Enfin s’exclameront certains ! En dépit d’une fin de carrière marquée par plusieurs œuvres phares produites (et réalisées) en France, il aura fallu patienter jusqu’en 2022, soit six longues années depuis le lancement du Blu-ray 4K, pour voir enfin un long-métrage de Luis Buñuel débarquer sur le support. Une bien longue attente toutefois récompensée puisque Le Charme discret de la bourgeoisie sort dans une édition Blu-ray 4K Ultra HD en tous points remarquables… ou presque.

Testé à partir d’une édition française définitive fournie par l’éditeur.

Ou bien était-ce peut-être pour coïncider avec le 50ème anniversaire du film (comme indiqué en tout petit sur le devant de la jaquette) que StudioCanal a patienté jusqu’en 2022 pour sortir Le Charme discret de la bourgeoisie en Blu-ray 4K Ultra HD. Toujours est-il que, comme toujours de la part de l’éditeur pour une parution sur le support, le film a fait l’objet d’une restauration 4K en bonne et due forme comme le rappelle l’écriteau au lancement du film ainsi qu’une pleine page dans le livret inclus au sein de cette édition et dont voici la retranscription :

La restauration 4K du Charme discret de la bourgeoisie a été produite en 2022 par StudioCanal avec le soutien du CNC.
Les travaux de restauration ont été réalisés par le laboratoire L’Image Retrouvée à partir des éléments stockés aux Archives du Film.
Le négatif original 35mm a été scanné en 4K sur Arriscan et, pour certaines parties du négatif trop endommagées, un interpositif a été utilisé afin d’optimiser la restitution du film dans sa qualité originale.
Les nombreuses rayures, détériorations physiques et poussières ont été effacées image par image.
L’étalonnage s’est effectué en référence avec les éléments 35mm d’origine afin de respecter l’image supervisée par le chef opérateur Edmond Richard. La bande son a été restaurée à partir du mixage d’origine pour retrouver un son fidèle à celui de l’époque.
Le projet a été supervisé par l’équipe de StudioCanal, Sophie Boyer et Jean-Pierre Boiget.

De haut en bas :

• Blu-ray – Édition Criterion 2021 (USA)
• Blu-ray – Édition StudioCanal 2021
• Blu-ray – Édition StudioCanal 2022 (Master 4K)
• Blu-ray 4K UltraHD – Édition StudioCanal 2022 (Master 4K)

Attention toutefois à ne pas se méprendre quant à l’implication du directeur de la photographie Edmond Richard, disparu en 2018, donc bien avant cette nouvelle restauration 4K de 2022. La tournure « l’image supervisée » pourra prêter quelque peu à confusion pour le coup. Quoi qu’il en soit, nous sommes bel et bien en présence d’une image au format 1.66:1 encodée en HEVC 2160/24p HDR10 obtenue à partir d’un scan 4K du négatif original. Le résultat est sans commune mesure avec le précédent master utilisé sur différentes éditions Blu-ray au cours des cinq dernières années :

• Un coffret 5 films intitulé Buñuel: The Essential Collection paru au Royaume-Uni en octobre 2017 chez StudioCanal.
• L’édition française sortie en exclusivité FNAC en mars 2020 puis en janvier 2021 dans toutes les autres enseignes chez StudioCanal.
• Un coffret 3 films intitulé Three Films by Luis Buñuel paru aux États-Unis en janvier 2021 chez Criterion.

