Avec Corporate, Nicolas Silhol réalise son premier long métrage. Son premier court métrage, centré sur une séance de jeu de rôles dans une entreprise de pompes funèbres, parlait déjà du monde du travail. « C’était plutôt une comédie qui décrivait l’entreprise comme un théâtre où chacun doit jouer un rôle et mettre de côté ce qu’il ressent en tant qu’individu ».
Nicolas Silhol a toujours été intéressé par les rapports humains en entreprise, son père étant professeur de management en école de commerce et consultant en Ressources Humaines. C’est avec la série de suicides chez France Télécom qu’il a découvert qu’une sorte de système de « management par la terreur » pouvait détruire des vies et des individus. Il avance : « Le cynisme du PDG de France Télécom, déclarant qu’il fallait mettre un terme à cette « mode du suicide », m’avait particulièrement choqué. Comme si c’était ceux qui souffrent qui étaient responsables… »
Corporate (2016)
Réalisateur : Nicolas Silhol
Acteurs : Céline Sallette, Lambert Wilson, Stéphane De Groodt, Violaine Fumeau, Alice de Lencquesaing
Durée : 1h35
Distributeur : Diaphana Distribution
Sortie en salles : 5 avril 2017
Résumé : Émilie Tesson-Hansen est une jeune et brillante responsable des Ressources Humaines, une « killeuse ». Suite à un drame dans son entreprise, une enquête est ouverte. Elle se retrouve en première ligne. Elle doit faire face à la pression de l’inspectrice du travail, mais aussi à sa hiérarchie qui menace de se retourner contre elle. Émilie est bien décidée à sauver sa peau. Jusqu’où restera-t-elle corporate ?
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- Avis express : Corporate a pour lui une représentation autoritaire et sans ambiguïté d’un pan obscur du monde du travail. Celui du département des Ressources Humaines au sein d’une grande entreprise qui cherche en l’occurrence ici à pousser vers la porte certains de ses cadres. La démonstration qui suit veut alors dénoncer ce que le réalisateur avait découvert dans ses recherches à savoir ce fameux management par la terreur qui fit par exemple flores chez France Télécom avec la vague de suicides qui s’ensuivit. C’est d’ailleurs ainsi que commence Corporate. Par la défenestration d’un des employés de la société où le personnage joué par une Céline Sallette épatante est en première ligne pour mettre en œuvre cette politique de harcèlement moral afin que la personne à qui cela est dédiée finisse par donner sa démission. La suite est une prise de conscience progressive de « l’héroïne » bien aidée il est vrai par un déni et un lâchage en règle de sa hiérarchie la propulsant seule responsable du drame. De fait, le personnage voulu par le réalisateur dont c’est ici le premier long, est de mettre en évidence les fêlures de son personnage sans pour autant en faire quelqu’un de tout blanc ou tout noir. L’inspectrice du travail jouée par la quasi inconnue et ultra crédible Violaine Fumeau accentuant cette impression au demeurant tout bénéf pour le film. Reste que si les personnages ont cette âpreté et cette couleur peu tranchées, il n’en va pas de même quant à la réalisation par trop clinique et démonstrative pour ne pas dire par moment maladroite. Le côté à vif jure en effet avec le reste et amenuise paradoxalement la dénonciation qui en devient par trop attendue, comme aseptisée. Il manque un je ne sais quoi qui faisait par exemple tout le sel d’un Ressources Humaines. Une part de risque qui basculait le film de Laurent Cantet vers quelque chose de terriblement humain et de douloureux au point d’en avoir encore mal au bide 17 ans plus tard. 3/5 – SG
- « Ceci est une fiction mais les méthodes de management qui y sont décrites sont réelles » nous précise-t-on en ouverture du film. Pour connaître, en partie, lesdites méthodes de l’intérieur depuis des années, l’auteur de ces lignes confirme que Corporate démontre avec une grande acuité ce management « par la pression / terreur » qui sévit au sein de certaines sociétés. Pour autant, le film n’entend pas dresser un tableau totalement noir. Ainsi le personnage campé avec justesse par Céline Sallette personnifie-t-il fort à propos une certaine forme de « prise de conscience » de la part de cette tueuse carriériste qui n’envisage plus seulement les salariés comme de simples lignes (budgétaires) d’un tableau Excel mais comme des humains à part entière. Tout n’est peut-être pas totalement perdu dans ce monde impitoyable de l’entreprise. 3,5/5 – Stéphane Argentin
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