Le Grand Silence (1968) de Sergio Corbucci - Blu-ray 4K Ultra HD

Le Grand silence : Chasseurs de 4K

Si sa filmographique est loin d’être aussi connue que celle de Sergio Leone, Sergio Corbucci n’en a pas moins réalisé quelques pépites et autres œuvres majeurs parmi lesquels on trouve Le Grand silence que Studio Canal sort dans une édition Blu-ray 4K Ultra HD particulièrement soignée au sein de sa collection Make my day ! chapeautée par Jean-Baptiste Thoret.

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Le Grand Silence - Boîtier Digipack - Blu-ray 4K Ultra HD + Blu-ray + Blu-ray bonus

Éditeur :StudioCanal
Sortie le :24 mars 2022  
Catégorie :Make my day !

Test Blu-ray 4K Ultra Haute Définition
Image (4K) :
Image (2K) :
Son :
Bonus :

Retrouvez les informations concernant nos captures et notre matériel de test sur cette page.

Testé à partir d’une édition française définitive achetée dans le commerce.

On ne va pas tenter de vous la faire à l’envers, l’auteur de ces lignes connaît très mal la filmographie de Sergio Corbucci (1926 – 1990). Il faut dire aussi que celui que l’on appellera affectueusement « l’autre Sergio » aura connu une carrière beaucoup moins médiatisée que celle d’un certain Leone (1929 – 1989). Un comble lorsque l’on regarde de plus près le travail de ces deux cinéastes italiens contemporains l’un de l’autre. Là où Leone comptera « seulement » huit long-métrages à son actif dont deux trilogies entrées à jamais dans la légende du Septième Art, Corbucci cravachera comme un fou et culminera dans le même temps à plus de 60 longs-métrages. En parcourant sa filmographie, il y a bien quelques titres qui refont surface tels que Pair et impair (1978) et Salut l’ami, adieu le trésor (1981) avec Terence Hill – Bud Spencer, mythique duo devant lequel beaucoup rigolaient à l’époque (et rigolent encore aujourd’hui) en salles à la télé et en VHS. Ou encore Romulus et Rémus (1962) pour les amateurs de péplums à la grande époque du genre (les années 50 / 60).

De haut en bas :

  • Blu-ray – Édition Eureka  2021 (Master 2K)
  • Blu-ray – Édition Studio Canal 2022 (Master 2K)
  • Blu-ray 4K UltraHD – Édition Studio Canal 2022 (Master 2K)

Et puis il y a la période westerns de Corbucci au cours de laquelle se distinguent deux titres en particulier : Django (1966) avec Franco Nero et Le Grand Silence (1968) avec Jean-Louis Trintignant opposé à Klaus Kinski. L’année suivante, Corbucci dirigera une autre star française, plus connue dans le monde de la musique celle-là, Johnny Hallyday dans Le Spécialiste (1969). Comme nous le rappelle Jean-Baptiste Thoret dans la préface vidéo, Trintignant tourna dans une trentaine de films italiens au cours des années 60 parmi lesquels figure donc Le Grand silence, film « terminal » dans tous les registres en matière de western italien selon les dires de Thoret. Tourné dans les Dolomites et les studios Elios à Rome (ceux là-même où fut tourné Django deux ans plus tôt) recouvert de tonnes de mousse à raser pour simuler la neige, inspiré de faits réels comme nous le rappelle le texte final ou encore le générique français (disponible en guise de bonus), Le Grand silence, d’une noirceur peu commune, dénote très clairement avec les autres westerns tant américains qu’italiens de l’époque. Et pour cause [attention méga-spoiler] tout le monde meurt à la fin : le héros, le shérif, la veuve ainsi que tous les paysans dans un gigantesque massacre sanglant annonciateur de ce que Sam Peckinpah fera l’année suivante avec son mythique La Horde sauvage (1969) [fin du spoiler].

