailleurs rendu un vibrant hommage avec Chasseur blanc, cœur noir qui retrace les quelques semaines qui ont précédées le tournage d’African Queen de John Huston. Mais là aussi il marque son territoire en rendant compte de l’âge d’or d’Hollywood qu’il regrette de ne pas avoir vécu. C’est que quand l’acteur Eastwood se fait connaître, ce n’est pas grâce à des productions yankees mais bien à des westerns spaghetti avec un certain Sergio Leone à la baguette. Avec Don Siegel, ils sont au demeurant les deux parrains de son cinéma. D’un côté le foutraque qui aime bien faire danser au bout de son fusil une société corrompue qui périclite et de l’autre l’homme de loi qui malgré ses désillusions veut faire rentrer tout cela dans le rang et plus vite que cela. Mais toujours armé jusqu’aux dents.

Capture issue du Blu-ray cliquable pour visualisation au format HD natif 1920×1080

Le Maître de guerre - Eastwood

Comment le voir ?

Et bien en ce moment c’est pas dur puisqu’il tourne sur les chaînes de Canal+ dont les programmateurs ont du se dire que c’était pas mal de le diffuser en même temps qu’American Sniper dont c’est la première diffusion sur une chaine de TV française un an après sa sortie dans les salles. Des fois y en a là-bas qui réfléchissent très fort quand même. Mais si vous n’êtes pas abonnés ou que tout simplement vous avez envie de vous revoir ce Maître de guerre quand vous le souhaitez, il existe bien évidemment un Blu-ray (ou un DVD si vous n’êtes pas équipé ad hoc) édité par Warner qui ne casse pas la baraque en guise de compléments (une malheureuse bande-annonce) mais qui d’un point de vue technique fera l’affaire de tous les supports de diffusion actuel. Il s’agit là pour le Studio d’un titre de catalogue souvent remis en avant via des offres promos, ce qui le positionne toujours en dessous de 10 euros. Préférez l’édition française ne serait-ce que pour la VF qui est encodée en 5.1 alors qu’elle n’est qu’en stéréo sur le Blu-ray (et DVD) US par exemple.

Ah et sinon, y a un autre film d’Eastwood qui tourne en ce moment mais sur la chaîne TCM cette fois-ci. Il s’agit de Pale Rider, western quelque peu hommage à sa propre filmo emprunt d’un mix détonnant entre inspiration italienne et âge d’or du genre à Hollywood, qu’il réalisa en 1985 et qui quelque part annonçait déjà le chef-d’œuvre Impitoyable.

Une réflexion sur « La reco couch potato du week-end : Le Maître de guerre »

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