Todd Phillips revendique plusieurs influences pour son Joker. Tout d’abord, Taxi Driver, Raging Bull et La Valse des pantins de Martin Scorsese. Le comic book The Killing Joke a aussi été une source d’inspiration pour le cinéaste, qui a préféré créer une histoire originale plutôt que d’adapter une BD DC Comics.
Pour créer le maquillage du Joker, l’équipe du film s’est inspirée du tueur en série John Wayne Gacy. Ce criminel se déguisait en Pogo le clown pour amuser les enfants dans les hôpitaux. Il a donc été surnommé « le clown tueur ».
Joker (2019)
Réalisateur(s) : Todd Phillips
Avec : Joaquin Phoenix, Robert De Niro, Zazie Beetz, Frances Conroy
Durée : 2h02
Distributeur : Warner Bros. France
Sortie en salles : 9 octobre 2019
Résumé : Le film, qui relate une histoire originale inédite sur grand écran, se focalise sur la figure emblématique de l’ennemi juré de Batman. Il brosse le portrait d’Arthur Fleck, un homme sans concession méprisé par la société.
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- Avis express : On a beau s’appeler Todd Phillips et avoir à son actif quelques beaux succès au box office comme la série Very Bad Trip, il en faut quand même (des tripes) pour arriver à caser dans le Hollywood d’aujourd’hui ce machin qui s’appelle Joker. Le meilleur ennemi de Batman, celui qui le définit viscéralement, n’est en effet qu’une des facettes ici de l’histoire dont les véritables enjeux sont à chercher ailleurs. Dans les années 70 en fait, quand l’industrie du cinéma yankee se cherchait un nouveau modèle économique suite à la fin de l’âge d’or des Studios. Une décennie dans laquelle Todd Phillips a puisé la ligne directrice d’une réalisation à contre-courant de la doxa ambiante. C’est que Joker raconte en creux le vide actuel de la production mainstream au pays de l’Oncle Sam. C’est à la fois sa grande qualité mais aussi sa très grande faiblesse.
Par prod mainstream on veut par extension parler du blockbuster auquel Joker est naturellement rattaché malgré son budget « ridicule » de 55M de dollars (sans la com). C’est que Joker s’apparente en fait à ces films du Nouvel Hollywood qui se caractérisaient par la radicalité de leur discours et/ou de leur mise en scène que la lucidité du regard jeté envers la société de l’époque a fini par rendre incontournables pour ne pas dire indispensables. Pour autant, et c’est là tout le savoureux paradoxe, beaucoup ont bénéficié de budgets qui les éloignaient automatiquement de l’estampille film maudit ou fauché. Autrement dit que le discours anti establishment qui faisait alors florès était littéralement porté voire adoubé par le système lui-même.
Ce n’est bien entendu plus le cas aujourd’hui mais de ces œuvres à charge envers une société à la fois inique, dure et inhumaine, Joker s’en repait bien volontiers pour devenir la substantielle moelle et la colonne vertébrale d’un film à la double démonstration implacable mais sans surprise. Voilà un homme vivant chez sa mère qui ne sait comment faire pour devenir un citoyen lambda et dont les appels à l’aide lui reviennent pleine tronche façon uppercuts destructeurs. Derrière son maquillage de clown, il tente de se bâtir une personnalité et un avenir tout en se sachant déjà condamné. La société n’en veut pas et lui, il lui en veut terriblement. Joker ne raconte alors rien d’autre que les affres psychotiques d’un homme qui a été littéralement bercé trop près du mur étant gosse. Pas de syndrome de stress post-traumatique à la Travis Bickle dans Taxi Driver ou d’étude de la folie en milieu clos comme dans Vol au-dessus d’un nid de coucou, juste un laissé pour compte parmi tant d’autres. Beaucoup d’autres en fait que le film va signifier en une fin climax suggérant que notre civilisation telle que nous la connaissons vit ses dernières heures.
Que le Joker ait provoqué (indirectement) la mort des parents de Bruce Wayne n’est finalement qu’un des alibis disséminés tout le long du film par un Todd Phillips qui a bien compris que pour raconter une telle histoire à la fois sombre et malaisante, il fallait appâter le chaland et enrober cela sous le label super-héros qui a le vent en poupe aujourd’hui. Joker est ainsi le premier film ouvertement iconoclaste à l’attention d’un public ultra demandeur puisque sevré d’une telle proposition de cinéma depuis trop longtemps. Ce qui altère indubitablement la force du film dont une partie du ressenti se fait forcément à l’aune de la prod ambiante citée plus haut. Pas certain en effet que Joker aurait trouvé sa place aussi facilement l’année du Parrain ou celle de La Porte du paradis.
Ce pourquoi la revoyure va s’imposer très rapidement et certainement ensuite dans les prochaines années histoire de confronter le film à la réalité. Ce qui nous permettra aussi de dire si Joker aura été un véritable accident ou une stratégie programmée chez Warner en vue de concurrencer l’univers Marvel à coup de productions décalées et portées par des réals qui en ont (des tripes encore oui). Quoi qu’il en soit, Joker se regarde aujourd’hui avec forcément les yeux de Chimène trop heureux que nous sommes de pouvoir apprécier une œuvre mature qui ne prend pas ses spectateurs pour des débiles ou des adeptes de parcs d’attraction vissés à leurs fauteuils de cinéma avec les bras levés histoire de profiter à fond du ride de foire du trône proposé. La perception en est comme on l’a dit biaisé, mais c’est tellement rare qu’il serait dommage de bouder notre plaisir. SG – 3,5/5
- Box office : 1 357 118 entrées après le 1er week-end sur 630 copies. On appelle ça une sacrée perf pour un film estampillé DC Comics qui n’en est pas vraiment un. À tel point d’ailleurs que Joker met une pilée à tous les purs-sangs du genre à commencer par le champion The Dark Knight de Nolan qui avait réuni au même stade 1 008 407 spectateurs sur 820 copies pour un cumul à 3 036 568 entrées. Cela laisse rêveur quant au potentiel final de ce Joker qui risque de modifier en profondeur la perception hollywoodienne de ce film littéralement transgenre. Qui pour s’en plaindre ? Edit 24/10 : 2 835 365 entrées en 15 jours sur toujours 630 copies. On tient là le phénomène de cette fin d’année.
- La chronique Blu-ray / Blu-ray 4K : Il ne fait aucun doute que voilà un titre qui aura les honneurs d’une sortie sur tous supports à commencer par une édition 4K dont la première des missions sera de rendre compte aussi fidèlement que possible de cette photo vintage à tendance glauque shootée en 35 mm par Lawrence Sher qui travaille sans interruption avec Todd Phillips depuis Very Bad Trip en 2009. Le défi est de taille. Edit 16/10 : La date de sortie est fixée au 12 février 2020 avec pour l’édition 4K le label de n°1 des ventes sur Amazon au moment où nous écrivons ces lignes.
Le Bluray 4K sera clairement un Must Have 🙂