Le réalisateur Guillaume Pierret s’est fait remarquer en 2012 avec son court-métrage Matriarche qui a été présenté dans plusieurs festivals dont celui de Cognac qui s’appelle depuis 2011 Festival POLAR de Cognac.
Balle perdue est son premier long. Il est diffusé exclusivement et mondialement sur la plateforme de streaming Netflix.
Balle perdue (2020)
Réalisateur(s) : Guillaume Pierret
Avec : Alban Lenoir, Nicolas Duvauchelle, Ramzy Bedia, Stéfi Celma, Rod Paradot, Sébastien Lalanne
Durée : 1h33
Distributeur : Netflix
Sortie en salles : 19 juin 2020
Résumé : Petit génie de la mécanique, Lino est réputé pour ses voitures-bélier. Jusqu’au jour où il se fait arrêter pour un braquage qui tourne mal. Repéré par le chef d’une unité de flics de choc, il se voit proposer un marché pour éviter la prison. 9 mois plus tard, Lino a largement fait ses preuves. Mais soudain accusé à tort de meurtre, il n’a d’autre choix que de retrouver l’unique preuve de son innocence : la balle du crime, coincée dans une voiture disparue.
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- Avis express : Si on ne peut que se réjouir de la présence de Balle perdue sur Netfllix, on ne peut que déplorer aussi que celui-ci ne trouve pas le chemin des salles obscures. Non que l’on veuille à nouveau remettre une pièce dans la machine quant à la bataille d’Hernani du moment, mais il faut bien reconnaître que voilà un premier long qui aurait mérité un grand écran de cinéma. Il faut certainement croire que nos financiers du 7ème Art n’ont plus trop les couilles pour faire émerger un film d’action dont les ramifications sont à chercher du côté du cinéma des années 90 au pedigree pourtant immédiat et accessible pour n’importe quel producteur digne de ce nom. Mais même ainsi, il n’y a plus la place en France sinon pour de la grosse comédie ou du cinéma d’auteur avec entre les deux ce fameux film dit médian de qualité française plus ou moins exportable et dont les entrées au box office s’effritent année après année. De fait, qui pour reprocher à Netflix de s’engouffrer dans ce vide béant alors que moult cinéastes en herbe piaffent d’impatience pour montrer tout l’étendue de leur talent à l’attention d’un public qui ne demande que ça ? Car oui, si Balle perdue ne se réclame pas d’un Verneuil ou d’un Lautner période Le Professionnel avec Belmondo, son réalisateur Guillaume Pierret y tend avec cette manière bien française que l’on pensait en effet perdue.
On parle ici d’un cinéma d’où suinte l’amour du travail bien fait à mi-chemin entre artisanat et rigueur déjà toute professionnelle. Et ce dès l’histoire que l’on sent pour une fois ne pas être le parent pauvre d’une telle entreprise qui au-delà de l’action et de l’obligation de tenir en haleine son spectateur, se doit surtout de rester un minimum crédible. Et on sent ici que la chose a été peaufinée et réglée au poil de cul près afin de nous emmener jusqu’au climax final qui vaut à lui seul son pesant de cahouète. Tout s’enchaîne à la perfection et la mécanique bien huilée respecte même certaines règles d’écriture que l’on trouve dans les séries comme ces rebondissements parfaitement orchestrés qui permettent à l’issue d’aller faire une pause pipi le temps de la pub. On exagère à peine. Mais en fait oui dans Balle perdue tout est exactement à sa place.
Jusqu’au casting d’ailleurs où tout le monde semble s’épanouir. C’est que chacun a droit à une caractérisation de son personnage plutôt bien vue avec des évolutions qui servent bien entendu le récit. Seul petit bémol avec Nicolas Duvauchelle qui très clairement fait du Duvauchelle. Alors certes, on sent bien que cela l’éclate mais pour nous spectateur c’est un peu plus frustrant car dès le premier plan sur lui, on devine la suite pour ne pas dire tous les enjeux du film. Heureusement que Guillaume Pierret a de la ressource avec une mise en scène pour le moins efficace aux lignes claires et aux intentions jusqu’au-boutiste plus que louables. On pense bien entendu aux scènes de cascades et de poursuites en voiture dont on avait déjà pu apercevoir l’énorme potentiel dans Matriarche. Ce que l’on aime de plus ici c’est cette volonté de ne pas verser dans l’ultra spectaculaire avec par exemple un travail sur le sound design proche d’une certaine véracité. En gros on a l’impression d’être un témoin lambda sur le bord de la route. Un parti-pris qui renforce donc les intentions d’un récit qui s’il ne révolutionne en rien le genre, le porte de la plus belle des manières.
