Tokyo Vice - Image une chronique

Tokyo Vice (2022 – 2024) en Blu-ray chez Fifth Season

Oui on sait, partager avec vous nos impressions sur une série c’est très rare sur Digital Ciné. C’est que l’exercice nous semble quelque peu casse-gueule tant que ladite série n’a pas tiré sa révérence. Ou alors il faut que chaque saison ait son identité en propre (on pense ainsi à Fargo / True Detective / The White Lotus etc…). Mais là c’est le manque de temps qui nous oblige à passer notre chemin (ou la flemme aussi, faut être honnête). Et puis comme on peut trouver des avis à peu près sur tout sur le web à commencer par des analyses de saisons, d’épisodes, de séquences, sans parler de selfies vidéo filmant les réactions de certains à la découverte d’épisodes depuis son canapé, on se dit que notre apport en ce domaine n’apporterait pas grand-chose de plus. Par contre quand l’une d’entre-elles débarque en Blu-ray (chose de plus en plus rare), forcément on s’y intéresse. D’autant que Tokyo Vice s’est à nos yeux instantanément hissé dans notre top 30 des meilleures séries de tous les temps*.

Tokyo Vice - Saison 1

Éditeur :Fifth Season
Sortie :01 décembre 2023  

Tokyo Vice - Saison 2

Éditeur :Fifth Season
Sortie :08 janvier 2025  

1ère diff en France : 15 septembre 2022 sur Canal+ / Dispo en Replay sur MyCanal

Résumé : À Tokyo, le reporter américain Jake Adelstein, âgé de 24 ans, intègre le service police et justice du « Yomiuri Shimbun », le plus grand quotidien japonais. Alors qu’il collabore avec la police locale, il est contacté par la mafia. Il devient un interlocuteur des yakusas tout en continuant d’être un informateur de la police. Mais cette position ambivalente n’est pas sans danger.

Tokyo Vice c’est d’abord une plongée dans le monde des yakuzas à cheval entre la fin du XXème et début XXIème siècle. Et histoire de bien nous attraper par le col, celle-ci est menée par un « gaijin » (littéralement, un étranger). Soit en l’occurrence un jeune expatrié yankee bien décidé à se fondre dans la société tokyoïte non pour devenir lui-même yakuza mais plutôt journaliste au sein du quotidien le plus important du pays. L’épisode pilote réalisé par un certain Michael Mann nous le présente en train de potasser furieusement pour préparer le concours d’entrée… du journal. Oui parce que pour prétendre y écrire, il faut d’abord passer un examen que l’on présume ardu et en fonction des résultats obtenus on peut ensuite avoir la chance de décrocher un entretien avec les grands patrons. Et tout ça en japonais bien entendu. Le petit jeune est en effet plus que bilingue, condition sine qua non pour s’intégrer dans un pays qui jalouse farouchement ses traditions et sa langue dans le but revendiqué de se protéger de l’extérieur. Le petit jeune en question est joué par Ansel Elgort. Les plus perspicaces l’auront repéré dès 2014 dans la trilogie Divergente. Mais il a véritablement crevé l’écran dans Baby Driver d’Edgar Wright (2017) où il interprétait le « driver » du titre et a confirmé son statut de star montante avec le remake réalisé en 2021 par Steven Spielberg de West Side Story en incarnant Tony, l’amoureux transi de Rachel Zegler.

Toutes les illustrations de cet article sont issues de captures Blu-ray toutes cliquables pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Tokyo Vice - S1 - Ep1 - Capture série Blu-rayAnsel Elgort

Tokyo Vice - S1 - Ep1 - Capture série Blu-rayL’examen d’entrée pour espérer intégrer le plus grand quotidien japonais

Il est ici impressionnant de crédibilité dans ce personnage que l’on voudrait adorer mais que la série ne dépeint pas forcément sous son meilleur jour. Un parti pris d’autant plus remarquable que Tokyo Vice adapte en fait un bouquin écrit par le journaliste en question qui y raconte la réalité de son expérience dans la capitale japonaise. Jake Adelstein, c’est son nom, est devenu depuis l’un des spécialistes non japonais de la culture et de la société nippone. Ces deux saisons racontant donc ses premiers pas là-bas avec pour fil rouge son obsession pour les yakuzas dont il va tout faire pour en comprendre les rouages organisationnels. Pour cela il n’hésite pas à se rapprocher de l’un d’entre eux, à tenter de trouver des relais pouvant lui servir de sources d’information au sein de la police, de fréquenter les bars à hôtesses contrôlés par les yakuzas… De ce véritable réseau qu’il arrive à créer de toutes pièces, débouche les premiers résultats d’une enquête de longue haleine avec des hauts et énormément de bas.

