Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Test Blu-ray

Ghostland en Blu-ray Édition Spéciale Fnac

En mars dernier, l’auteur de ces lignes avait trouvé toutes les bonnes mais aussi et surtout toutes les mauvaises raisons pour ne pas bouger son petit cul jusqu’au cinoche afin d’y découvrir le dernier long-métrage écrit et réalisé par Pascal Laugier (cela sert à quelque chose que je ponde des critiques moi / Note du relecteur). À sa décharge, les trois premiers longs du bonhomme, découverts en salles ceux-là, ne lui avaient pas laissé un souvenir impérissable. Quatre mois plus tard, l’heure du rattrapage a sonné à l’occasion de sa sortie en vidéo. Et vous savez quoi ? Ghostland s’avère être sans conteste le meilleur film à date du réalisateur, servi par une édition Blu-ray de très haute volée.

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Ghostland (2018)

Réalisateur : Pascal Laugier
Éditeur : TF1 Vidéo
Sortie le : 17 juillet 2018

Notes :
– Image (Blu-ray 1080p) : 5/5
– Son : 4,5/5
– Bonus : 3,5/5

 

NB : Les captures de cet article sont issues du Blu-ray 1080p.

« Il me faudrait plus de talent »

Cette déclaration, c’est celle d’un Pascal Laugier en pleine séance de montage et que l’on peut entendre au sein du documentaire intitulé L’image du fantôme : Sur le tournage de Ghostland. Point de fausse modestie ici sinon le constat d’un homme passionné par le Septième Art en général et un genre en particulier, celui dans lequel il tente vaille que vaille de se faire une place depuis son premier long Saint-Ange (2004). Un genre qui ne trouve pas grâce au sein du paysage cinématographique hexagonal, lui préférant des dizaines de comédies annuelles, à la grande désolation de Laugier qui peine à trouver le financement pour ses films (seulement quatre en quatorze ans) et doit donc partir à l’autre bout du monde pour cela (et plus précisément dans le cas présent du côté de Winnipeg). Le « cas Martyrs (2008) » lui aurait-il été préjudiciable ? Au point que des techniciens du film avaient quitté le plateau avant la fin du tournage. Sur Ghostland, c’est la scripte qui s’en ira, ne supportant plus ce qu’elle voyait au jour le jour. Des situations dont Pascal Laugier n’a cure : « Je fais ces films pour emmerder ces gens-là » déclare-t-il, ajoutant que « le jour où ce genre de choses sera banalisé, c’est là qu’il faudra s’inquiéter ».

Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Capture Blu-ray

Sur les bancs de l’école de cinéma, le petit Laugier était déjà regardé de travers quand il clamait à voix haute que Dario Argento était un génie. Avec Ghostland, cette défiance ne risque pas vraiment de s’arranger tant il n’y va pas vraiment avec le dos de la cuillère une fois encore. Faut-il y voir alors une nouvelle expérience cinématographique traumatisante d’un esprit déviant et malsain qui n’aime rien tant que torturer ses protagonistes ? Ce serait passer totalement à côté des intentions du cinéaste qui déclare « Que le film soit nul m’importe peu. Ce que je ne veux pas, c’est qu’on puisse me reprocher que je fais sembler de raconter ce que je suis en train de raconter ». Que Pascal Laugier se rassure, si le fil rouge narratif de sa (courte) filmographie est axé sur les supplices, tant physiques que psychologiques, qu’il fait subir à ses interprètes féminines, dans le cas de Ghostland, le fond et la forme entre (enfin) en symbiose. Il faudra ainsi savoir regarder par-delà le gore, les ecchymoses et autres images dérangeantes « d’un cinéma d’horreur qui n’a jamais été vu » tel que cherche à le faire Laugier pour y déceler l’émotion véritable qui perle à la surface. Et avec elle les différentes métaphores des épreuves que devront subir ces (jeunes) femmes au cours de leur vie. Certaines allant parfois jusqu’à se créer leur petit monde imaginaire pour mieux se protéger de cette violence sociale au quotidien.

Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Capture Blu-ray

Il y a là comme un parallèle avec les déclarations de Laugier qui voit dans les sept à huit semaines de tournage comme un microcosme où le talent de tous les artistes devant et derrière la caméra converge, laissant alors de côté leurs egos et autres problèmes du monde réel. Et si le réalisateur a joué franc-jeu avec ses comédiennes, leur annonçant dès le départ qu’elles allaient en baver pour réussir à atteindre le degré d’émotion recherché, c’est un cinéaste tout aussi attentionné que l’on découvre en coulisses, furax lorsqu’il ne peut pas passer suffisamment de temps avec ses actrices pour cause de préparatifs techniques qui prennent des plombes. Pascal Laugier est un passionné, un sanguin diront certains, et cela se voit et se ressent à chaque minute du documentaire mais aussi et surtout dans chaque plan de son Ghostland. Ce qui ne l’aura pas empêché de douter du résultat final, qu’il espérait plus réaliste, façon Wes Craven, et non aussi noir et gothique. Mais le noir sied à ravir au cinéaste qui signe ici avec ce « film pour enfants que les enfants ne pourraient pas voir » l’une des plus belles odes faites aux femmes. Dussent ces dernières souffrir le martyre pour s’épanouir pleinement dans ce monde de détraqués.

Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Capture Blu-ray

Un putain de Blu-ray

Un monde qui n’aura nullement effrayé Mylène Farmer, déjà dirigée par « un putain de réalisateur » sur son clip City of love à qui elle enverra un SMS à deux heures du mat peu de temps après pour lui demander « s’il n’aurait pas un rôle de folle pour elle dans un film ? ». C’est dans ces termes tout aussi sincères que ceux de Pascal Laugier que s’exprime au cours d’une interview au J.T. de TF1 proposée en bonus cette immense chanteuse (oui, j’aime bien Mylène Farmer) ; elle qui aspirait à revenir au cinoche après son premier rôle dans Giorgino (1994). Quoi de plus naturel après tout tant ses premiers clips révolutionnèrent le monde musical dans les années 80 (au même titre que ceux d’un certain Michael Jackson) de par leurs influences cinématographiques mais tout en s’attirant les foudres de la censure, tel ce magnifique clip de Libertine, hommage pleinement assumé à un certain Barry Lyndon (1975). À croire que ces deux-là, Laugier et Farmer, étaient fait pour se rencontrer sur un projet cinématographique qui dérange. On aurait aimé que l’interview de la chanteuse soit plus longue bien sûr mais celle-ci se révèle toutefois plus intéressante que celles des deux comédiennes, Crystal Reed et Emilia Jones, qui interprètent le rôle de Beth respectivement à l’âge adulte et adolescent. Ces deux interviews sont en effet assez consensuelles avec des réponses qui n’apportent finalement pas grand-chose de plus que les interventions entendues dans le making of évoqué ci-dessus et qui, pour le coup, se situe à mille lieues des featurettes promos devenues légions en matière de bonus. Ces coulisses du tournage de Ghostland s’attardent ainsi avec diligence sur l’envers du décor, le tout ponctué de nombreuses interventions en voix off des différents intéressés, à commencer bien entendu par le réalisateur et les comédiennes. On regrettera toutefois que des pans entiers aient été éludés au sein des suppléments comme par exemple toute la phase de pré-production (quid de la phase d’écriture ou encore le financement pour lequel Laugier dit avoir toutes les peines du monde ?) ou encore la post-production, le montage se résumant à une séquence d’une minute à peine.

Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Capture Blu-ray

Pour ceux qui souhaiteraient en apprendre davantage sur l’autre entité phare de Ghostland, à savoir sa bande originale, nous ne saurions que trop leur conseiller l’édition spéciale sortie en exclusivité à la FNAC et qui propose un documentaire de 25 minutes intitulé Au cœur de la musique du film. L’occasion de découvrir que dans ce domaine également, Pascal Laugier ne recherchait pas le conventionnel mais un compositeur qui n’aurait pas des automatismes de cinéma afin de proscrire ces musiques « papiers peints » par trop souvent entendues dans les productions hollywoodiennes. Pour cela, il alla donc frapper à la porte d’un certain Georges Boukoff qui n’avait jamais travaillé sur un film. S’ensuivirent de nombreuses sessions musicales, consistant notamment à retirer des connotations trop jazzy par endroits, afin d’aboutir à des thèmes musicaux qui eux-aussi convieraient l’émotion recherchée et non une simple succession de jump scare. De leurs côtés, Anthony d’Amario, qui se dit à fond dans les musiques de films, et Ed Rig ont cherché « à faire du moche avec du beau ». Une dualité qui sied là encore à ravir avec celle du long-métrage. On précisera à toutes fins utiles que les instigateurs de ce bonus ne sont autre que Flavien Bellevue et Sandy Gillet, bien connus en ces contrées digitalciniennes et qu’à aucun moment ils ne m’ont pointé sur la tempe un canon de révolver pour en dire du bien. Jamais.

Toujours dans la section interactive, nous n’aurions pas craché non plus sur un petit nodule de la présentation du film au Festival de Gérardmer en janvier dernier d’où Ghostland est reparti auréolé de plusieurs prix dont le plus prestigieux, ni sur une petite bande-annonce. Bien que ce genre de suppléments se trouve désormais très facilement sur internet, nous sommes des cinéphiles « vintage » à la rédac, à l’instar de l’héroïne du film, qui ne possède ni smartphone ni ordinateur portable et utilise encore une bonne vieille machine à écrire comme le souligne Pascal Laugier en interview tout en précisant à nouveau que le film est finalement très peu gore mais surtout « mental », que « la violence sèche ne m’intéresse pas » et qu’il souhaite avant tout « contrebalancer la violence par une grande émotion ». Une émotion à fleur de peau pourrait-on même ajouter qui se trouve magnifiquement retranscrite sur cette édition Blu-ray en tout point remarquable sur le plan technique.