Dans tous les cas (on a vérifié), le master était strictement identique. En 2022, Le Charme discret de la bourgeoisie a fait peau neuve et ce tout nouveau master 4K offre désormais un rendu sans commune mesure avec son prédécesseur. La première différence se situe au niveau de la propreté de la copie qui est désormais nickel et les différentes petites petzouilles que l’on pouvait encore apercevoir auparavant ne sont plus que de l’histoire ancienne tandis que le cadrage offre un surplus d’image dans toutes les directions. La deuxième différence se situe au niveau de la précision de l’image. Restauration et résolution 4K oblige, la définition fait un bond en avant significatif comme en attestent les différents plans larges (cf. la profondeur de champ lors de ce plan de la révolutionnaire qui monte en voiture et s’éloigne à 12min ou encore toutes ces petites séquences des six amis qui déambulent en rase campagne à 29min, 73min, etc.). La troisième différence se situe au niveau de l’étalonnage. Là où les couleurs du précédent master apparaissaient pour le moins blafardes, cette nouvelle restauration leur redonne tout leur éclat, depuis les roses bien rouges dans un vase posé sur une table (43min) jusqu’à l’argenterie rutilante (50min) en passant par la densité du noir du costard du chauffeur (20min) ou de la soutane de l’évêque (23min), sans oublier la nature verdoyante et fleurie de la propriété du couple Sénéchal. Les dix premières minutes du film qui se déroulent de nuit offrent par ailleurs une excellente lisibilité, preuve si besoin était d’une excellente gestion des contrastes.

Quelques plans ici et là laissent toutefois paraître une qualité inférieure, moins définie et moins saturée en termes de couleurs comme par exemple ce plan séquence de deux minutes à la 70ème alors que Rafael tente de s’éclipser de la soirée et est « rattrapé » par la femme du Colonel puis par le Colonel en personne qui l’offense à propos de son pays. Sans doute s’agit-il là des passages restaurés à partir d’un interpositif comme stipulé au sein du livret. Le passage en question était par ailleurs dans un état encore plus déplorable sur l’ancien master. Ce ne sont pas tant ces passages-là qui nous ont quelque peu fait tiquer que le rendu argentique. Le grain est certes visible mais l’ensemble nous a toutefois semblé quelque peu dégrainé.

Point de grief en revanche à l’encontre de la section sonore avec une piste française DTS-HD Master Audio 2.0 mono en tous points exceptionnels (des pistes anglaise et allemande sont également disponibles mais nous n’y avons guère prêté attention pour être honnête). Les dialogues sont clairs et limpides de bout en bout et la bande-son ne souffre qu’aucune aspérité inhérente aux outrages du temps (pas le moindre souffle ni le moindre craquement). Ce qui nous a toutefois ravi au plus haut point sont tous ces petits passages où différents bruits « ambiants » viennent s’immiscer dans le récit comme Buñuel aimait à le faire dans ces films. Pour l’occasion, nous n’avons pu résister à l’envie de vous en lister quelques-uns :

• 46min 25s : Cette sirène dont le hurlement monte en puissance.
• 61min : Les tirs d’artillerie que l’on entend très distinctement au loin tandis que les dialogues demeurent parfaitement audibles.
• 80min 26s : Ce coup de fusil vengeur tiré par l’évêque.
• 85min : Ce robinet qui fuit et que l’on entend s’écouler au goutte à goutte durant l’interrogatoire de police.
• 90min 25s : Cet avion hors-champ qui vient couvrir la voix du ministre interprété par Michel Piccoli.
• 91min 12s : Le bruit des machines à écrire qui vient couvrir la voix du commissaire.

L’interactivité a elle aussi été soignée puisque l’on trouve deux nouveaux bonus en compagnie de Charles Tesson. Le premier se focalise sur trois séquences spécifiques tandis que le second est une analyse plus large des thématiques récurrentes dans les œuvres de Buñuel : la répétition, le désir contrarié en l’occurrence celui de vouloir diner entre amis, les classes sociales, la violence, la religion, etc. Les deux autres suppléments étaient quant à eux déjà présents sur la précédente édition Blu-ray, à savoir une interview de Jean-Claude Carrière, coscénariste du film, et une analyse datant de 2012 du professeur Peter W. Evans. On appréciera également de trouver la bande-annonce originale ainsi que celle restaurée de 2022. Un livret de 24 pages rédigé par Charles Tesson est également inclus et fait quelque peu redondance avec les autres suppléments. À noter que la quatrième de couverture du livret est littéralement collée au Digipack. Impossible donc d’emporter le livret seul pour le lire sans emporter tout le Digipack avec. Pas très pratique.

