Le Choix des armes - Image une test BD

Le Choix des armes (1981) en Blu-ray chez StudioCanal

Comme de coutume dans le polar à la française qui avait encore pignon sur rue en ce début des années 80, Le Choix des armes est une adaptation d’un bouquin au titre éponyme du romancier mais aussi critique de cinéma Michel Grisolia mort prématurément en 2005 à l’âge de 56 ans. Alain Corneau avait en effet repéré son bouquin avant même sa parution en 1981 et avait proposé à son auteur d’en écrire avec lui une adaptation. Michel Grisolia n’était pas un novice puisqu’en 1977, L’Inspecteur de la mer, son premier roman, était devenu au cinéma Flic ou voyou (1979) avec un certain Belmondo en vedette et Georges Lautner derrière la caméra. Pour Corneau, il s’agissait après le diamant (noir) Série noire réalisé en 1979 de poursuivre, sinon conclure ce qui restera comme une trilogie initiée en 1976 avec Police Python 357. Une trilogie placée sous le signe d’une nouvelle forme de violence importée des États-Unis dont la tête de gondole n’était autre que le personnage de l’inspecteur Harry (violence sociétale, critique sociale et réalisation à l’avenant) alors qu’avec Le Choix des armes on sent un Corneau plus proche de la tradition française. Celle qui avait cours au temps de Razzia sur la chnouf (1955) de Henri Decoin, Le Rouge est mis (1957) de Gilles Grangier ou encore du Deuxième souffle (1966) de Jean-Pierre Melville dont il fera d’ailleurs un mauvais remake en 2007. Une tradition où l’humain était au centre de tout, où les destins étaient écrits mais pas inéluctables et où les mondes interlopes pouvaient donner lieu à des actes de vilenies et/ou de bravoures incompréhensibles aux caves que nous sommes. Le Blu-ray qu’édite StudioCanal au sein de sa nouvelle collection « Nos années 80 » dirigée par Jérôme Wybon nous apporte du coup quelques mises à niveau bienvenues.

Le Choix des armes

Éditeur :StudioCanal
Sortie :18 septembre 2024  

Au cinéma le : 19 août 1981

Résumé : Un ancien truand et sa compagne voient leur vie bien rangée bouleversée par l’évasion d’un ancien complice, ce qui les oblige à renouer avec de vieilles connaissances.

Le Choix des armes - Affiche

Précisons d’entrée que si l’inspiration est ici plus franco-française, la violence dépeinte est dans la continuité des deux autres films. Elle peut être sans sommation ou attendue, perverse et lancinante et bien entendu toujours extrêmement graphique. Mais pas que. Dans Le Choix des armes elle est aussi cartographique avec cette ville de la Courneuve et sa Cité des 4000 montrée tel un furoncle où s’entassait déjà des familles d’immigrés que la Mairie de Paris, alors gestionnaire de ces barres d’immeuble, ne voulait plus voir dans la capitale. Comme dans Série noire qui se déroulait déjà en banlieue, Alain Corneau montre un environnement où l’humain est en fait déshumanisé et littéralement mis au ban de la société. Cette violence se traduit en image par des plans où la profondeur de champ tournée en Scope (une rareté dans le cinéma français de cette époque) vient accentuer le spectacle des rues vides seulement animées par des détritus qui virevoltent. On n’est pas loin des codes du western où dans une ville fantôme va se jouer le duel final.

Mais ceci n’est qu’une partie du film. Il y a aussi ce haras situé lui aussi non loin de Paris où vivent Noël Durieux (Yves Montand) et sa femme (Catherine Deneuve). Lui est un ancien truand qui s’est embourgeoisé mais que le passé rattrape quand un vieux complice, en cavale et mortellement blessé, fait irruption chez lui avec une jeune frappe totalement incontrôlable (Gérard Depardieu). C’est la confrontation de ces deux mondes qui intéresse Corneau. D’un côté le vieux bandit reconverti en éleveur de chevaux et rangé des voitures mais qui obéit aux codes d’honneur de la corporation et de l’autre, cette nouvelle génération issue de la banlieue qui ne se soumet à aucune règle. Mais là où la démarche de Corneau est passionnante c’est qu’il va au-delà des différences, au-delà des générations et de l’environnement. Il va trouver un lien, une source d’espoir qui va permettre à son Choix des armes de ne pas totalement verser vers une noirceur abyssale rejoignant là-aussi l’arc narratif de Série noire.

L’autre grande réussite du film tient bien entendu en ses acteurs. Si on peut regretter l’aspect un tantinet effacé du personnage de Deneuve dans la première partie, Corneau se rattrape dans la seconde. Quant à la confrontation Montand / Depardieu elle est magistrale. Personne ne tire la couverture à soi. Depardieu semble faire appel à ses années où jeune loubard il participait à des combats de boxe clandestins et Montand endosse le costume du vétéran à qui on ne l’a fait pas mais sans jamais se départir d’une humanité qui va finir par lui entrouvrir un autre futur. C’est ce personnage qui bénéficie d’une caractérisation la plus aboutie quand tous les autres restent finalement cantonnés aux archétypes du genre. C’est peut-être le seul regret que l’on pourrait formuler envers Le Choix des armes. Un regret qui s’atténue tout de même au regard du personnage de flic joué par Gérard Lanvin. Lui aussi est de cette nouvelle génération qui veut s’affranchir des vieux codes imposés par sa hiérarchie symbolisés par son boss, bientôt à la retraite, joué comme toujours par un Michel Galabru savoureux.