On aime enfin l’énergie déployée par Alban Lenoir qui s’il s’est apparemment énormément investi tout au long de la préparation du film qui a débuté dès la lecture de la toute première version du script, se démène comme un beau diable devant la caméra sans pour autant brasser de l’air. On pense un chouïa à Jason Statham avec une pincée d’humanité en plus. Et son binôme avec Ramzy Bedia (faire valoir en forme de clin d’œil à Police fédérale Los Angeles de Friedkin) aurait même mérité un peu plus de profondeur. Non franchement, y a pas à dire, Balle perdue est une bonne pioche pour Netflix et une belle perte pour nos cinémas. Espérons en tout cas que cela donne des idées à certains pour la suite et que Guillaume Pierret puisse très vite s’éclater en grand large. Son cinéma le vaut bien. 3/5 – SG
- Interview expresse : Allo Guillaume, on aimerait te poser 2 ou 3 questions si tu as 2s. Bon, pour tout vous dire, on ne l’a pas eu eu au tel mais par mail et voici une synthèse de nos échanges :
- Tu peux me donner le budget du film (au moins une fourchette) ? Je ne peux pas parler du budget, mais de toute façon c’est un indicateur un peu biaisé. L’argent est moins important que les gens avec qui j’ai fabriqué le film. Faire un film comme celui-là n’est pas qu’une question de moyens, mais d’idées et de compromis. Il n’y a eu ni confort, ni frustration par rapport à l’argent. J’ai eu exactement ce que je demandais… Et si j’avais eu 100 millions, j’aurais quand même couru après le temps et l’argent !
- Quand et comment Netflix est rentré dans le projet ? La question de la distribution s’est posée vers la fin 2018. On ne s’est fermés aucune porte, mais on tenait absolument à ce que le projet parvienne à Netflix. En tous cas, de mon point de vue, ils étaient les partenaires idéaux pour ce premier film. Qui plus est un film de genre français… Avec mon producteur (Rémi Leautier), on a fini par les rencontrer. Et à partir de là c’était l’évidence. Leur greenlight est arrivé quelques semaines plus tard.
- Est-ce que le film sort au cinéma quelque part dans le monde en plus de sa diffusion sur Netflix ? Ce que je veux dire c’est que si Netflix a je pense les droits monde, il y a des pays où il peut aussi sortir en salles non ? Alors là aucune idée. Mais je pense que tout est possible…
- Pour le reste je présume donc que tu valides le constat de la frilosité ambiante des argentiers du cinéma français vis-à-vis de films comme le tien ? En gros me dire aussi depuis combien de temps tu as porté ce projet avant que Netflix rentre dans la danse. En fait il faut surtout bien comprendre que Netflix n’est pas un choix par défaut. Je ne suis pas un fétichiste de la salle, je suis un gros consommateur de streaming, et du coup je savais qu’avec Netflix mon film allait sortir dans le monde entier et trouver directement son public… Chose qui aurait été difficile en France ! La distribution des films de genre me paraît toujours un peu compliquée dans ce pays (peu de salles, une promo pas dingue…).
J’ai porté le film pendant 5 ans, de l’idée originale jusqu’à la sortie. C’est un délai assez classique dans ce milieu. Et pendant ces années, j’ai pu constater à quel point il y avait une envie de cinéma d’action chez les producteurs/distributeurs français. Mais il y a encore des barrières à faire tomber, notamment cette idée tenace que le film d’action coûte forcément cher, et qu’il n’est pas fédérateur. S’il y a une frilosité, elle vient de là à mon sens : la méconnaissance du genre et de sa fabrication. - À propos d’Alban Lenoir. Il y a beaucoup à dire sur cette collaboration, effectivement. Je le connaissais déjà bien, mais on n’avait jamais travaillé ensemble. Il m’a contacté alors que je venais de finir la première version du script, donc je lui ai fait lire. Il était bouillant pour le film, je savais qu’il donnerait tout au projet, du coup j’avais envie de le faire avec lui coûte que coûte.
- À propos de Nicolas Duvauchelle. Je ne connaissais pas bien ses autres films et rôles avant de le caster. C’est vraiment quand on s’est rencontrés que j’ai su qu’il serait parfait pour le rôle (de mon point de vue). Areski est vraiment le premier personnage à être né à l’écriture, donc je n’aurais pas bossé avec n’importe qui. Globalement j’ai casté des gens dont l’énergie naturelle correspondait au rôle. Duvauchelle était à l’écoute, et on s’est bien amusés tous les deux avec son personnage.