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Fiche film : Lands of Murders

« Peu après la chute du mur de Berlin, l’incertitude et la méfiance dominaient dans les esprits des Allemands de l’Est – ce qui représentait un terrain idéal pour un thriller mystique et inhabituel, situé à une période de notre pays peu décrite au cinéma. Je suis très intéressé par ce moment où les deux monnaies allemandes étaient encore en vigueur, où l’Est pensait que tout serait mieux à l’Ouest – cette phase où les industriels véreux de l’Ouest sont arrivés et ont divisé l’Est en concessions, comme ils l’avaient fait dans le Far West. Cette période a suscité beaucoup d’espoirs. Mais aussi beaucoup de désillusions. » – Christian Alvart à propos de Lands of Murders.

Lands of Murders (Freies Land – 2019)

Réalisateur(s) : Christian Alvart
Avec : Felix Kramer, Trystan Pütter, Nora von Waldstätten, Ben Hartmann
Durée : 2h09
Distributeur :  KMBO
Sortie en salles : 29 juillet 2020

Résumé : Dans une région reculée de l’Allemagne tout juste réunifiée, deux inspecteurs enquêtent sur la disparition inquiétante de deux adolescentes. L’un a des méthodes modernes d’investigation, tandis que l’autre n’hésite pas à user de pratiques moins orthodoxes. Leur recherche les met sur la piste d’une affaire de bien plus grande envergure. Au cœur d’un climat post-RDA sous tension, ils vont devoir mettre de côté leurs divergences pour faire avancer l’enquête.

Articles / Liens :

  • Avis express : La Isla Minima cela vous dit quelque chose ? Non ? Oui ? Bon, pour les deux du fond qui roupillent près du radiateur, on vous rafraîchit la mémoire. La Isla Minima est un film espagnol sorti chez nous à l’été 2015. Il est signé Alberto Rodriguez dont ce n’était pas le premier forfait au cinéma mais qui reste encore aujourd’hui son plus gros coup sur notre territoire avec 323 911 entrées engrangées au long cours sur une famélique combinaison de 83 copies au lancement du film. Une exploitation à l’ancienne et un joli succès qui s’est répété chez quasi tous les pays où le film a été distribué. Jusqu’en Espagne où il fut de surcroît récompensé par 10 Goyas, l’équivalent de nos César. Il ne fallait pas trop se creuser les méninges pour se dire que La Isla Minima allait rebondir sous la forme d’une suite ou même d’un remake. Ce que Lands of Murders est. Un remake mais qui ne nous revient pas tel un boomerang en provenance (au hasard) de chez l’Oncle Sam mais plutôt du pays des Lander, de la saucisse et du Bayern. Oui, Lands of Murders est de nationalité germanique et ne suinte absolument pas le graillon et la bière dégustée en Air Papin de Scholl. Oui parce qu’on sait que certains préjugés chez vous ont la dent dure. Tentative d’explication.
    Derrière Lands of Murders on trouve un nom familier. Celui de Christian Alvart qui après avoir attiré l’attention avec Antibodies en 2005, sorte de relecture en plus tordu du Silence des agneaux, s’était frotté à Hollywood pour nous pondre la même année un film de SF anxiogène (Pandorum – 2009) et un thriller horrifique (Le Cas 39 –  2009) dont on a pas trop de mal à se souvenir encore aujourd’hui. Rien d’ultra transcendant mais la promesse d’un bon faiseur. 10 ans ont passé, l’homme est rentré chez lui en Allemagne et aucun des films qu’il a réalisés par la suite n’a eu les honneurs d’une sortie au cinéma chez nous sinon du Direct To Vidéo ou au mieux en DVD. Et puis il y a la série Dogs of Berlin diffusée en 2018 sur Netflix qui si elle ne permet pas d’en apprendre plus sur la maturité artistique du bonhomme donne quand même quelques indications sur une orientation plus sociétale de ses envies du moment. Un constat qui se vérifie pleinement avec Lands of Murders.
    Si, par définition, un remake est bien souvent une entreprise inutile pour ne pas dire uniquement mercantile surtout quand de surcroît le film originel sort du lot, celui-ci tord un tantinet le coup à cette règle non par sa propension à apporter une approche différente ou une réalisation déviante, inventive, innovante… mais justement en ne s’écartant que très rament de son modèle. Et à la différence d’un Psycho de Gus Van Sant, cela marche pleinement ici sans que l’on sache au final vraiment l’expliquer. Alors bien entendu on est passé du sud de l’Espagne à la frontière germano-polonaise. Mais dans les deux cas, le pays est à l’aube d’un avenir qui s’appuie sur les cendres d’un passé récent. D’un côté la chute du franquisme et l’avènement de la démocratie, de l’autre la chute du Mur de Berlin et la réunification toute fraîche de l’Allemagne. Et dans les deux cas, l’enquête sur la disparition de deux adolescentes  est confié à un duo de flics au pedigree diamétralement opposé. L’un vient de Berlin, il est plutôt jeune et officiait il y a peu encore dans la police de la RFA. L’autre est plus âgé, ses méthodes sont pour le moins rustiques, il est du coin et son passé comme membre éminemment de la police politique (la Stasi) vont forcément entrer en opposition avec son collègue.
    En creux, le film déroule aussi un condensé d’Histoire fort bien amené tout comme Alberto Rodriguez avec La Isla Minima avait su le faire. La désindustrialisation de l’ex RDA, sa déjà paupérisation dans ce qui allait être le plus grand défi économique du pays en cette fin de siècle, une jeunesse déçue par le mirage du capitalisme et une inhumanité prégnante quelque soit le régime politique. Et puis Christian Alvart met aussi un point d’honneur à lécher sa mise en scène. Mouvements de caméra amples, photo qui accentue le côté de rouille et d’os de cette lagune poisseuse et craspec, direction d’acteurs au cordeau… Bref rien n’est laissé au hasard pour faire de Lands of Murders un digne rejeton et un fier représentant d’un cinéma européen tout sauf consanguin. 3,5/5 SG
  • Box office : Annoncé sur 204 copies, on souhaite à Lands of Murders que distribue KMBO d’attirer autant de monde que La Isla Minima. Edit 13/08 : 36 206 entrées après 3 semaines d’exploitation. On peut appeler cela un flop.
  • La chronique Blu-ray : Au moment où nous mettons sous presse (ben quoi ?), on ne sait encore si un Blu-ray verra le jour mais il est évident qu’on ne peut que le souhaiter et pas uniquement pour les qualités formelles évidentes du film de  Christian Alvart. D’autant qu’un Blu-ray allemand voit le jour ces jours-ci chez Euro Video (en allemand sous-titré allemand). Y a plus qu’à le décliner chez nous avec des sous-titres français (a minima bien entendu).

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