Après avoir fracassé le box-office international à noël dernier, Star Wars VII, aka Le Réveil de la Force, débarque à présent en DVD/Blu-ray dans toutes les bonnes crémeries de France et de Navarre. L’occasion rêvée pour prendre un peu de recul sur l’accueil réservé à ce septième opus de la mythique saga imaginée par George Lucas en 1977. Petite précision avant de commencer : à l’instar de notre article sur la saison 5 de Game of Thrones, nous ne prendrons pas de gants ici non plus. Dit autrement, si vous vouliez un papier garanti sans spoilers, passez votre chemin ou bien rendez-vous sur notre critique du film faite à l’époque.
La photocopieuse ?
Et en parlant de George Lucas justement, désormais rangé des camions depuis le rachat de sa société Lucasfilm par Disney (une jolie retraite de 4 milliards de dollars), on aimerait bien savoir ce qu’il a pensé, en toute honnêteté, de ce que d’aucuns considèrent avant tout comme une photocopie de l’Épisode IV : Un nouvel espoir (avec un zeste d’Empire contre-attaque et de Retour du Jedi par endroits). Une photocopie certes très bien exécutée, pleine de panache et non dénuée de cet humour à mi-chemin entre révérence et irrévérence ; de celle qui sait également admirablement mais non moins habilement ménager la chèvre et le chou, à savoir les fans de la première heure tout en ouvrant des perspectives d’avenir que l’on devine ou plus exactement que l’on espère autrement plus originales et ambitieuses. Non pas tant la perspective de l’arrivée de personnages gays, annonce qui pour le coup nous en gratte poliment une sans toucher l’autre, mais plutôt de véritables prises de risques artistiques ou à tout le moins narratives. Car pour le coup, en jetant un petit coup d’œil à la filmo du réalisateur de ce Star Wars VII, on comprend un peu mieux pourquoi certains considèrent J.J. Abrams comme un (très) bon faiseur au sein du paysage cinématographique actuel, le petit « trait de génie » des aïeuls dont ils s’inspirent en moins.
On pense par exemple à sa version de E.T. baptisée Super 8, projet de longue date dont il avait d’ailleurs parlé avec Steven Spielberg ou encore au reboot de Star Trek que les pontes de la Paramount lui proposèrent après le succès de Cloverfield (où il officiait en tant que producteur via sa boite de prod Bad Robot). De là à dire que son fait d’arme le plus mémorable à date reste son tout premier, à savoir la série Alias, avec la future-ex Mme Ben Affleck à la ville en tête d’affiche, Jennifer Garner, qui valut à Tom Cruise de le contacter pour lui confier les rênes de Mission : Impossible 3. Bref, beaucoup de reboots, suites et autres remakes au sein d’une filmographie certes économiquement florissante à défaut d’originalité. J.J. Abrams a d’ailleurs fait amende honorable au lendemain de la sortie du film au cours d’un podcast avec The Hollywood Reporter : « Je peux comprendre que certains disent : « C’est un rip-off complet ! » […] Le plus important pour moi était d’introduire de nouveaux personnages en lien avec l’histoire que nous connaissons déjà en vue d’en conter une nouvelle : regarder en arrière pour aller de l’avant ». Dont acte ! Nous patienterons donc bien sagement jusqu’en décembre 2017 pour connaître la suite et ce que nous réservera l’Épisode VIII confié aux bons soins de Rian Johnson, très en vue après son très estimable et estimé Looper (2012). Mais avant cela, nous aurons eu tout loisir de découvrir la préquelle d’Un nouvel espoir à noël prochain : Star Wars Rogue One, réalisé par Gareth Edwards à qui l’on doit les tout aussi estimables et estimés Monsters et Godzilla mouture 2014.
