Les Gaspards - Image une Test BD

Les Gaspards (1974) en Blu-ray chez StudioCanal

Si on se penche cinq minutes sur la fiche Wikipedia de Pierre Tchernia, on se rend compte que l’on croyait connaître le Monsieur mais en fait pas du tout. Déjà, le simple fait d’écrire « se pencher cinq minutes », c’est plus que présomptueux tant son « CV » est long comme le bras. On parle en effet d’abord d’un des pionniers de la télévision française qui a quasiment tout fait : animateur, journaliste, concepteur d’émissions ou encore maître de cérémonie des César pendant une vingtaine d’années pour finir par être surnommé « Monsieur Cinéma » tant il est vrai que ses connaissances en la matière étaient encyclopédiques. Au-delà du tube cathodique (oui on disait comme ça avant l’arrivée des écrans plats), Pierre Tchernia a été un scénariste adoubé, un acteur émérite et une voix off reconnaissable entre toutes dans les adaptations live ou en animation des Astérix & Obélix, au hasard, jusqu’à sa mort en 2016. Les Gaspards est une énième corde à son arc puisqu’il y officie en tant que co-scénariste certes mais aussi et surtout en y assumant la réalisation. C’était d’ailleurs son deuxième long pour le cinéma (sur quatre) qui synthétise à lui seul son univers empreint de poésie, d’humour décalé et de fantaisie burlesque. Un constat prolongé par les excellents bonus de ce Blu-ray édité chez StudioCanal qui clôture par ailleurs définitivement cette collection dite « Nos années 70 ». Et c’est bien dommage.

Les Gaspards

Éditeur :StudioCanal
Sortie :05 mars 2025  
Catégorie :Nos années 70

Au cinéma le : 6 février 1974

Résumé : Paris, au mois d’août… Des chantiers surgissent un peu partout, dirigés d’une main de fer par le Ministre des Travaux Publics. Comme tous les parisiens, Jean-Paul Rondin, un paisible libraire du quartier latin, est agacé par ces travaux mais il ne sait pas qu’ils vont être à l’origine d’une étrange aventure dans laquelle il va se trouver plongé.

Les Gaspards - Affiche

« Gaspards » est un mot d’argot pour dire les rats. Dans le film de Pierre Tchernia, il sert à qualifier cette population qui a élu domicile dans les sous-sols de Paris avec à sa tête un certain Gaspard de Montfermeil joué par Philippe Noiret. Pierre Tchernia et son coscénariste et ami René Goscinny (oui l’un des deux papas d’Astérix et Obélix) ont ainsi imaginé une communauté un peu azimutée qui se serait depuis quelque temps réfugiée sous Paris en profitant des nombreuses galeries, catacombes et autres anciennes carrières de gypse. Mais nous sommes à l’été 1972 et Paris croule sous les travaux menaçant ainsi jusqu’aux sous-sols de la capitale. C’est en effet une période qui a vu l’aménagement futur du quartier de La Défense, la refondation du quartier des Halles, la construction de La Tour Montparnasse sans oublier la Place d’Italie où se construisait le futur centre commercial Italie 2.

