Mon Roi - Image Critique - Une

Mon Roi : Mais que fait la Polisse ?

On pourrait faire un raccourci facile en rapprochant Mon Roi à Pardonnez-moi, le premier long de Maïwenn Le Besco. Tous deux sont en effet quelque peu autobiographiques et se construisent sur le mode du « Moi je » qui va en agacer encore plus d’un. Tous deux racontent une destruction puis une reconstruction tel un mouvement perpétuel qui irrigue finalement toute la filmo de la réalisatrice. Sauf qu’entre les deux il y a eu Le Bal des actrices, comédie un peu branlante mais qui se sauvait par une très belle énergie communicative et surtout Polisse qui restera un film extrêmement couillu dans sa façon d’exposer ses névroses sous la forme d’une naïveté à la limite de la condescendance. Un film magique par accident ?  Mon Roi tend à le prouver sans que pour autant et comme bien souvent chez Maïwen, tout soit à jeter aux orties.

Mon Roi - Affiche

Si Pardonnez-moi avait pour lui la sincérité du premier long doublé d’une obligation de thérapie par l’image, Mon Roi n’a plus ces tours de garde pour lui tout en gagnant en maîtrise et en maturité. La réalisatrice semble en effet prendre du recul par rapport à l’histoire qu’elle veut raconter. Pour cela, elle prend le temps de filmer et étire celui de son métrage au-delà des deux heures. Mais à la différence de Polisse à la durée idoine, l’histoire se concentre sur deux personnages et on a le droit alors de trouver le temps long. En fait, on sent bien qu’avec Mon Roi Maïwenn veut combiner ce qu’elle a emmagasiné comme expérience depuis Pardonnez-moi tout en revenant à ses « premiers amours ».

Et il serait bien malaisé de lui reprocher sa montée en gamme technique où s’y déploie dorénavant une mise en scène non plus figurative mais d’une expressivité de tous les instants. Les gros plans sur les acteurs ne sont plus posés là et débrouilles-toi avec (spectateurs comme acteurs), le langage du montage plus complexe s’appuie sur une cartographie inculquée lors de Polisse, la caméra précède souvent et ne fait pas que suivre tout en donnant le temps au spectateur de décrypter les intentions… Maïwenn choisit de surcroît ici le va et vient des flashbacks. Procédé éculé s’il en est mais qui accompagne des objectifs bien affirmés dont celui de la destruction – reconstruction évoquée plus haut.

Procédé narratif donc qui illustre la thématique essentielle du film (les mauvaises langues diront la seule pour appuyer sur la pauvreté de l’ensemble) où la recherche de rédemption n’est jamais bien loin. Nous, on y verrait plus de la contrition. Il faut voir comment son double à l’écran (Emmanuelle Bercot, prix d’interprétation mérité à Cannes quand elle ne fait pas aussi réalisatrice) évoque à un moment son couple lové dans les bras d’un Vincent Cassel plus abrasif que jamais en amant / mari / père jamais et toujours présent. Comment elle s’en veut de n’être pas assez forte pour garder son homme auprès d’elle. Un constat unilatéral qui incidemment cautionne tous les comportements délictueux de l’homme. Les femmes vont apprécier.

Mais Maïwenn s’en fout. Elle raconte une histoire d’amour à sa façon jusqu’à s’enfermer dans une mécanique au bord du dysfonctionnement  et d’une réalité qu’elle insuffle pourtant par sa mise en scène qu’elle veut naturaliste sans vraiment y parvenir sinon par touches / séquences qui font toutefois extrêmement mouches. Cela passe d’ailleurs toujours aussi fortement par son talent / don de direction des acteurs auquel elle se consacre complètement puisque pour la première fois elle n’apparaît pas devant la caméra. Une volonté de travailler sur son ego ou un simple accident de parcours réclamé par le film ? Le fait est que Mon Roi ne souffre pas de sa disparition tant il sue par tous les pores sa présence.

Ce qu’il manque peut-être à Mon Roi c’est paradoxalement plus de chaire, plus de bosses, plus d’altérités… Là il ne reste finalement qu’un énième film sur un couple qui s’aime et se hait à la folie. Et sa façon d’en dévider l’histoire ne convainc pas franchement même si l’on devine les tenants et les aboutissements. On reste finalement un peu aux portes de tout cela. Spectateur certes, mais pas beaucoup plus.

Mon Roi de Maïwenn Le Besco – 21 octobre 2015 (Studiocanal)

Sélection Officielle en Compétition au Festival de Cannes 2015
Prix d’interprétation féminine pour Emmanuelle Bercot

RésuméTony est admise dans un centre de rééducation après une grave chute de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleurs, elle prend le temps de se remémorer l’histoire tumultueuse qu’elle a vécue avec Georgio.

Note : 3/5

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