La Proie de l'auto-stop - Image une test DVD

La Proie de l’autostop en DVD chez Artus Films

La Proie de l’autostop [Autostop rosso sangue]  (Ital 1977) de Pasquale Festa-Campanile est une intéressante découverte. On n’ose pas écrire « redécouverte » car il faut bien avouer qu’on ignorait pratiquement l’existence du titre chez nous : il fut à peine exploité au cinéma dans les salles françaises et peut-être même pas sur la totalité du territoire puis il connut une seconde vie en VHS Secam. C’est pourtant un remarquable film noir policier violent qui bascule, in extremis, dans le fantastique.

La Proie de l'autostop - Affiche italienne d'époque

USA 1977. Un couple à la dérive, le journaliste Walter et son épouse Eve, est pris en otage par Adam, un gangster psychopathe qui se lie d’une étrange manière avec Walter, avant de violer Eve pour mieux humilier ce dernier. Il exige qu’on le conduise à la frontière mexicaine où il pourra dépenser les deux millions de dollars que contient sa valise, fruit d’un hold-up meurtrier. Durant le voyage, il abat deux policiers, se débarrasse de ses anciens complices qui le pourchassaient. Il semble parvenu à ses fins lorsque Eve l’abat. L’odyssée de Walter et Eve, nullement réconciliés pour autant, prend alors un tour infernal : un cadavre sur les bras et une grosse somme d’argent entre les mains, ils divergent sur la marche à suivre. Une rencontre avec une bande de motards dans un bar va précipiter les événements.

Dans une filmographie italienne oscillant entre des scénarios d’une très haute tenue littéraire, écrits pour de prestigieux collègues (Festa-Campanile a collaboré à celui de Rocco et ses frères et à celui du Guépard, tous deux signés par Luchino Visconti) et la réalisation de comédies plus ou moins érotiques mais parfois prétexte à satire ou critique sociale explicite (Le Sexe des anges, Quand les femmes avaient une queue, Ma femme est un violon), rien ne laissait présager ce très curieux mélange de « road movie » et de « rape and revenge ». De fait, ces deux catégories du film noir s’allient assez naturellement ici : on songe aussi bien au Voyage de la peur [The Hitch-Hiker] (USA 1953) d’Ida Lupino à cause de son argument (un criminel fuyant la police, prenant en otage les conducteurs d’une voiture) qu’à La Dernière maison sur la gauche à cause de certains aspects du casting et du scénario (David Hess à nouveau ici dans un rôle de marginal sadique ouvertement référentiel au titre américain de 1972 réalisé par Wes Craven). Le trio d’acteurs principaux est remarquablement bien dirigé : Franco Nero (Django, Die Hard 2 [58 minutes pour vivre), David Hess (La Dernière maison sur la gauche), Corinne Cléry (Histoire d’O) sont tous les trois excellents, du début à la fin. On repère également, au casting, un ou deux seconds couteaux du « poliziotti » qui font bien ce qu’ils ont à faire.

La Proie de l'autostop - Lobby Card

On peut oublier certaines facilités (la ridicule soirée hippie au coin du feu dans le camping, un camion rouge ressemblant à celui du Duel de Spielberg, la lourdeur argotique voire ordurière de certains dialogues, une direction artistique s’attachant laborieusement à maquiller les routes italiennes pour les faire ressembler aux routes américaines, l’idée banale de faire du reporter un alcoolique drogué au whisky) si on considère La Proie de l’autostop comme une structure refermée sur elle-même par un plan final original lui conférant brusquement une nouvelle dimension, autant celle d’un cauchemar fantastique que celle d’une fable philosophique pessimiste. Entre ce plan final inattendu et le début du générique de fin, une curieuse citation de l’écrivain allemand Heinrich Böll (1917-1985) augmente encore l’aspect parabolique de l’histoire.