Ghostland (2018) de Pascal Laugier - Capture Blu-ray

Les pistes françaises et anglaises sont toutes les deux proposées en DTS-HD Master Audio 5.1 et restituent avec puissance, ampleur et précision toutes les subtilités de la bande son, depuis les fameux jump scare jusqu’aux musiques évoquées ci-dessus, sans parler des séquences plus « musclées » ; les différentes apparitions du Fat Man étant le meilleur moyen d’éprouver votre caisson de basses. Tout juste faudra-t-il pousser un peu le volume de l’ampli, les deux pistes ayant été encodées avec des Dialnorm plus ou moins prononcées (-7dB sur la VO et -4dB sur la VF). Encodée dans son format d’origine 2.40:1 en AVC 1080/24p, l’image est d’une précision et d’une lisibilité remarquable ; ce qui est la moindre des choses pour un film dont une grande majorité se déroule dans la pénombre. Tout juste pourra-t-on déceler un niveau de définition inférieur le tant d’un ou deux plans lors de la tentative de fuite dans les champs des deux protagonistes. Un constat directement lié à la captation face caméra. Pour sublimer encore davantage le travail photographique accompli sur Ghostland, nous n’aurions bien entendu pas craché sur une édition Blu-ray 4K Ultra HD mais TF1 Vidéo n’a pas eu accès au master ad hoc pour tenter l’aventure d’autant qu’ils croyaient énormément au potentiel de ce titre. Et d’ailleurs, à l’heure où nous écrivons ces lignes DVD et Blu-ray se vendent apparemment comme des petits pains.

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Ghostland – Édition Blu-ray

Résumé : Suite au décès de sa tante, Pauline et ses deux filles héritent d’une maison. Mais dès la première nuit, des meurtriers pénètrent dans la demeure et Pauline doit se battre pour sauver ses filles. Un drame qui va traumatiser toute la famille mais surtout affecter différemment chacune des jeunes filles dont les personnalités vont diverger davantage à la suite de cette nuit cauchemardesque.

Spécifications techniques :

  • Image : 2.40:1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langues : Anglais & Français DTS-HD Master Audio 5.1
  • Sous-titres : Français, Français pour sourds et malentendants
  • Durée : 1h 31min 11s

Bonus (HD et VOSTF / VF) :

  • L’image du fantôme (73min)
  • L’interview de Mylène Farmer (9min 49s)
  • Interviews
    • Crystal Reed (9min 04s)
    • Emilia Jones (9min 01s)
    • Pascal Laugier (9min 36s)

4 réflexions sur « Ghostland en Blu-ray Édition Spéciale Fnac »

  1. J’ai du mal à comprendre à quoi cette phrase fait référence : « Fait assez rare pour être signalé, les pistes françaises et anglaises sont toutes les deux proposées en DTS-HD Master Audio 5.1 »

    Chez les indépendants (et même chez certains studios, Sony en tête), les films récents sont quasiment tous présentés de la sorte, avec VO et VF encodées en lossless, et le cas échéant en 5.1. C’est le cas chez TF1, mais aussi chez M6, Wild Side, Potemkine, Blaq Out, Studio Canal, Metropolitan, et d’autres encore.

  2. Cette phrase vient surtout du fait que depuis l’arrivée des BR 4K, il faut aller les chercher très très loin les pistes VF HD !!!
    Alors quand je me retrouve pour la première fois depuis des mois face à une VF en DTS-HD MA, ça me semble le paradis.
    D’où ma remarque.

  3. La tournure pose tout de même alors 2 problèmes.

    Le premier, c’est qu’en tant que lecteur, on ne peut pas combler les trous par télépathie. En lisant que c’est un « fait assez rare pour être signalé », on comprend qu’en Blu-ray, c’est très rare d’avoir une VF en lossless et/ou à spatialisation équivalente à la VO y compris chez les indépendants, pas que cela se situe dans un contexte d’UHDs de studios où les VF lossless disparaissent.

    Le 2e, c’est que mon point original reste valide, et les VF des UHDs d’indépendants français (M6 pour La La Land et Seven Sisters, Metropolitan pour Saw 7, TF1 pour Le spécialiste, Studio Canal avec Paddington 2 et The Passenger, LCJ pour Le vieux fusil, EuropaCorp pour Valerian) sont présentées dans des formats lossless à spatialisation au minimum 5.1 (le cas échéant).

    Peut-être faudrait-il formuler de façon plus précise que ce n’est pas un fait « assez rare pour être signalé », mais se raréfiant dans le contexte des sorties UHDs de studios.

    (PS : je ne dis pas ça pour empêcher de tourner en rond, mais juste que j’ai la chance de connaître assez bien le marché pour comprendre que cette phrase peut générer une compréhension qui n’est pas la bonne)

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