La deuxième et malheureusement dernière saison voit d’ailleurs le personnage de Jake ne plus être le vecteur principal de l’histoire. Il est même relégué au second plan alors que par ailleurs les choses s’accélèrent et semblent de plus en plus hors de contrôle finissant même par lui faire prendre des décisions à l’encontre des règles éthiques propres à sa corporation. Rien que pour cette prise de risque dans la façon de faire évoluer l’arc narratif du personnage principal, Tokyo Vice est passionnant et aurait déjà constitué un morceau de choix dans l’univers de la série TV. Mais en fait ce n’est que le début tant Tokyo Vice a aussi pour elle de nous plonger en quasi immersion chez les yakusas. Organisations criminelles que tout le monde connait mais qui à notre connaissance n’a jamais été dépeintes avec autant de précision et de détails. On a même l’impression sur certaines séquences d’être face à un doc avec le tour de force de ne jamais nous perdre, nous pauvres occidentaux pas très au fait de tout cela. C’est que si rien n’est en effet laissé dans l’ombre, la façon de faire privilégie un storytelling tout simplement remarquable. Ainsi chaque information délivrée est contrebalancée par une avancée de l’histoire et donc de la dramaturgie qui ne laisse jamais en paix le spectateur et qui de fait ne se retrouve jamais sur la touche. L’attention et l’envie de connaître la suite sont perpétuelles sans que pour autant on tombe dans le cliffhanger intempestif. Certes, chaque fin d’épisode apporte son lot d’excitation mais tout est magnifiquement dosé pour que jamais cela tombe d’ans l’artificialité ou la facilité.

Tokyo Vice - S1 - Ep5 - Capture série Blu-rayKen Watanabe

Il faut dire aussi que la galerie de personnages est remarquablement prise en charge par des acteurs dont les prestations ne pourront que marquer leur carrière respective. Des acteurs et actrices dont pour beaucoup nous avons découvert le talent. Alors bien entendu on ne présente plus Ken Watanabe que l’on a pu croiser sur certaines grosses prods hollywoodiennes ayant besoin d’un japonais au casting, le dernier en date et même si ce n’est pas un blockbuster à proprement parler est The Creator où il jouait l’un des chefs de la résistance envers une humanité cherchant à détruire une IA. Ici c’est un inspecteur de police qui se lie d’amitié avec Jack. Un arc narratif au demeurant un peu abandonné sur la seconde saison au profit de l’intrigue à proprement parler. Sa prestation est d’une grâce infinie. Son regard, son phrasé tant en anglais qu’en japonais, l’intensité de sa voix placent instantanément son personnage dans la galerie des « inoubliables ». Chez les yakusas, celui joué par Shô Kasamatsu, un jeune acteur que nous découvrons, qui lui aussi va voir sa destiné liée à celle de Jack, est lui aussi remarquable. Rien que dans son regard se lit à tout moment l’indéfectible loyauté qu’il voue à son clan et surtout à son « Oyabun » (chef de famille) qu’il considère comme le père qu’il n’a jamais eu, mais aussi la lucidité sur ce monde interlope qu’il observe avec par moment un dégoût à peine dissimulé.

Tokyo Vice - S1 - Ep4 - Capture série Blu-rayCollèges de bureau avec de gauche à droite : Takaki Uda / Kosuke Tanaka / Ansel Elgort / Rinko Kikuchi

Au sein du journal trois figures récurrentes entourent Jake. La plus importante est sans conteste sa boss directe jouée par Rinko Kikuchi dont nous découvrons ici aussi le talent mais qui a déjà une belle carrière dans le cinéma et pas qu’au Japon (apparemment elle est apparue dans les deux Pacific Rim – Celui de Del Toro en 2013 et celui de Steven S. DeKnight en 2018 – mais on vous avoue n’en garder aucun souvenir). La série lui consacre de belles plages de caractérisation d’où surnage une éthique à toute épreuve qui va finir par se heurter à la « realpolitik » d’un grand journal qui peut faire et défaire des destins politiques. Les deux autres sont en fait des camarades de promotion qui entrent au journal en même temps que lui. Là encore les deux acteurs nous sont inconnus (Kosuke Tanaka dans le rôle de Tin Tin et Takaki Uda dans celui de Trendy) et là encore ils apportent une certaine épaisseur à l’intrigue principale avec pour le personnage de Trendy un développement au sein de la seconde saison qui sera primordial avec à la clé la mise en lumière d’un trait de caractère de Jake peu flatteur.