Une noirceur telle qu’en découvrant le final, le producteur demanda à Corbucci de filmer une fin heureuse que ce dernier tourna totalement en dérision. Également proposé au sein des bonus, il sera d’ailleurs possible de juger sur pièce combien ce happy end est en déphasage total avec le reste du film. Un final tellement sombre qu’il ne passera pas davantage auprès des ayants-droits américains comme nous le rappelle Vincent Jourdan dans un autre bonus consacré cette fois à la carrière de Corbucci qui passe par une analyse très détaillée sur Le Grand silence. Dans certains États sud-américains, le film ne sera même pas projeté en raison de sa scène d’amour entre Jean-Louis Trintignant et Vonetta McGee, actrice afro-américaine qui s’illustrera dans quelques longs-métrages de blaxploitation au cours des années 70. Quoiqu’il en soit, le film sera un échec critique et public comme nous le rappelle Jean-Baptiste Thoret. Il suffit pour s’en convaincre de comparer les chiffres d’entrées en France entre Le Grand Silence et ses « maigres » 570 000 spectateurs quand dans le même temps Le Bon, la Brute et le Truand ou encore Il était une fois dans l’Ouest attiraient respectivement 6,3 millions et 14,8 millions d’entrées en 1968 et 1969.

En attendant que Carlotta daigne sortir Django sur le support (par ailleurs déjà disponible en import 4K chez Arrow), c’est pour l’heure Studio Canal qui propose Le Grand silence dans une édition Blu-ray 4K Ultra HD très soignée qui sera accessoirement un excellent moyen de réhabiliter le film auprès des (home)cinéphiles. En novembre 2021, l’éditeur britannique Eureka avait sorti Le Grand silence au sein de sa célèbre collection The Masters of Cinema dans une édition limitée aujourd’hui épuisée mais ressortie il y a quelques jours de cela dans une édition plus classique. Sur le site de l’éditeur, on apprend qu’il s’agit d’une restauration 2K. Bien que le cadrage et la colorimétrie diffèrent sensiblement entre les éditions Eureka et Studio Canal, le premier laissant apparaître des teintes plus bleutées là où le second présente des teintes plus jaunes tout en offrant dans le même temps davantage d’image dans toutes les directions, il ne fait aucun doute que les deux sont partis du même master. En effet, on retrouve rigoureusement les mêmes défauts de copie aux mêmes endroits et notamment ces traces sur la pelloche durant certains plans, comme par exemple à 10min durant une trentaine de secondes ou encore à 24min 30s et 24min 50s.

De fait, nous sommes donc ici en présence d’une image au format respecté 1.85:1 encodée en HEVC 2160/24p SDR à partir d’une restauration 2K. En revanche, nous n’avons trouvé aucune précision quant à l’origine du matériau utilisé pour cette restauration : s’agit-il d’un scan du négatif originel ou non ? Mystère. Dans tous les cas et moyennant les quelques petzouilles mentionnées précédemment qui trainent encore çà et là, la copie est globalement très propre. Si un léger grain est bel et bien présent, celui-ci nous a semblé un tantinet trop gommé tandis que certaines séquences spécifiques laissent place à un dégrainage vraiment trop poussé selon nous (cf. cette discussion à bord de la diligence à 32min 30s). La définition est également au rendez-vous grâce à un encodage très abouti, aussi bien lors des gros plans que lors des plans larges. En attestent la belle profondeur de champ lors de cet enterrement avec la plaine enneigée à perte de vue (15min) ou encore ce plan large d’une bicoque paumée au milieu des montagnes enneigées vers laquelle se dirige Tigrero (Klaus Kinski) pour y trouver des renforts (80min 28s). Une large majorité du film se déroulant par ailleurs en extérieur dans la neige et le froid, les différentes touches de couleurs présentes çà et là n’en sont que plus « marquantes », telles que ces traces de sang (3min), les vêtements des protagonistes, la verdure par petites touches (arbustes, herbe, etc.) ou encore cette scène de flashback de l’enfance de Silence (Jean-Louis Trintignant), la seule du film sans neige, faite d’herbe et de terre (44min).

Studio Canal ayant visiblement préféré ne pas s’aventurer dans un nouvel étalonnage HDR hasardeux au risque de dénaturer la photographie originelle, l’image du Blu-ray 4K Ultra est donc proposée en SDR tout comme l’image du Blu-ray 1080p. Si l’on y ajoute le fait que le master utilisé est issu d’une restauration 2K, la différence entre le rendu 1080p et 2160p ne saute donc pas vraiment aux yeux. Il y a certes un petit surplus de définition du côté du rendu 4K mais sans pour autant que la différence soit abyssale. À noter également que certains plans ou certaines scènes offrent un rendu plus fluctuant, conséquence sans aucun doute de la captation photographique de l’époque. Ainsi différentes scènes en basse luminosité laissent apparaître des teintes grisâtres, le final dans le saloon présente un rendu très changeant aussi bien en termes de définition que de saturation des couleurs, plusieurs plans notamment au cours de la séquence d’ouverture pré-générique laissent apparaître un voile dû à l’utilisation de toiles de jute pour pallier les reflets de la neige tandis que le générique en lui-même offre une définition en deçà (6min). Enfin, on retiendra également ce plan totalement blanchâtre et flou où les fermiers approchent de la ville (91min 24s). Quant à savoir qui, de la colorimétrie bleutée de l’édition Eureka ou de celle plus jaune de l’édition Studio Canal est proche de la vérité, là encore, mystère en l’absence d’informations sur ce sujet. Au final, si tout n’est pas idyllique en termes d’image, nous sommes assurément ici en présence du meilleur rendu à date eu égard aux différents éléments sources utilisés… en attendant une future et hypothétique restauration 4K native.

