Far Cry 6 – PlayStation 5

Far Cry 6 – PlayStation 5

Après la secte de fanatiques religieux du Montana de Far Cry 5 en 2018, direction une petite île (enfin pas si petite que ça, on y revient juste après) de la mer des Caraïbes pour Far Cry 6. Derrière le mouvement de révolte contre la dictature en place, ce sixième opus sera-t-il également celui de la révolution en termes de gameplay ? Éléments de réponse.

Far Cry 6 – PlayStation 5Depuis sa révolution de 1967, l’île de Yara située dans la péninsule des Caraïbes est passé du rêve de liberté au cauchemar dictatorial. Et ce n’est pas la récente élection de Antón Castillo et son Viviro, un traitement révolutionnaire contre le cancer issu de la culture d’une plante locale, qui vont changer la donne. Derrière son slogan de campagne « Reconstruire le paradis » se cache une tout autre réalité : la déportation des plus démunis tandis que les contestataires du régime sont violemment muselés. Ce qui n’empêche nullement certains d’aspirer à des lendemains meilleurs : fuir vers le rêve américain. Parmi ceux-ci, on trouve Dani Rojas, le personnage que vous allez incarner au prénom suffisamment non genré pour permettre au joueur d’opter pour un avatar masculin ou féminin comme dans toutes les productions Ubisoft de ces dernières années. Mais par la force des choses et des évènements de la séquence d’introduction, Dani va être amené à rallier à l’insu de son plein gré le mouvement révolutionnaire Libertad.

Toutes ressemblances avec des lieux, des personnages ou des faits similaires seraient bien entendu totalement fortuites. Mais personne n’est dupe et quiconque n’a pas passé les cours d’histoire-géo au bahut à bailler aux corneilles (non ça sent pas le vécu tout ça !) verra immédiatement dans cette île imaginaire de Yara une métaphore à peine voilée de Cuba. Dans le rôle du Fidel Castro local, mention spéciale à Giancarlo Esposito qui interprète le dictateur Antón Castillo et que les connaisseurs ont pu découvrir dans des rôles tout aussi inquiétants à la télévision au cours des dernières années. Le Gus Fring de Breaking Bad et Better Call Saul, c’était lui et le Moff Gideon du Mandalorian, c’était encore lui. Pour apprécier d’autant mieux les différentes réparties de tout ce petit monde (qui plus est avec l’accent local), on recommandera une fois n’est pas coutume d’opter pour la VOSTF. On appréciera également la force de caractère de Dani qui n’hésite pas à ouvrir sa grande gueule lors des séquences cinématiques où le personnage y apparaît désormais de pied en cape au lieu d’être présenté en vue subjective.

La première chose qui frappe et risquera peut-être d’en choquer certains dès la séquence d’introduction est l’extrême violence dont fait preuve Far Cry 6. On ne remettra pas ici une pièce dans la machine du débat sur la violence dans les jeux vidéo alors que le sujet refait régulièrement surface comme par exemple au moment de la sortie de l’excellent The Last of Us Part II l’an passé mais les âmes sensibles seront malgré tout priés de s’abstenir car Far Cry 6 n’est pas destiné aux enfants de chœur. En même temps difficile de donner totalement tort aux créateurs car après tout, quelle dictature s’est déjà exprimée autrement que dans le sang et la violence ? Et cela tombe plutôt bien car vous, Dani, êtes là pour y remédier et y mettre un terme.

Sur le papier les trois grandes aires de jeu et autant de bras droits de Castillo à défaire avant d’en venir à la destitution finale de El Presidente sonnent dangereusement comme un copier/coller des précédents opus de la saga. Dans les faits et tout comme le très réussi Assassin’s Creed Valhalla sorti l’an passé, les différentes missions s’intègrent à la perfection dans le fil rouge narratif révolutionnaire de Far Cry 6. Quand bien même certains enchaînements sonnent parfois un peu faux et que l’ensemble n’est pas toujours d’une fluidité narrative totale, on sent très clairement la volonté d’aller dans la bonne direction. Et les différentes missions auxquelles Dani prendra part font sens dans le but d’ébranler à chaque petit coup d’éclat le régime en place et non plus uniquement de faire dans la redite de captures / assassinats / sabotages / explosions.

Ce sentiment d’immersion au cœur d’un véritable mouvement révolutionnaire est renforcé par l’immensité et la diversité de la carte sur laquelle se déroule l’action de Far Cry 6. Une map qui donne véritablement le sentiment d’évoluer au sein d’un pays tout entier et non d’un vulgaire îlot paumé au milieu de la mer des Caraïbes. Ce n’est pas non plus une surprise après tant d’années de maîtrise en la matière mais force est une nouvelle fois de reconnaître le talent des équipes d’Ubisoft dès lors qu’il s’agit de concevoir des open world : jungle, plage, village, le tout accompagné d’une multitude d’infrastructures diverses et variées (usines, aéroport, écoles, zoo, port, etc.). Pour peu que vous planquiez votre arsenal, il est même tout à fait envisageable d’arpenter tous ces lieux sans (trop) éveiller les soupçons des milices locales.