Tokyo Vice - S1 - Ep2 - Capture série Blu-rayRachel Keller

Autre personnage important est celui interprété par l’actrice américaine Rachel Keller dont là encore nous méconnaissions jusqu’à son existence. On était censé pourtant l’avoir entraperçu dans l’excellent Le Pire voisin au monde (Marc Forster – 2022) avec Tom Hanks et l’oubliable Butcher’s Crossing (Gabe Polsky – 2023) avec Nicolas Cage. Mais rien n’y fait, c’est l’amnésie totale alors qu’ici elle casse la rétine et vrille le cerveau pour ne plus jamais sortir de votre mémoire vive. Elle est cette expatriée qui tente de faire elle aussi son trou dans la capitale japonaise. Elle est une hôtesse dans un bar huppé « protégée » par un clan yakuza et a pour ambition d’ouvrir sa propre boîte. Sa prestation de haute volée entre sensualité et dureté infuse la série même quand elle n’est pas à l’écran.

Tokyo Vice - S2 - Ep18 - Capture série Blu-rayAyumi Tanida

Et enfin que dire du « Big Bad Wolfe » qui va tenir en haleine tout ce petit monde sur les 18 épisodes que proposent ces deux saisons. On parle ici de Tozawa, ce yakuza qui veut rafler la mise en unissant tous les clans de gré ou de force mais dont l’ambition est en fait ailleurs. Et cet ailleurs c’est la finance et in fine la politique pour avoir à sa botte les trois mamelles constitutives du pouvoir au Japon. C’est l’acteur uniquement connu au Japon Ayumi Tanida qui se glisse avec une conviction folle dans la peau d’un des « méchants » les plus anxiogènes et flippants du petit et grand écran. Comme on ne le connaissait absolument pas, on peut dire que sa prestation nous aura marqué pour longtemps. À tel point d’ailleurs que l’on n’est pas certain vouloir tomber sur lui dans une autre série ou un film. Il EST Tozawa et le restera à jamais. Sa performance est du même acabit que… au hasard… Brando dans Le Parrain. Comme dans le film de Coppola, ses apparitions ne sont pas nombreuses mais à chaque fois il emporte tout sur son passage. Il électrifie le cadre, ses partenaires et le pauvre type de l’autre côté de l’écran que nous sommes et qui s’accroche aux accoudoirs de son fauteuil pour ne pas totalement sombrer.

Tokyo By Day and By Night

Il y en d’autres des personnages essentiels dans la série mais au final celui qui compte le plus est bien entendu la ville de Tokyo. On adore le maître mot ou plutôt le fil rouge stylistique que chacun des réalisateurs s’est employé à préserver depuis le pilote de Mann, sinon à le développer et à chaque fois avec beaucoup de réussite. De jour comme de nuit, voici une ville qui nous est montrée telle une catin qui ne demande qu’à se faire prendre. Mais attention aux retours de bâton car oui elle se donne mais oui elle reprend au centuple. La caméra glisse de fait sur elle, d’abord en plans aériens, ensuite à hauteur d’homme et enfin en s’introduisant dans les clubs, les QG, les bureaux de police ou encore dans l’intimité de foyers sans aucune retenu et parfois sans consentement. C’est quasi hypnotique et au bord de la jouissance graphique participant de facto à la tension qui va perpétuellement crescendo imprimée épisode après épisode. Une exception cependant. L’épisode 7 de la saison 2 où Jack retourne au pays pour l’anniversaire de son père. Un arc narratif laissé malheureusement en plan sur lequel les scénaristes et le showrunner J.T. Rogers (dramaturge et scénariste américain qui s’est surtout fait connaître pour ses créations théâtrales) seraient certainement revenus si la série avait été prolongée. On précise d’ailleurs que Tokyo Vice n’a pas été annulée. Elle était prévue dès le début pour deux saisons. Certes, l’engouement critique aurait pu forcer la main à HBO Max de partir sur une troisième saison mais il faut croire que l’audience qui n’a pas totalement suivi a définitivement fermé la porte de cette possibilité.

De toute façon, J.T. Rogers est déjà retourné au théâtre avec une pièce qui adapte le roman Dial M for Murdoch sur l’un des plus graves scandales de l’histoire du Royaume-Uni. Le fameux « Murdochgate » ou le « Rupertgate » qui pour rappel a débuté en 2011 lorsqu’une enquête du journal The Guardian révélait que le tabloïd News of the World, média du milliardaire Rupert Murdoch, piratait les téléphones portables de la population. On n’ose imaginer un tel sujet traité en une nouvelle série TV. On ne demanderait que cela en tout cas.