Les critiques
Soit pas mal de personnalités fort estimables et estimés en somme derrière les caméras de cette nouvelle salve de longs-métrages Star Wars actuellement en préparation dans le giron du studio aux grandes oreilles pour les nombreuses années à venir. En attendant de savoir à quelle sauce seront mangées toutes ces suites / préquelles / spins-off (et tant pis pour les indigestions de Star Wars à un rythme annuel), revenons quelques instants sur l’accueil réservé à ce Réveil de la Force. Du côté de la presse anglo-saxonne, le site RottenTomatoes affiche un très élevé 92%, le positionnant à la 6e place du classement 2015 emmené par Mad Max Fury Road et à la 3e place de tous les films de la saga Star Wars derrière le 94% des Épisodes IV et V (tiens donc !). Même refrain du côté d’IMDB où, à date, la note est de 8,3 sur 10 (pour 500 000 votes), lui permettant ainsi d’intégrer le très connu Top 250 mais très loin derrière les 20e et 12e place d’Un Nouvel espoir et L’Empire contre-attaque (tiens donc ! bis repetita). Revenons à présent de ce côté-ci de l’Atlantique pour nous pencher sur les critiques hexagonales qui, si l’on s’en tient à un célèbre site tout de jaune vêtu, ont là encore globalement encensé ce Réveil de la Force à quelques rares exceptions près : Mad Movies ou encore nos anciens collègues d’Écran Large que nous saluons au passage. Idem du côté des spectateurs avec une note de 3,8 sur 5. Cela vaut ce que cela vaut me direz-vous…
Les récompenses
Nous nous garderons bien de revenir ici-même sur la véritable révolution technologique que représenta à l’époque le tournage de Star Wars (et le résultat final à l’écran) pour nous focaliser sur un aspect bien précis de la reconnaissance de ce septième volet par ses pairs : la grand messe des Oscars. À l’époque (soit en 1978), l’Épisode IV avait raflé les récompenses suivantes : direction artistique, costume, son (+ un prix spécial pour les effets sonores signés Ben Burtt), montage, effets spéciaux et musique. Ce même opus inaugural de Star Wars avait également été nominé dans les catégories Meilleur réalisateur et Meilleur scénario pour George Lucas, Meilleur acteur dans un second rôle pour Alex – « Oh secours Obi-Wan Kenobi, vous êtes mon seul espoir » – Guinness et Meilleur film. Soit pas moins de 6 statuettes au total sur les 10 potentiels et la preuve si besoin était que l’aspect novateur du film avait bien été compris et pas simplement sur les habituelles considérations techniques forcément de seconde zone pour ce genre de raout annuel. En 2016, Le Réveil de la Force est quant à lui reparti broucouille de la cérémonie en dépit de ses 5 nominations (techniques à une exception près), passant ainsi à côté des statuettes pour le Meilleur montage, les Meilleurs effets spéciaux, la Meilleure musique ou encore la Meilleure bande son (montage et mixage). L’Académie a donc bien fait passer son message.
Le box-office
Mais in fine, qu’importe les récompenses et encore moins les avis de la presse qui, comme chacun le sait désormais, ne sert plus à grand-chose sinon casser du sucre sur le dos de (potentiels) succès populaires (cf. le cas récent des Visiteurs 3) ou bien à encenser des films que personne n’ira voir. Ce qui compte à l’arrivée, notamment aux yeux des financiers, ce sont les chiffres. Dit autrement : la tune, l’oseille, le fric, le blé. Bref, les rentrées d’argent au box-office. Et en la matière, Star Wars VII ne s’en est plutôt pas trop mal sorti (doux euphémisme). Commençons tout d’abord si vous le voulez bien par le petit tableau récap ci-dessous regroupant les chiffres au box-office français, U.S. et mondial des sept épisodes de Star Wars.
Examinons désormais d’un peu plus près tous ces chiffres. À tout seigneur tout honneur, commençons par les terres natales de Star Wars VII : les États-Unis. Dans l’absolu, le film y a littéralement fait sauter la banque même si l’on devine bien volontiers la partouze géante à Disneyland qui aurait été organisée si le film avait atteint la barre chimérique du milliard. Star Wars VII relègue cependant loin derrière le n°2 du classement, Avatar (2009) et ses 760 millions de dollars. Toutefois, à y regarder de plus près, en considérant cette fois le classement réajusté qui tient compte de l’inflation du prix des tickets de cinéma, Star Wars VII se trouve alors relégué à la 11e place, dans une galaxie très lointaine des 1,7 milliard de Autant en emporte le vent (1939) ou encore des 1,5 milliards de… Star Wars IV (tiens donc ! Et de trois !).
À l’échelle mondiale cette fois, Star Wars VII est devenu le troisième film de l’histoire à franchir la barre des 2 milliards de dollars. Un score plus ou moins espéré du côté de Disney comme nous le rappelait Patrice Girod lors de notre rencontre à l’occasion de la sortie du jeu Star Wars Battlefront. Pour autant, ceux qui le voyait déjà monter sur la première marche de ce même podium se sont fourrés le doigt dans l’œil jusqu’au moignon ; les deux premières places restant toujours l’apanage des deux chefs d’œuvres de James Cameron (oui, j’adore Jimbo pour ceux qui ne l’aurait pas encore compris) que sont Avatar et Titanic (1997) avec respectivement 2,7 et 2,1 milliards.
Et la France dans tout ça ? Là, le score est plus clair puisque le décompte s’y fait en nombre d’entrées. Avec 10,4 millions d’entrées, Star Wars VII se positionne à la 25e place du classement hexagonal de tous les temps (dominé par Titanic et ses 21,7 millions tandis qu’Avatar se « contente » de 14,7 millions), intercalé entre les 10,7 millions de Bambi (1948) et les 10,3 millions de Taxi 2 (2000). Outre la première place du box-office français en 2015, loin devant les 6,5 millions des Minions, il s’agit également, à date, du plus gros score pour un film de la saga Star Wars et le seul à ce jour à être parvenu à franchir la barrière mythique des 10 millions d’entrées dans l’Hexagone.
Le Blu-ray
Les éditeurs vidéo étant particulièrement frileux dès qu’il s’agit de communiquer leurs chiffres, il n’est pas dit que nous aurons droit au même genre de « transparence » vis-à-vis des ventes en matière de DVD / Blu-ray. Une chose est sûre en revanche, tous ceux qui feront péter la CB pour acheter le Blu-ray de Star Wars VII en auront pour leur argent, en plus de faire un geste pour l’UNICEF (on y revient juste après). Qui pour en douter ? L’image et le son ? Ils déchirent tous les deux à tous les niveaux. Est-il nécessaire d’en dire davantage sinon pour préciser que le changement d’éditeur profitera grandement aux francophones. Là où les six premiers opus de la saga parus en Blu-ray en 2011 sous l’égide de la Fox ne proposaient les pistes VF qu’en simple DTS 5.1 mi-débit (768Kb/s), la sortie de Star Wars VII sous bannière Disney propose désormais la langue de Molière en DTS-HD High Resolution Audio 5.1. Certes, ce n’est pas encore le DTS-HD Master Audio 7.1 de la VO mais on s’en rapproche tout de même grandement pour un résultat à l’oreille des plus réjouissants. Dernière précision à l’attention des puristes de l’argentique pour leur signaler que Star Wars VII a été tourné en pelloche et non en numérique comme il nous l’est rappelé dans les suppléments.
Du côté des bonus justement et à l’instar du film à proprement parlé, on sent là encore la volonté de ménager la chèvre et le chou avec des interventions aussi bien des nouveaux venus que des vieux routards, à l’écran (Mark Hamill, Harrison Ford, Carrie Fisher, Anthony Daniels, Peter Mayhew, Warwick Davis) comme en coulisses (Lawrence Kasdan, John Williams, Denis Murren, Phil Tippett), sans oublier bien sûr l’omniprésence de J.J. Abrams (qui contribua à la conception de BB-8 à l’aide d’un simple post-it) et de Kathleen Kennedy (à qui George Lucas a confié les clés de l’Empire Lucasfilm à son départ faut-il le rappeler). Les différentes petites featurettes (5 à 10min chacune) ne font hélas qu’effleurer leurs sujets respectifs tandis que l’on sent assez distinctement l’ombre de Disney planer sur La Force du changement consacré à Force for change, une œuvre caritative destinée à lever des fonds pour l’UNICEF avec comme figure de proue une certaine Malala Yousafzai de passage sur le plateau de tournage ; tout comme un dénommé Peter Jackson ou encore Karl Urban venus visiter l’intérieur du Faucon Millenium.