Une édition DVD sans fautes

À commencer par les bonus qui se scindent en deux volets majeurs. D’abord un livret de David Didelot intitulé Un genre maudit : le « Rape and Revenge ». En  64 pages illustrées et dotées d’une filmographie finale assez riche, originale et utile, David Didelot brosse ce qu’on pourrait plutôt qualifier de catégorie transversale à divers genres, au carrefour du film noir violent, du film fantastique, du film érotique. Catégorie reposant sur une structure (un viol suivi d’une vengeance) qui remonte évidemment loin dans l’histoire des religions, des mythes et des légendes, dans celles de la littérature antique et moderne. Didelot ne remonte pas à ces sources lointaines mais il aurait pu, par exemple, mentionner Le Viol de Lucrèce de William Shakespeare. De là à dire qu’il y a un nouveau genre dans l’histoire du cinéma, je ne le pense pas mais on peut assurément convenir avec David Didelot qu’il y a eu un filon (notamment italien et que Didelot connaît à la perfection) sur ce thème dans le cinéma-bis et le cinéma de la violence des années 1970-1980 même si on ne peut guère établir de comparaison esthétique ou thématique entre des films aussi divers que Les Chiens de paille (USA 1971) de Sam Peckinpah ou L’Ange de la vengeance [Ms.45 / Angel of Vengeance] (USA 1980) d’Abel Ferrara, sans même remonter au Dernier train de Gun Hill (USA 1958) de John Sturges ni à La Source (Suède 1960) d’Ingmar Bergman. Certains titres sont curieusement absents de cette filmographie : Naissance d’une nation (USA 1915) de D.W. Griffith, Death Wish [Un justicier dans la ville] (USA 1974) et Death Wish II [Un justicier dans la ville 2] (USA 1981) de Michael Winner, par exemple. Mais, au fond, peu importe : elle ne vise pas non plus à l’exhaustivité et concerne surtout la période 1970 à nos jours. Didelot signale in fine un livre américain plus ample : Alexandra Heller-Nicholas, Rape-revenge films : a critical study, éditions McFarland, USA 2011.

La proie de l'autostop

Puis une présentation du film par ce même David Didelot  qui est très informative, précise avec un très grand soin apporté à tous les aspects du film : sa production, son cinéaste, son scénario, son tournage, sa musique, son exploitation française et sa censure, sa réception critique, son casting et la manière dont on peut l’intégrer à l’histoire du cinéma comme à celle du cinéma-bis. L’élocution de Didelot est rapide (il communique une grande quantité d’informations en un temps limité) et il faut suivre attentivement, faute de rater tel ou tel point important ou simplement intéressant. Elle ne fait nullement double-emploi avec le livret, dans lequel ce titre occupe une demi-page environ.

On trouve aussi une galerie photos (ou « diaporama ») qui comporte notamment certaines photos d’exploitation allemandes peu connues chez nous, la jaquette VHS Hollywood Vidéo, une mignonne affiche japonaise… deux bandes-annonces de la collection « British Horror » (La Poupée diabolique, La Tour du diable) et enfin deux bandes-annonces de la collection « Rape and Revenge » (La Proie de l’autostop, La Dernière maison sur la plage).

Niveau technique, le format original 1.85 est respecté. La copie chimique est satisfaisante pour une définition vidéo aussi bonne qu’on puisse le souhaiter en matière de SD-DVD. C’est une copie originale italienne avec générique italien qui a servi à ce transfert vidéo numérique : cela change agréablement des copies internationales avec génériques anglais auquel le cinéma-bis en vidéo nous a souvent accoutumé. On a droit enfin à une VOSTF et une VF d’époque en Dolby mono 2.0. : proposition nécessaire et suffisante pour le cinéphile francophone. C’est le générique italien qui est présenté sur les deux versions. Musique signée Ennio Morricone, inspirée par le folklore western US, à la sécheresse stylistique rugueuse, collant assez bien à cet étrange « road-movie ».

Notes :
– Image : 4/5
– Son : 5/5
– Bonus : 4/5

Cliquez sur les captures DVD ci-dessous pour les visualiser au format 1024×576

 

La Proie de l’autostop – Édition DVD (Collection Rape & Revenge)

Éditeur : Artus Films
Date de sortie : 5 juillet 2016

La proie de l'autostop - jaquette DVD recto verso

Spécifications techniques :
– Image : 1.85:1 compatible 16/9
– Langues : italien et français DD 2.0 mono
– Sous-titres : français
– Durée : 1h39
– 1 DVD-9 (Boîtier digipack slim illustré)

Bonus :

  • Livre 64 pages « Un genre maudit : le Rape and Revenge » par David Didelot
  • L’autoroute rouge sang par David Didelot (45min)
  • Diaporama d’affiches et photos
  • Films-annonces des collections « Rape and Revenge » et « British Horror »

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