Le Village des damnés - Image une Test BD

Le Village des damnés (1995) – Boîtier SteelBook – Blu-ray + DVD chez Elephant Films

Le Village des damnés de John Carpenter est une remarquable variation américaine du classique du cinéma fantastique anglais au titre éponyme réalisé en 1960 par Wolf Rilla. Il était adapté par Rilla, Stirling Silliphant et George Barclay du roman de science-fiction de John Wyndham, Les Coucous de Midwich (The Midwich Cuckoos, 1957,  traduction française publiée aux éditions Denoël, collection Présence du futur, Paris 1959). Le remake de 1995 coûta environ dix fois plus cher que l’original.

  • Le Village des damnés (1995) de John Carpenter - Édition Spéciale FNAC - Boîtier SteelBook - Blu-ray + DVD - Packshot Blu-ray
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Le Village des damnés - Édition Spéciale FNAC - Boîtier SteelBook - Blu-ray + DVD

Éditeur :Elephant Films
Sortie le :12 avril 2022  

Il n’est pourtant pas certain que l’adaptation modernisée 1995 de David Himmelstein, réputée plus proche du contenu du livre original, soit vraiment meilleure que celle de 1960 en dépit de ce que pensaient les producteurs de la Universal qui la proposèrent d’abord au cinéaste Wes Craven puis, comme on le sait, à John Carpenter qui accepta le défi. Mais, à défaut d’être meilleure, il faut reconnaître que cette version de Carpenter est assurément une relecture passionnante. Carpenter, cinéaste cinéphile et fin connaisseur de l’histoire du cinéma fantastique, admirait la fin du film original de Rilla (qu’il invita d’ailleurs sur le tournage de 1995 : son nom et celui des scénaristes de 1960 sont crédités au générique de 1995 puisque Carpenter y adapte autant le roman de 1957 que le film de 1960) mais il estimait que le rôle des femmes dans l’histoire telle que Rilla l’avait filmée, était un peu trop effacé. (*)

Le Village des damnés - Affiche 1995

La structure narrative de 1995 est globalement identique à celle de 1960 mais elle est agencée d’une manière assez novatrice au regard de l’original, au moins durant les  trente cinq premières minutes qui en constituent certainement sur le plan syntaxique, la meilleure partie. Carpenter y manifeste en effet une maîtrise toujours aussi sophistiquée de l’écran très large. Surtout, il laisse le temps au mystère de s’installer, à l’angoisse puis à la peur puis à la terreur de se développer. Cela presque uniquement par la rigueur d’une mise en scène pointilliste, attachée à saisir l’inquiétude et le non-dit sur les visages (notamment les visages féminins) tout en renouvelant beaucoup de choses sur le plan sociologique par rapport aux film anglais de 1960. Le nom du village est certes le même mais nous sommes aux USA en 1995 et non plus dans une province anglaise de 1960 : la vie rurale d’une petite communauté californienne est assez soigneusement dépeinte. La dimension religieuse est davantage prégnante que dans la version anglaise originale de Rilla : par exemple, la meneuse à la torche prononce des formules qui seraient rien moins que des citations (non créditées au générique) du Livre de Job.

À partir de la 37ème minute, les célèbres effets spéciaux des yeux des enfants sont repris : le cinéphile croit se retrouver en terrain connu mais il constate avec plaisir que leur aspect spectaculaire est amplifié par l’emploi de couleurs modifiées en temps réel et par une définition qui magnifie les détails. Une terreur plastique inédite est même obtenue lorsque le visage d’un des enfants se modifie, l’espace de quelques secondes, durant l’avant-dernière scène. Autre renouvellement fondamental, celui du personnage de David : seul enfant ambivalent, à la fois un peu humain et un peu inhumain. Cette innovation en entraîne une autre : la mère de David est un personnage bien plus volontaire et lucide que ne l’était celui interprété avec sensibilité par l’actrice anglaise Barbara Shelley dans la version anglaise de 1960. Tout aussi consciente de la monstruosité des enfants, la mère américaine de David est résolue à sauver son fils, ouvrant éventuellement la voie à une suite. Dans le film de 1960, celle-ci était certes aussi ouverte mais d’une manière toute différente et davantage « collectiviste » (sans rien dévoiler). La suite en question — Children of the Damned (GB – 1964) de Anton Leader — n’était malheureusement pas à la hauteur du film de 1960 : elle était très pesante et démonstrative, raison pour laquelle elle demeura pratiquement inédite au cinéma chez nous. Cette variation de Carpenter retrouve bien, en revanche, le frisson de l’original : c’est son premier mérite.

Le Village des damnés (1960) - Affiche

Bien sûr, Carpenter ne peut s’empêcher de refaire certaines grandes scènes de meurtres provenant de l’original de 1960 bien que d’autres soient néanmoins originaux ; de même, la scène finale du film de Rilla est en partie reprise mais le scénario lui ajoute une scène supplémentaire qui modifie la donne d’une manière importante. Reste une facilité ou une amplification spectaculaire (au choix selon les jugements) : ce qui était dit à un moment de la version 1960 est ici montré — allusion à la séquence violente montrant l’impuissance de l’armée et de la police.