Un Faucon Millenium reconstitué de toutes pièces dans les studios Pinewood, ceux là-même qui avait déjà servi à l’époque pour les besoins de certaines séquences d’Un nouvel espoir, et auquel est consacré un large pan de Secrets du Réveil de la Force : un voyage cinématographique. Soit 70 minutes d’un documentaire fort recommandable réalisé par le spécialiste es making of Laurent Bouzereau (bien que le bonhomme soit plus réputé pour son boulot sur les films de patrimoine que sur les longs-métrages récents) qui entend là encore faire le pont entre passé, plusieurs images d’archives du tournage des Star Wars originels à l’appui, et présent. Et J.J. Abrams de nous préciser à nouveau que « l’on passe le flambeau à la prochaine génération » tout en restant très elliptique quant aux évènements à venir : « Luke joue un rôle important dans la continuité de cette histoire. Ce qui m’enthousiasme, c’est où nous mènera l’histoire de Luke Skywalker ». La quatrième partie du doc revient d’ailleurs sur cette ultime séquence de Star Wars VII où apparaît (enfin) Luke – Mark Hamill rejoint par la même occasion le club des comédiens les mieux payés proportionnellement à son temps de présence à l’écran (à peine une minute). La somme exacte n’est certes pas connue mais comme le révèle Variety, le montant est à sept chiffres dans la « fourchette basse ». Pour autant, c’est Harrison Ford qui décroche la timbale avec un chèque compris entre 10 et 20 millions de dollars. Une somme qui peut bien sûr s’expliquer par le fait que son personnage sera nettement moins présent à l’écran dans les prochains épisodes (un flashback par ci par là éventuellement). Outre la scène avec Luke, cette dernière partie du doc revient donc sur la séquence supposément climax de Star Wars VII, où l’on sent là encore la très grande influence de l’affrontement père – fils du Retour du Jedi et qui prend au pied de la lettre l’expression « Tuer le père ». Mais là encore, le discours sincère / préparé (rayez la mention inutile) d’Harrison Ford est des plus limpides quant au passage de témoin : « Je ne voulais pas que Han Solo meure. Je voulais qu’il ait un poids émotionnel significatif dans l’histoire. J’étais résolu à être utile, à laisser les responsabilités aux autres et à disparaître ».
J.J. Abrams entre le nouvel espoir de 1977 et celui de 2015
Ces autres auxquels fait référence Harrison Ford, ce sont bien sûr la relève assurée par Adam Driver dans la peau de Dark Vador Kylo Ren, Lupita Nyong’o dans celle de Yoda Maz, Andy Serkis dans celle de Palpatine Snoke, sans oublier bien sûr Daisy Ridley dans le rôle de Luke Skywalker Rey. Cette même Rey qui nous déclare en guise de conclusion : « On se reverra. J’ai bon espoir ».
Notes :
– Image : 5/5
– Son : 5/5
– Bonus : 3/5
Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080
Star Wars VII : Le Réveil de la Force – Édition Blu-ray
Éditeur : Walt Disney Home Entertainment France
Date de sortie : 16 avril 2016
Spécifications techniques :
– Image : 2.40:1 encodée en AVC 1080/24p
– Langues : Anglais DTS-HD Master Audio 7.1 & Français DTS-HD High Resolution Audio 5.1
– Sous-titres : Anglais & Français
– Durée : 2h 18min 06s
Bonus (en HD et VOSTF) :
– Secrets du Réveil de la Force : un voyage cinématographique (69min 14s)
– Le réveil du récit : la lecture de groupe (4min 01s)
– Conception des créatures (9min 34s)
– La construction de BB-8 (6min 03s)
– Schéma d’un combat : la bataille dans la neige (7min 02s)
– ILM : la magie visuelle de la Force (7min 55s)
– John Williams : la septième symphonie (6min 51s)
– 6 scènes supprimées (4min 15s)
– La Force du changement (3min 22s)