Pour aussi soignée que soit cette interactivité, on reste toutefois sur sa faim. D’une part le bonus présent sur l’édition précédente intitulé Une promenade parmi les ombres de Luc Lagier a disparu. Cette analyse en voix off avec des extraits d’interview de Carrière et de Buñuel selon différents chapitres (ses œuvres antérieures, l’écriture du scénario, le surréalisme, la mort) est certes en partie redondante avec les nouvelles analyses de Charles Tesson mais une fois de plus les complétistes auraient assurément apprécié de la retrouver sur cette nouvelle édition. Mais ce qui nous laisse le plus dubitatif est de constater que l’édition Criterion propose deux suppléments et non des moindres introuvables sur l’édition StudioCanal. Le premier intitulé Il était une fois… Le Charme discret de la bourgeoisie (52min, 2011) est issu de la série documentaire Il était une fois… tandis que le second est un making of (14min, 1972) issu d’une autre série documentaire baptisée Pour le cinéma. Soit deux reportages… français ! Si l’on veut bien croire que l’obtention des droits n’est pas chose aisée (le coût est-il à ce point exorbitant ?), il est pour le moins ubuesque de devoir se tourner vers une édition anglo-saxonne pour profiter de documentaires de qualité « made in France » !

Pour finir, précisons que, fidèle à ses bonnes habitudes, StudioCanal propose Le Charme discret de la bourgeoisie dans une édition Blu-ray 4K Ultra HD sous la forme d’un combo Blu-ray 4K + Blu-ray où le disque Blu-ray bénéficie des mêmes attentions que la galette 4K, à savoir le tout nouveau master 4K.

Les plus

• Enfin un Buñuel en 4K !
• Une restauration 4K somptueuse qui profite aussi à la galette Blu-ray
• Une bande son remarquable.
• Une interactivité généreuse…

Les moins

• … même s’il y avait mieux à faire (cf. l’édition Criterion).

Le Charme discret de la bourgeoisie – Édition Blu-ray 4K Ultra HD

Résumé : Les Thévenot viennent dîner chez les Sénéchal. Surprise : le repas était prévu pour le lendemain. Thévenot invite tout le monde dans une auberge transformée en salle mortuaire. Nouvelle réception, le samedi, mais cette fois les Sénéchal sont occupés… Le dîner sera ainsi sans cesse repoussé pour des raisons tout aussi absurdes les unes que les autres.

Disque 1 : Le Charme discret de la bourgeoisie en Blu-ray 4K Ultra HD

Spécifications techniques :

• Image : 1.66:1 encodée en HEVC 2160/24p HDR10
• Langues : Français, Anglais & Allemand DTS-HD Master Audio 2.0 mono
• Sous-titres : Français pour sourds et malentendants, Allemands, Anglais
• Durée : 1h 41min 50s

Bonus (HD) :

• Interview de Jean-Claude Carrière (24min 22s, VOSTF)
• Analyse de 3 séquences du film par Charles Tesson (19min 45s)
• Analyse de Charles Tesson (31min 05s)
• Bande-annonce 2022 (1min 12s)

Disque 2 : Le Charme discret de la bourgeoisie en Blu-ray

Spécifications techniques :

• Image : 1.66:1 encodée en AVC 1080/24p
• Langues : Anglais, Français & Allemand PCM 2.0
• Sous-titres : Français, Allemands, Anglais pour sourds et malentendants
• Durée : 1h 41min 50s

Bonus (HD) :

• Analyse critique du professeur Peter W. Evans (34min 14s, SD, VOSTF)
• Interview de Jean-Claude Carrière (24min 22s, VOSTF)
• Bande-annonce originale (2min 56s, SD)
• Analyse de 3 séquences du film par Charles Tesson (19min 45s)
• Analyse de Charles Tesson (31min 05s)
• Bande-annonce 2022 (1min 12s)

Captures Blu-ray – Édition Criterion 2021 (USA)
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Captures Blu-ray – Édition StudioCanal 2021
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Captures Blu-ray – Édition StudioCanal 2022 (Master 4K)
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Captures Blu-ray 4K Ultra HD – Édition StudioCanal 2022 (Master 4K)
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