Il faut aussi mentionner l’interprétation féminine, excellente quel que soit le rôle considéré, sans négliger pour autant celle de l’acteur principal masculin Christopher Reeves, tout à fait remarquable du début à la fin, car conférant une nouvelle dimension au personnage déjà admirablement interprété par George Sanders en 1960. Carpenter a toujours eu l’art de sélectionner les acteurs pour leurs qualités plastiques autant que dramaturgiques. Ici l’ampleur physique du médecin incarné par Reeves contraste avec sa fragilité psychologique et, fondamentalement, humaine : Carpenter joue admirablement de ce paradoxe en chair qu’est Reeves dont c’est peut-être le plus grand rôle à l’écran de toute l’histoire de sa filmographie, le rôle qui fait regretter son accident de mai 1995 qui le laissa ensuite paralysé. Reeves, comme autrefois Sanders, rend admirablement sensible le conflit entre le rationnel et l’irrationnel, la montée en puissance d’une sourde terreur concordant avec sa prise de conscience de plus en plus nette du péril inhumain auquel il s’avère confronté. Afin d’augmenter la valeur et l’authenticité de son jeu dramatique, Reeves se tint d’ailleurs volontairement éloigné des enfants durant les pauses du tournage.

Dans la filmographie fantastique sélective de Carpenter, Le Village des damnés (1995) demeure son autre grand remake-variation, avec The Thing (USA – 1982) qui était une originale et passionnante variation du La Chose d’un autre monde (The Thing From Another World, USA – 1951) de Christian Nyby produit par Howard Hawks, adapté d’une nouvelle de science -fiction de John W. Campbell Jr. Ces deux remake-variations ont un point commun thématique originel : la peur d’une apocalypse biologique. Très aboutis formellement, ces remakes de 1982 et 1995 furent des échecs au box-office en première exploitation mettant au demeurant et prématurément fin à un autre projet Universal pour Carpenter qui n’était autre que L’Étrange créature du lac noir (USA – 1954) de Jack Arnold. Les exploitations vidéos et TV leur ont depuis rendu justice.

(*) Cf. Gilles Boulenger, John Carpenter the Prince of Darkness – an exclusive interview (éditions Silman-James Press, Beverley Hills, USA 2003, pp. 235 à 240).

Le Village des damnés - Cap menu BD

Si la copie argentique est en parfait état, il s’agit sans aucun doute du même master HD déjà utilisé par Universal pour son édition DVD US en 2009. Et forcément ce qui pouvait passer en DVD pose soucis en Blu-ray d’autant que l’on a affaire ici à une numérisation d’un autre temps où le curseur réducteur de bruit était poussé au maximum. Et de fait on notera la disparition totale du grain doublée d’une volonté formelle de pousser au maximum les détails. Ce qui donne des visages non pas momifiés mais où tout le monde semble maquillé comme un camion rutilant. En résumé voici donc une image tout droit sortie des standards vidéos qui avaient encore cours au début des années 2000 où tout était « gonflé » de peur que le ricain de consommateur vienne se plaindre et rendre sa copie au magasin du coin. Enfin on notera pour la bonne bouche le joli format dit « pillarboxe » que l’on peut apprécier durant tout le générique de début (cf capture ci-dessous). Soit la présence de barres noires à droite et à gauche de l’image. Preuve une nouvelle fois de l’ancienneté d’un master à une époque où le format 16/9 vidéo n’était pas encore la norme absolue. – (paragraphe rédigé par SG)

Le Village des damnés - Capture BD

Rappelons que Le Village des damnés fut un des tout premiers films à proposer une exploitation son dans les salles de cinéma en DTS. Et d’ailleurs le Laserdisc Pal proposait déjà des pistes VO et VF en stéréo. On les retrouve ici. Aucun défaut techniquement relevé : la piste originale est parfaitement reportée. Le doublage français est dramaturgiquement inégal (la voix française de Reeves est inférieure à sa voix originale américaine) mais il maintient la puissance des effets sonores. L’équilibrage de la VO est, comme d’habitude, mieux réparti et plus sophistiqué. Quelques petites divergences (apparentes ou réelles selon les cas) entre VO, VOSTF et VF d’époque : par exemple, un panneau routier au bord de la route indique « Midwich 7 » alors que les STF indiquent « Midwich 11 ». Cela surprend mais en y réfléchissant, c’est normal puisque le premier panneau est américain (distance en miles) alors que les STF convertissent en système métrique français. L’agente immobilière salue le jeune couple de clients par ses prénoms : la VF conserve le prénom de l’homme mais se passe de mentionner celui de la femme. Musique (co-signée par Carpenter) parfois ample, notamment durant le générique d’ouverture, incrustée d’effets sonores inquiétants.