D’autant plus que les moyens de locomotions, sur terre, sur mer ou dans les airs, ne manquent pas. Et encore heureux car on se voyait plutôt mal sillonner le pays à pinces eu égard aux distances à parcourir. Ou bien, solution encore plus rapide : la « téléportation » d’une base à une autre. Une option d’autant plus efficace à l’aune du nouveau SSD magique des consoles next gen et leurs temps de chargement quasi-instantanés. Ajoutez-y un rendu en 4K/60fps et le bonheur serait presque complet s’il ne trainait pas encore ici et là quelques textures qui poppent ou bien qui trahissent leur nature basse résolution pour qui regardera d’un peu trop près au-delà du simple premier plan (rétrocompatibilité avec la précédente génération de consoles oblige ?).

Au registre des autres petits regrets, signalons également un nombre de passants un peu faiblard et un certain manque de diversité parmi ces badauds. S’agit-il là encore d’une limitation technique liée au support console, y compris sur la pourtant beaucoup plus puissante PlayStation 5 sur laquelle nous avons testé Far Cry 6 ? Et puisque l’on aborde les petites anicroches d’ordre technique, on signalera également un sound design qui parvient certes à exploiter plutôt à bon escient les possibilités multicanaux mais un peu moins la distance qui vous sépare des différents bruitages. De telle sorte qu’il est très difficile pour ne pas dire impossible de percevoir si tel ou tel bruit se situe à 2 mètres ou à 20 mètres de vous.

Bien que vous soyez libre de vagabonder comme bon vous semble sur l’île de Yara, on déconseillera toutefois de s’aventurer dans des zones pour lesquelles votre avatar n’a pas le niveau. À moins d’être sujet à des pulsions particulièrement suicidaires, il serait tout sauf sensé d’aller se hasarder dans une zone de niveau 10 ou 15 si votre personnage n’en est encore qu’au niveau 5. Une façon comme une autre pour les créateurs de garder la main sur le déroulé scénaristique. Dans tous les cas, la furtivité restera l’option à privilégier pour chaque mission et l’on déconseillera l’approche frontale et brutale sous peine de se retrouver rapidement submergé. Le modus operandi est alors immuable, épisode après épisode : marquer les ennemis à l’aide de son téléphone portable (substitut des jumelles), nettoyer autant que faire se peut le secteur à l’aide de head-shot en mode sniper et autres coups de machette dans les omoplates par derrière et le tour est (presque) joué. Gare toutefois à ne pas vous faire repérer, auquel cas, c’est l’alerte assurée. L’I.A. adversaire, bien qu’améliorée au fil des ans, est toujours un peu aux fraises par moment : ennemis bloqués ou bien qui foncent tête baissée dans votre direction. Ça vous facilite le boulot mais ça fait toujours un peu désordre.

Parmi les autres éléments qui dénotent avec le reste du jeu dans ce Far Cry 6, nous retiendrons deux points spécifiques. Tout d’abord le Supremo, sorte de sac aux « superpouvoirs » permettant de faire appel rien de moins qu’à une pluie de missiles, une impulsion électromagnétique ou un mode berzerk. D’autre part, il sera également possible de faire appel à des alliés animaliers : un teckel, un crocodile ou encore… un coq ! Oui vous avez bien lu ! Dans le registre du portnawak « faisons-nous plaisir », les créateurs de Far Cry 6 n’y sont pas allés de mains mortes et si les amateurs de bons gros nanars et autres séries Z se délecteront de telles possibilités, les autres risquent d’être quelque peu circonspects. À moins qu’il ne s’agisse là d’un palliatif à la disparition du sacro-saint arbre de compétences de votre personnage. Mais rassurez-vous, en contrepartie ce dernier dispose toujours d’un arsenal plus que généreusement garni. Et pour ceux qui voudraient rallonger la sauce et in extenso faire durer le plaisir, sachez qu’il y a comme dans toute bonne production Ubisoft qui se respecte une foultitude de tâches annexes à accomplir : missions secondaires, gestion de bases et crafting à gogo. Autant d’activités totalement facultatives pour parvenir à ses fins mais que les amateurs apprécieront à leur juste valeur.

Au final, si la saga se bonifie avec le temps, Far Cry 6 n’est pas encore la révolution attendue. Le sujet est certes plus mature et la narration mieux maîtrisée. Mais il reste encore çà et là quelques réserves, tantôt d’ordres techniques tantôt du registre du gameplay, qui empêchent cette saga d’accéder au même niveau de réussite atteint par les derniers opus de l’autre saga phare du studio Ubisoft : Assassin’s Creed. À défaut d’une vraie révolution, les évolutions sont en bonne voie.

  Lâchez-vous !

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *