Image une - César 2022 courts-métrages

César 2022 – Les courts qui nous ont tapés dans l’œil

Un des premiers mails reçus à la rédac en 2022 était rédigé ainsi :

Hello DC
Comment allez-vous ? Tous mes vœux
Envisageable de donner un peu de visibilité à ce court métrage concourant aux César… Quand vous voulez ?
Merci bcp / Bise

On jette du coup un œil au reste du message en scrollant pour au moins prendre connaissance des infos générales : Le titre / Le nom du réal / De quoi ça parle… Et puis on passe à autre chose. Mais dans la même journée, deuxième puis troisième mail d’autres attachés de presse qui nous font la même « proposition ». Les jours suivants, même litanie. De mémoire de vieux briscards ronchons dans le métier, c’est bien la première fois que nous sommes bombardés ainsi dans le seul but d’attirer notre attention sur une catégorie jusqu’ici nonchalamment et allégrement oubliée. Ô pas des professionnels de la profession bien entendu… Mais bien de nous journaleux dit de cinoche qui ne faisons généralement pas beaucoup d’effort pour aller jeter un œil sur ce sang neuf annonciateur de nouveaux talents et de beaux lendemains pour notre cinéma.

Les courts-métrages en lice pour les Cesar 2022

Que les « confrères » et « consœurs » qui ont osé passer une tête ici et qui généralement ont cette curiosité à la fois bien placée et régulière ne s’offusquent pas. Disons alors que ce constat s’applique en majorité au sein de cette rédaction. Ce qui nous a donc donné envie de le briser. Ce constat. Et de nous plonger au sein de cette sélection comprenant cette année 24 courts-métrages nommés au César. 24 films censés représenter le haut du panier d’une production que l’on ne pensait pas aussi foisonnante et riche compte tenu de débouchés économiques quasi nuls et d’une visibilité limitée aux festivals dédiés comme celui de Clermont-Ferrand (le plus célèbre) ou de diffusions TV au sein, au hasard, de la cultissime émission Court-circuit sur Arte.

C’est d’ailleurs sur le replay de l’émission que vous pourrez trouver une sélection (pas tous donc) des courts-métrages en lice pour le César du meilleur d’entre eux. Et parmi eux on en a repéré trois pour lesquels on va dire quelques mots. Non que les autres ne valent pas le coup d’œil, et d’ailleurs pour être tout à fait honnête on n’a pas tout vu, mais rien qu’avec ces trois-là, on a de quoi discourir jusqu’à la fin de la nuit. On vous rassure, on va tenter de faire court (vous l’avez ?).

Le Départ - Affiche

Le Départ de Saïd Hamich n’est pas écrit et réalisé par un nouveau venu. Saïd Hamich est en effet déjà l’auteur d’un long sorti en 2017 qui s’intitule Retour à Bollène. Film que nous n’avons pas (encore) vu alors que son travail en tant que producteur (lui l’ancien élève de la FEMIS département production) nous est plus familier. Il semble d’ailleurs s’y dessiner un attachement à des histoires ancrées dans une réalité sociale plutôt naturaliste sans pour autant jamais se départir d’une sensibilité proche de l’onirisme. On pense ainsi à Vent du nord de Walid Mattar auquel nous vouons le même attachement que lors de sa découverte en 2018 ou à Mon légionnaire de Rachel Lang, récit certes abrupt et parfois maladroit mais non dénué d’une belle humanité ou encore à Des hommes de Lucas Belvaux avec un Gérard Depardieu en ancien soldat traumatisé de la guerre d’Algérie pas toujours convaincant mais dont le climax de fin rend justice à son immense talent qui n’est plus à démontrer.
Le Départ est un très joli film qui raconte le déracinement à venir d’un enfant de son Maroc natal. Pour rejoindre son grand frère et son père qui a refait sa vie en France, il doit laisser derrière lui son pays et surtout sa mère et sa grand-mère. La caméra oscille entre le quotidien de l’enfant avec ses copains, l’arrivée de son père pour une semaine et l’annonce de son départ pour la France. On est à l’été 2004 et à la télé on suit les exploits de Hicham El Guerrouj aux JO d’Athènes. La chronique est belle, poignante et en rappelle d’autres qui ont jalonnées l’histoire du cinéma comme Un enfant de Calabre que le grand Luigi Comencini réalisa en 1987. L’histoire d’un enfant pauvre dans l’Italie de 1960 grand admirateur du marathonien éthiopien Abebe Bikila qui remporta cette année-là le marathon aux jeux olympiques de Rome.

Les Criminels - Affiche

Les Criminels de Serhat Karaaslan. Dans une petite ville d’Anatolie (région natale du cinéaste), un couple encore étudiant veut passer une nuit à l’hôtel. Mais en Turquie et surtout dans cette région un peu reculée, il faut pour cela prouver que l’on est marié. Les Criminels montre alors comment les deux tourtereaux vont tenter de contourner la loi avec les risques que cela peut comporter. Serhat Karaaslan a déjà réalisé un long intitulé Passed By Censor visible sur la plupart des plateformes VOD françaises. À la découverte de ce court-métrage tout simplement magistral on va se précipiter pour le découvrir. Les Criminels fait montre en effet d’une aptitude à mélanger les genres en à peine 23 minutes qui frise au génie. Thriller à la sensualité et au suspense qui rappelle le De Palma des années 80 quand il commettait Blow Out ou Body Double, Les Criminels se permet aussi de brocarder ce qu’il décrit comme un État policier rétrograde et pervers. Un réel petit bijou passé par moult festivals à commencer par Sundance où il a remporté le prix du meilleur scénario.

La Maison (pas très loin du Donegal)

La Maison (pas très loin du Donegal) de Claude Le Pape. Une maison que l’on fait visiter à un agent immobilier pour la mettre sur le marché. Son propriétaire vient de mourir et c’est Jackie qui la fait visiter. Jackie c’est l’ami du propriétaire qui squattait la maison. Jackie aimerait bien rester et peut-être finir ses jours lui-aussi ici mais cela ne semble pas être l’avis des enfants. Jackie c’est Jackie Berroyer et la cinéaste Claude Le Pape a voulu immortaliser cette maison qui était celle de son père avant de s’en séparer par le biais de ce court-métrage à la fois drôle et profondément mélancolique. La « faute » à un Berroyer lunaire qui débite en total roue libre des dialogues à moitié improvisée au sein d’un scénario prétexte. Le résultat est un véritable petit miracle porté à bout de caméra par une Claude Le Pape dont on avait déjà croisé le travail de scénariste sur Vent du Nord (décidément), Petit paysan de Hubert Charuel, la série Hippocrate ou Comme des garçons, la comédie plutôt bien troussée de Julien Hallard. Vivement son premier long derrière la caméra.

Pour aller plus loin voici la page officielle où sont recensés les 24 films en lice pour les césar du court-métrage de fiction 2022.

Et pour le plaisir, voici la très belle affiche de cette 47ème édition des César.

Affiche César 47ème édition (2022)

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