Les gaspards voyant ainsi leur environnement menacé décident de passer à l’offensive en kidnappant des touristes mais aussi des parisiens… à vélo (voir le film pour comprendre pourquoi). Le but étant de faire pression sur le ministre des Travaux publics que Charles Denner interprète avec un enthousiasme communicatif, afin qu’il cesse de « creuser des trous » dans Paris. Entre les deux, il y a le libraire Jean-Paul Rondin (Michel Serrault, un fidèle de Pierre Tchernia puisqu’il fera l’acteur dans ses quatre films) dont la boutique située près du Panthéon subit elle aussi les affres de travaux urbains incessants. Quand sa fille ne rentre pas un soir du cinéma (Chantal Goya, oui mesdames et messieurs), il est persuadé que cet événement est lié à la disparition des touristes. Lui, le spécialiste du sous-sol parisien, décide alors de partir à sa recherche en s’affranchissant d’abord de l’aide de la police qui de toute façon n’y voit là qu’une simple fugue. Ce qui permet d’ailleurs à Michel Galabru de reprendre l’uniforme en devenant ici un commissaire de police plus que bas du front et respectueux à la lettre de la hiérarchie. La routine pour lui en quelque sorte. Pour l’anecdote Pierre Tchernia nous raconte au sein du commentaire audio qui figure sur ce Blu-ray (repris du premier DVD StudioCanal édité en 2008) que durant le tournage, Galabru lui avait fait part de la proposition de Bertrand Tavernier de jouer dans son prochain film l’un des premiers criminels en série reconnu comme tel dans la France des années 1890. Galabru ne comprenait pas pourquoi il avait pensé à lui. Tchernia lui donnera le conseil d’accepter tant il le savait capable d’endosser ainsi des rôles à contre-emploi. Un conseil avisé puisque Le Juge et l’assassin (1975) lui permettra d’empocher l’unique César de sa carrière pour sa prestation il est vrai incroyable.

Si Les Gaspards n’est pas du même acabit, il n’en reste pas moins une comédie que l’on revoit (ou découvre pour les chanceuses et chanceux) avec un plaisir non feint. Ne serait-ce que pour tous ces plans de Paris qui nous emmènent du Panthéon à la place Denfert-Rochereau en passant par Port-Royal et les abords du cimetière Montparnasse que Tchernia nous dit, toujours au sein du commentaire audio, avoir filmé en contrebandier. Et puis il y a cette pléiade d’acteurs, de seconds-rôles et de têtes connus qui ne peuvent faire que notre bonheur. En vrac citons Roger Carel (la voix originelle d’Astérix rappelons-le) en ténor qui se fait kidnapper en pleine représentation, Gérard Hernandez l’inspecteur de police totalement aux fraises qui répond au patronyme d’Hervé Balzac, Annie Cordy qui joue la femme de Galabru attendant son homme avec armes et bagages et enfants dans la voiture en bas du commissariat durant tout le film car sur le point de prendre la route des vacances. Il y a donc aussi Chantal Goya qui joue la fille de Michel Serrault, à quelques mois d’entamer sa carrière de chanteuse pour bambins qui fera sa gloire. Sans oublier Gérard Depardieu en facteur juste avant de tourner dans Les Valseuses et Jean Carmet en caviste dont la seule scène en train de goûter un petit Gamay est d’anthologie.

Oui parce que Les Gaspards c’est d’abord ça. La réunion de copains autour d’une pochade dans le seul but de se marrer un coup en y entrainant le public avec eux. Avec le temps et comme le dit si bien encore une fois Tchernia, c’est devenu une promenade au pays de la fantaisie qui pour lui se revoyait (on est en 2008 pour rappel) avec un pincement au cœur en constatant la disparition de tant de copains. Quant à nous, au-delà du sourire qui ne nous quitte jamais des lèvres, Les Gaspards incite à se laisser aller pour humer un temps où l’insouciance n’était pas un vain mot, où la farce n’était pas grossière et où la comédie pouvait être sans prétention mais toujours teintée d’une humanité réconfortante. Une vision à hauteur d’âme d’enfant que Pierre Tchernia aura gardée toute sa vie.