Mais d’ici là, on pourra se (re)plonger dans Tokyo Vice en Blu-ray. Un coffret par saison où l’image proposée rend plus que justice au formalisme proche de l’épure de la série. On aime aussi beaucoup les encodages en DTS-HD MA 5.1 tant en VO qu’en VF. Mais on privilégiera la VO où s’entremêle avec bonheur l’anglais, le japonais en une symphonie de dialogues qui au-delà de sonner plus que justes transpirent l’efficacité et un phrasé qui confine parfois au haïku.

Mais on s’arrêtera là pour les éloges vu que ces deux coffrets aux trois disques chacun ne proposent pas le moindre bonus. Plus que préjudiciable alors que très clairement Tokyo Vice méritait un minimum de contextualisation et de rencontres avec ses créateurs / acteurs et techniciens. On n’est pas certain que « balancer » ainsi des séries en Blu-ray va inciter grand monde à sauter le pas de l’achat. Alors certes la signature technique est à nulle autre pareil mais entre dépenser 30 euros par saison et payer un abonnement pour le visionner sur MyCanal qui propose par ailleurs de courtes interviews des acteurs et du véritable Jake Adelstein que les yakusas ont plusieurs fois tenté d’éliminer, le calcul est vite vu.

Spécifications techniques Blu-ray Saison 1 :

  • Image : 2.00.1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langue(s) : Anglais et Français en DTS-HD MA 5.1 et PCM 2.0 stéréo
  • Sous-titre(s) : Anglais et Français
  • Durée : 467 min – 8 épisodes
  • 3 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Spécifications techniques Blu-ray Saison 2 :

  • Image : 2.00.1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langue(s) : Anglais et Français en DTS-HD MA 5.1 et PCM 2.0 stéréo
  • Sous-titre(s) : Anglais et Français
  • Durée : 566 min – 10 épisodes
  • 3 BD-50

*Allez, pour la blague on vous donne notre top 30 des meilleures séries de tous les temps. C’est ultra subjectif, absolument pas exhaustif (car forcément on n’a pas la prétention d’avoir tout vu) et bien entendu non négociable.

1 – Le Prisonnier (1967 – 1968)
2 – Sur écoute (2002 – 2008)
3 – The Twilight Zone – La Quatrième dimension (1959 – 1964)
4 – Battlestar Galactica (2005 – 2009)
5 – Les Soprano (1999 – 2007)
6 – OZ (1997 – 2003)
7 – Twin Peaks (1ère saison – 1990)
8 – The West Wing : À la Maison blanche (1999 – 2006)
9 – Magnum PI (1980 – 1988)
10 – Breaking Bad (2008 – 2013)
11 – La Caravane de l’étrange (2003 – 2005)
12 – Deadwood (2004 – 2006)
13 – Un village français (2009 – 2017)
14 – Mad Men (2007 – 2015)
15 – Friday Night Lights (2006 – 2011)
16 – Spartacus (2010 – 2013)
17 – À l’aube de l’Amérique (American Primeval – 2025)
18 – Tokyo Vice (2022 – 2024)
19 – Six Feet Under (2001 – 2005)
20 – 1883 (2002)
21 – Band of Brothers : Frères d’armes (2001)
22 – Banshee (2013 – 2016)
23 – Sons of Anarchy (2008 – 2014)
24 – Rome (2005 – 2007)
25 – L’Enfer du devoir (1987 – 1990)
26 – Le Jeu de la dame (2020)
27 – Band of Brothers : L’Enfer du Pacifique (2010)
28 – 13 Reasons Why (1ère saison – 2017)
29 – Matrioshki : Le Trafic de la honte (1ère saison – 2005)
30 – Chernobyl (2019)

Non cherchez pas, il n’y a ni GOT ni TWD. Mais à cette liste on rajoutera ces quelques titres qui nous ont emballés mais qui sont en cours de diffusion. Une fois terminée, on verra s’il faut pousser les murs vers un Top 40 :

1 – For All Mankind (2019 – Une 5ème saison à venir)
2 – Shogun (2024 – Une 2ème et 3ème saison à venir)
3 – Silo (2023 – Une 3ème et 4ème saison à venir)
4 – Landman de Taylor Sheridan (2024 – Une 2ème saison à venir)
5 – The Boys (2019 – Une 5ème saison à venir)
6 – Ted Lasso (2020 – Une 5ème saison à venir)
7 – The White Lotus (2021 – Une 3ème saison en cours de diffusion)
8 – The Terror (2018 – Une 3ème saison à venir mais pour l’instant seule la 1ère a nos faveurs)
9 – True Detective (2014 – Une 4ème saison à venir mais pour l’instant seule la 1ère a nos faveurs)
10 – The Handmaid’s Tale – La Servante écarlate (2017 – Une 6ème saison à venir mais pour l’instant seule la 1ère a nos faveurs)
11 – The Last of Us (2023 – Une deuxième saison à venir)

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