Le Choix des armes est de ces polars que l’on ne fait plus, quand le cinéma français savait encore parler de son époque sans tomber dans la mise en accusation frontale, militante et au final peu convaincante. Alain Corneau expose, donne certes son sentiment mais sans jamais l’imposer. Il est un auteur à l’écoute du public et de son temps. Le Choix des armes a d’ailleurs réuni 1 787 299 spectateurs et reste encore aujourd’hui le témoin d’un début de décennie dont les rouages n’ont finalement pas beaucoup changé en 2024, preuve s’il en est de son inaltérable réussite.

Cela faisait longtemps que l’on attendait Le Choix des armes en Blu-ray d’autant que l’Italie et l’Allemagne ont le leur depuis 2011 et 2020. Nous avions acquis en son temps l’édition italienne et nous l’avons donc ressortie pour l’occasion afin de voir si, en 13 ans, des améliorations techniques ont été apportées. On vous a fait des captures comparatives ci-dessous pour que vous puissiez constater avec nous que si l’encodage proposé par StudioCanal est plus en rapport avec les standards actuels (un DNR peu visible pour une définition accrue), le master est par contre le même. Non que celui-ci soit aux fraises, bien au contraire, mais disons que l’image proposée manque de continuité. On peut ainsi avoir un gros plan sur un visage plutôt convaincant et le suivant plus large manquant de définition et proposant un étalonnage légèrement différent. C’était encore plus visible sur le Blu-ray italien, preuve que des corrections même intrinsèquement limitées ont été apportées. Ceci dit, le rendu global est plus que satisfaisant et permet de (re)découvrir Le Choix des armes de la meilleure des façons possibles aujourd’hui.

La partie son n’est pas en reste puisqu’on a pu constater que l’encodage DTS-HD MA 2.0 proposait bien le mixage stéréo d’origine. Jérôme Wybon, lors de sa présentation, précisant bien que Le Choix des armes a été un des premiers films français à avoir été mixé en Dolby Stéréo. Dans son salon cela donne une sortie DPL plutôt plaisante surtout lors des nombreuses séquences où s’immisce la géniale musique de Philippe Sarde. Au-delà d’identifier les deux protagonistes principaux par un thème spécifique, elle donne sans cesse le « la » et accompagne l’action sans jamais la phagocyter. Sans conteste l’une des plus belles BO françaises de la décennie dont on peut écouter des extraits ici. On précisera pour la forme que le Blu-ray italien proposait du 5.1 en italien en plus d’un 2.0 français et italien. C’était un temps où on aimait trafiquer les bandes son pour artificiellement les upgrader. Aucun intérêt.

Ce qui n’est pas le cas de l’archive making of intitulé Un tournage. Il s’agit d’images réalisées par une équipe d’Antenne 2 sur le tournage du film. Images agrémentées d’entretiens avec les acteurs et le réalisateur in situ. Antenne 2 était un des partenaires financiers du film et ils avaient donc accès aux plateaux (studios et extérieurs) en vue d’une diffusion unique sur la chaine lors de la semaine de sortie du film au cinéma. Des images donc jamais revues depuis (et certainement peu connues puisque souvent diffusées en milieu de journée et en pleine semaine comme ici un mardi) et exhumées dans leur intégralité par un Jérôme Wybon dont on connaît l’appétence pour ce genre de recherches au sein des archives télévisuelles françaises. Il manquera certainement un entretien avec le cinéaste ou une analyse récente effectuée par un exégète comme c’est dorénavant l’habitude sur des films de catalogue chez les autres éditeurs mais gardons à l’esprit que cette collection « Nos années 80 » dont est issue ce Blu-ray a pour vocation de remettre en avant des films inédits sur le support via la meilleure des copies possibles accompagnée de compléments d’époque. Un package qui permet de belles (re)découvertes au prix de 17 euros max. Pour preuve notre tableau de comparatifs de prix en début de ce papier.

Spécifications techniques Blu-ray :

  • Image : 2.35.1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langue(s) : Français DTS-HD MA 2.0 stéréo
  • Sous-titre(s) : Français
  • Durée : 2h15min 39s
  • 1 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Bonus (en HD) :

  • Préface de Jérôme Wybon (2024 – 3min 30s – HD)
  • Un tournage : making of réalisé par Philippe Jamain diffusé sur A2 le 08/09/81 et invisible depuis (INA – 20min 25s – SD)
  • Bande-annonce (2min 33s – SD)

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