Vous l’avez certainement déjà compris, mais le morceau de choix de ce Blu-ray au niveau des compléments est le commentaire audio de Pierre Tchernia enregistré en 2008 lors de la parution du premier DVD consacré au film chez StudioCanal. Il est à l’image du film. Enthousiaste, un peu nostalgique, toujours spectateur (ce qui donne lieu à quelques plages plus ou moins longues où il ne dit rien se prenant au jeu des interprétations et de l’histoire). Fait saillant, il n’oublie pas de mentionner le nom de tous les comédiens apparaissant à l’écran. Même ceux qui ne passent qu’une tête ou en bord cadre près du radiateur. Il en profite pour nous balancer quelques anecdotes qui souvent n’ont rien à voir avec le film comme celle où accompagnant Jean Carmet à un spectacle de mimes où celui-ci s’y faisant royalement chier balance soudain à la cantonade : « Plus fort, on n’entend rien ! ». Tchernia ne nous abreuve pas avec les coulisses de la réalisation, à l’évidence il s’en fout de la même manière que son film n’est pas un film de metteur en scène mais plutôt un divertissement sans autres formes d’ambition que de passer un bon moment en sa compagnie et de celle de sa troupe. Une très belle façon de revoir le film.

Sinon Jérôme Wybon, le maître artificier de cette collection « Nos années 70 », nous fait comme d’hab une petite introduction de son cru. Il nous rappelle que si Le Viager, le premier et précédent film de Tchernia, avait cartonné dans les salles (+ de 2M d’entrées), Les Gaspards s’en était quant à lui moins bien sorti avec « à peine » 800 000 entrées. Aujourd’hui, y a pas mal de films qui s’en contenteraient. Jérôme précise aussi que l’aventure des Gaspards débute quand celle de l’adaptation d’Iznogoud, le personnage de BD créé par René Goscinny que devait jouer Louis de Funès, tombe à l’eau car trop onéreuse. Pierre Tchernia se souvient alors d’une scène non tournée du Viager où le personnage joué par Michel Serrault arpentait les catacombes de Paris. Un point de départ qu’il développera en le mettant en opposition avec ce constat des travaux qui balafrent Paris depuis déjà quelques années.

Deux autres compléments parachèvent l’interactivité de ce Blu-ray. Une interview de Gilles Thomas, auteur de L’Atlas du Paris souterrain, par Pierre Tchernia plutôt insipide (déjà proposée sur le DVD de 2008) et un petit reportage sur le tournage du film apparemment diffusé en 1973 au sein de l’émission Pour le cinéma. On ne connaissait pas cette émission et après quelques recherches sur le web on n’a rien trouvé. A priori ce n’est donc pas une émission française. Ne pas hésiter à nous contredire et à nous donner des infos utiles en commentaires tout en bas de cette page.

Un petit mot sur la proposition technique de ce Blu-ray à commencer par l’image qui si elle ne se positionnera pas dans ce que l’on verra de mieux cette année, et pour cause vu que le master utilisé n’a bénéficié d’aucun travail de restauration, fait tout de même le job. On a ainsi droit à de très jolis contrastes, un grain appréciable pour une définition générale plus que convaincante. Les noirs ne sont jamais bouchés et cerise sur le gâteau on peut même être accompagné par un poil maous géant sur quelques plans où Jean Carmet se goûte un petit vin de sa cave en compagnie de Serrault et Depardieu. Enfin, la piste VF encodée en DTS-HD MA 2.0 mono ne prête le flanc à aucune critique. Elle est à la fois claire, précise et même quelque peu enveloppante quand la bataille finale fait rage.

Allez hop, On vous a mis ci-dessous le génialissime générique de début qui à lui seul synthétise tout l’esprit frondeur et oniriquement drôle de ces Gaspards. La meilleure façon selon nous pour conclure ce petit texte.

Spécifications techniques Blu-ray :

  • Image : 1.66.1 encodée en AVC 1080/24p
  • Langue(s) : Français en DTS-HD MA 2.0 mono
  • Sous-titre(s) : Français pour sourds et malentendants
  • Durée : 1h34min 14s
  • 1 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Bonus (en HD sauf mention contraire) :

  • Préface de Jérôme Wybon (4min 30s – 2024)
  • Commentaire audio du film par Pierre Tchernia
  • Interview de Gilles Thomas, auteur de L’Atlas du Paris souterrain, par Pierre Tchernia (9min 27s – SD – 2008)
  • Reportage sur le tournage, émission Pour le cinéma du 14 novembre 1973 (3min 20s – SD)

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