Côté son, on trouve deux pistes DTS-HD Master Audio 2.0 monophoniques : la version française et la version dite « originale » italienne. Un qualificatif à relativiser lorsque l’on sait qu’à l’époque les westerns italiens faisaient appel à un casting international (dans le cas présent Trintignant, français, Kinski, allemand, McGee, américaine) et que les dialogues des films étaient entièrement postsynchronisés. Ce qui n’en permet pas moins de les apprécier à leur juste mesure dans les deux langues grâce à un excellent travail de restauration. Les différents coups de feu claquent bien, depuis ceux de la scène d’ouverture (2min 50s) et jusqu’aux tirs ininterrompus durant de très longues secondes au cours du massacre final (102min). Les musiques signées Ennio Morricone bénéficient elles aussi d’une belle amplitude pour du « simple » mono comme en témoigne le thème principal lors du générique d’ouverture (6min) ou encore cette grande envolée lyrique au cours de la scène d’amour (67min). Des musiques globalement plus en retraits sur la piste française qui au demeurant bénéficie des mêmes qualités que sa consœur transalpine.

Côté bonus, outre la préface de Jean-Baptiste Thoret et le documentaire de 57 minutes en compagnie de Vincent Jourdan, on trouve un second reportage de 55 minutes consacré cette fois à Ennio Morricone en compagnie de Stéphane Lerouge qui retrace la carrière du célèbre compositeur italien depuis ses débuts dans les années 50 jusqu’à ses contributions les plus récentes pour Les 8 Salopards de Tarantino. Pour aussi consistant que soient ces deux reportages, on regretta une approche un peu trop « rêche » constituée à 99% d’une interview face caméra. Davantage d’extraits des films cités (absents sans doute pour éviter d’avoir à payer les droits) ou encore mieux une participation sous la forme d’un commentaire audio aurait été sans doute beaucoup plus agréable à suivre. Un exercice dans lequel nous aurions bien aimé retrouver Olivier Père sur l’intégralité du film tant ses propos sur les vingt premières minutes proposées sur un troisième disque Blu-ray dédié aux bonus sont vraiment très intéressants quant aux coulisses de tournage et la réalité historique de l’époque. Outre la fin alternative, le générique français et la bande-annonce, ce troisième disque propose également deux autres bonus consacrés à Sergio Corbucci : le premier sous forme d’une interview de Alex Cox (anglais sous-titré français) et le second intitulé L’Uomo Che Ride (littéralement L’homme qui rit, italien sous-titré français) datant de 2015. Soit un portrait plutôt complet du cinéaste depuis son enfance dans une Italie mussolinienne jusqu’à ses heures de gloire avec les westerns sus-cités.

Les plus

  • Un western d’une noirceur rare.
  • Les musiques de Ennio Morricone.
  • Une interactivité vraiment remarquable.
  • Un master (2K selon nos informations) de bonne tenue…

Les moins

  • … où subsiste toutefois quelques défauts très nettement visibles.
  • La différence de qualité d’image entre le Blu-ray et le Blu-ray 4K ne saute pas foncièrement aux yeux.