Présentation du film par Stéphane du Mesnildot : fouillée, défendant très bien le remake et couvrant ses aspects principaux : histoire du cinéma, structure du scénario, casting, direction photo. Excellentes remarques sur la manière dont Carpenter traite ici la question des communautés et de la marginalité, sur l’originalité relative de ce remake, sur sa place dans la filmographie du cinéaste. On peut discuter, concernant certains points précis, l’interprétation « mesnildienne » mais elle est toujours suggestive. Quelques rares erreurs : le film n’est ainsi pas, comme il le dit, tourné ni situé en Nouvelle Angleterre mais en Californie, au Nord de San Francisco, à Inverness et Point Reyes (où Carpenter avait tourné certains extérieurs de Fog, quinze ans plus tôt). Il suffisait d’ailleurs de consulter la fiche IMDB du film pour se le faire confirmer.

Bande-annonce originale : elle est recadrée, en état argentique inférieur au long métrage de référence. Elle est montée nerveusement mais révèle trop de plans tirés de scènes chocs, cassant l’effet de surprise. Ne pas la visionner avant le film lui-même.

Bandes annonces (de qualité technique inégale, au format parfois différent du long métrage de référence) de titres édités (avec une excellente qualité et au format respecté) par Eléphant Films : L’Esprit de Caïn (Raising Caïn – USA – 1992) de Brian de Palma, Vidéodrome (Can – 1982) de David Cronenberg, Massacre dans le train fantôme (The Funhouse – USA – 1981) de Tobe Hooper, Enfer mécanique (The Car – USA – 1977) de Elliot Silverstein, La Sentinelle des maudits (The Sentinel – USA – 1976) de Michael Winner.

Le Village des damnés - Cover Livret

Livret 24 pages N&B et couleurs, rédigé par Alain Petit : il brosse la bio-bibliographie de l’écrivain John Wyndham, revient sur l’original anglais de 1960 signé Wolf Rilla, évoque le thème des enfants tueurs dans l’histoire du cinéma fantastique (Petit ne mentionne pas les films consacrés aux bébés tueurs : lacune car ils existent et c’était l’occasion de les citer), examine la genèse et la production du remake 1995 de Carpenter, signalant un point commun entre ces deux remakes carpentériens The Thing (1982) et Le Village des damnés (1995) : ils furent, pour diverses raisons contingentes que Petit mentionne précisément, des échecs commerciaux en première exploitation : pour The Thing, la sortie deux semaines plus tôt de E.T de Steven Spielberg qui de par son succès phénoménal réduisit au silence la concurrence pendant un bon bout de temps. Pour Le Village des damnés, l’attentat de sinistre mémoire de Oklahoma City du 19 avril 1995 (le film sortit aux États-Unis le 28 avril) qui fit beaucoup de victimes parmi les enfants, semble avoir brisé l’élan du film. Sur le plan des illustrations, une affiche américaine 1995 et deux affiches françaises et belges de l’original de 1960 ; les photos de plateau (ou d’exploitation, mais alors détourées) du remake de 1995 sont malheureusement barrées par une ligne de texte inscrite sur fond blanc. Les sources bibliographiques ne sont pas citées, comme c’est l’usage, en fin de livret.

La présentation et le livret fournissent certes de bonnes bases informatives mais le cinéphile pourra (si et seulement si il est anglophone) aller bien plus loin en visionnant les amples et remarquables bonus de l’édition américaine Shout Factory, sortie en Blu-ray région A en 2016.

Le Village des damnés - Cover BD 3D

Au cinéma le : 16 août 1995

Résumé : USA, Californie, village côtier de Midwich, 1995 :  d’étranges enfants, au physique et à l’intellect similaires, sont simultanément engendrés puis accouchés. Le gouvernement, sur recommandation d’une conseillère scientifique fascinée par leurs facultés étonnantes, offre une prime aux familles victimes de cette «xénogenèse» afin que le phénomène puisse être étudié, avec l’aide du médecin local, sur le long terme et en temps réel. Le doute n’est pourtant bientôt plus permis, à mesure que les suicides et les meurtres s’accumulent : ces monstres appartiennent à une dangereuse race extra-terrestre visant la domination de la Terre.

Spécifications techniques Blu-ray :

  • Image : 2.35:1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langue(s) : Anglais en DTS-HD MA 5.1 / Français et Anglais en DTS-HD MA 2.0 stéréo
  • Sous-titre(s) : Français
  • Durée : 1h37min 59s
  • 1 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Bonus (en HD) :

  • Présentation du film par Stéphane du Mesnildot (25min 09s – 2021)
  • Bande annonce (1min 53s – VOST)
  • Dans la même collection (bandes-annonces en VOST) : Videodrome – 2min15s / Massacre dans le train fantôme – 1min 41s / Enfer mécanique – 2min 26s / L’Esprit de Caïn – 2min 09s / La Sentinelle des maudits – 2min 49s.

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