Le Grand silence (1968) – Édition Blu-ray 4K Ultra HD

Résumé : Dans la province de l’Utah, aux États-Unis. Le froid extrême de cet hiver 1898 pousse hors-la-loi, bûcherons et paysans affamés à descendre des forêts et à piller les villages. Les chasseurs de prime abusent de cette situation. Le plus cruel se nomme Tigrero. Mais un homme muet, surnommé « Silence », s’oppose à eux…

Disque 1 : Le Grand silence en Blu-ray 4K Ultra HD

Spécifications techniques :

  • Image : 1.85:1 encodée en HEVC 2160/24p SDR
  • Langues : Italien & Français DTS-HD Master Audio 2.0
  • Sous-titres : Français
  • Durée : 1h 46min 43s

Bonus (HD et VF) :

  • Préface de Jean-Baptiste Thoret (9min 33s)
  • Le Grand silence revu par Vincent Jourdan (57min 20s)
  • Morricone par Stéphane Lerouge (54min 58s)

Disque 2 : Le Grand silence en Blu-ray

Spécifications techniques :

  • Image : 1.85:1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langues : Italien & Français DTS-HD Master Audio 2.0
  • Sous-titres : Français
  • Durée : 1h 46min 43s

Bonus (HD et VF) :

  • Préface de Jean-Baptiste Thoret (9min 33s)
  • Le Grand silence revu par Vincent Jourdan (57min 20s)
  • Morricone par Stéphane Lerouge (54min 58s)

Disque 3 : Le Blu-ray de bonus (HD)

  • Documentaire Sergio Corbucci : L’Uomo Che Ride (2015) (54min 01s, Italien STF)
  • Documentaire Sergio Corbucci par Alex Cox (16min 33s, Anglais STF)
  • Bandes-annonces (3min, VF, SD)
  • Fin alternative sans commentaires (1min 56s, SD)
  • Générique français (3min 55s, SD)
  • Scènes commentées par Olivier Père (21min, SD)

Captures Blu-ray – Édition Eureka 2021
Cliquez pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Captures Blu-ray – Édition Studio Canal 2022
Cliquez pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Captures Blu-ray 4K Ultra HD – Édition Studio Canal 2022
Cliquez pour les visualiser au format HD natif 3840×2160

3 réflexions sur « Le Grand silence : Chasseurs de 4K »

  1. Avez-vous comparé le disque UK avec les disques FR pour les dernières minutes du film ? Autant tout le reste du film relève clairement des mêmes bases techniques à l’étalonnage/gamma près, autant les choses changent très nettement à partir de la 97ème minute (jusqu’au générique de fin à 1h44), et on bascule clairement sur une source différente. C’est très étonnant car, a priori, il n’y a pas de différence de contenu au niveau du film, et on se demande alors pourquoi ne pas avoir continué d’exploiter le master 2K. C’est d’autant plus étonnant que le résultat sur le disque Canal est vraiment pas top pour ce segment, c’est sombre et surtout très lisse, clairement dégrainé.

  2. Nous avons bien noté « le final dans le saloon présente un rendu très changeant aussi bien en termes de définition que de saturation des couleurs » sans pour autant focaliser notre attention sur ces dernières minutes en termes de comparaison.

  3. Je n’étais pas sûr que cette phrase se réfère au changement entre le reste du film et ce passage, et me donnait l’impression d’un rendu changeant au sein de cette scène final. Merci pour la précision.

    J’ai posé la question, car ce segment est basé sur un scan 4K d’une copie d’exploitation, et semble être la base d’une certaine confusion sur la résolution générale de la restauration. Le festival Lumière indiquait par exemple « Restauration 4K Studiocanal aux laboratoires Augustus Color et VDM. » La cinémathèque française indiquait elle en 2017 « Restauré en 4K par la CSC – Cineteca Nazionale de Rome à partir des négatifs son et image mis à disposition par Movietime. La restauration a permis de récupérer la fin alternative, tournée par Corbucci à la demande des producteurs. Elle sera également montrée. Les travaux ont été réalisés aux Laboratoires Augustus Color et Studio Cine de Rome. »

    Sauf, donc, que le résultat est clairement basé sur le master 2K paru aux USA chez Film Movement (cela se voit encore plus directement que quand on compare avec le disque Eureka) : https://screenshotcomparison.com/comparison.php?id=22421
    On aurait donc 2 restaurations 4K mais un UHD basé sur un master à 93% en 2K (à titre personnel, je doute que ce qui a été diffusé à Lumière était une restauration 4K intégrale, je pense que c’était le master 2K/4K utilisé par Canal).

    Enfin, sur un autre sujet, il est intéressant de noter que l’édition FR ne présente qu’une fin alternative, en SD et sans son (alors qu’elle possède des lignes de texte), alors que les disques US et UK en proposent 2 (une happy end et une fin ambigüe), restaurées en 2K et en italien sous-titré.

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