Si on se penche cinq minutes sur la fiche Wikipedia de Pierre Tchernia, on se rend compte que l’on croyait connaître le Monsieur mais en fait pas du tout. Déjà, le simple fait d’écrire « se pencher cinq minutes », c’est plus que présomptueux tant son « CV » est long comme le bras. On parle en effet d’abord d’un des pionniers de la télévision française qui a quasiment tout fait : animateur, journaliste, concepteur d’émissions ou encore maître de cérémonie des César pendant une vingtaine d’années pour finir par être surnommé « Monsieur Cinéma » tant il est vrai que ses connaissances en la matière étaient encyclopédiques. Au-delà du tube cathodique (oui on disait comme ça avant l’arrivée des écrans plats), Pierre Tchernia a été un scénariste adoubé, un acteur émérite et une voix off reconnaissable entre toutes dans les adaptations live ou en animation des Astérix & Obélix, au hasard, jusqu’à sa mort en 2016. Les Gaspards est une énième corde à son arc puisqu’il y officie en tant que co-scénariste certes mais aussi et surtout en y assumant la réalisation. C’était d’ailleurs son deuxième long pour le cinéma (sur quatre) qui synthétise à lui seul son univers empreint de poésie, d’humour décalé et de fantaisie burlesque. Un constat prolongé par les excellents bonus de ce Blu-ray édité chez StudioCanal qui clôture par ailleurs définitivement cette collection dite « Nos années 70 ». Et c’est bien dommage.
Fils de médecin, licencié en droit et en philosophie, communiste, d’origine juive (de son vrai nom Dreyfus) et grand résistant, Jean-Paul Le Chanois est aussi ce réalisateur qui peut se targuer d’avoir quelques films ayant marqué de son empreinte le cinéma français. On pense ainsi à Sans laisser d’adresse (1950), Ours d’or au festival de Berlin en 1951, qui n’existe malheureusement pour l’instant qu’en DVD chez René Château. On pourra d’ailleurs noter que la quasi-totalité de sa filmo a rencontré son public avec même des triomphes comme Papa, Maman, la Bonne et moi en 1954 (un Blu-ray existe bien chez LCJ mais il est peu recommandable) ou sa version des Misérables en 1958 qui lui bénéficie d’une très belle édition Blu-ray chez Pathé. Si d’autres films de Le Chanois ont eu la chance de voir le jour en Blu-ray, ils se concentrent plus sur sa seconde partie de carrière moins intéressante où le réalisateur se tourne alors vers un cinéma moins élaboré avec une volonté d’exploiter une veine populaire (ce qui n’est pas un gros mot bien entendu) et comique mais sans véritables aspérités propres à se bonifier avec le temps. On pense au hasard au Jardinier d’Argenteuil que Coin de Mire propose d’ailleurs au sein d’un Blu-ray plus que recommandable. Monsieur ne mange pas tout à fait de ce pain-là tant le plaisir de la revoyure ou de la découverte reste intact. En cause une interprétation de haute volée qui s’appuie sur des dialogues que n’auraient pas reniés Michel Audiard et une histoire certes simple mais assez retorse dans son traitement allant bien au-delà de la simple comédie sociale. Le Blu-ray proposé par Coin de Mire Cinéma permettra de s’en rendre compte de la meilleure des façons.
Une femme à sa fenêtre n’est pas ce que Pierre Granier-Deferre a réalisé de mieux dans sa carrière. Il suffit juste de jeter un coup d’œil au formidable Adieu poulet qu’il commettait l’année précédente et récemment édité par Rimini dans un plus que convaincant combo Blu-ray + UHD pour confirmer ce ressenti. Cette romance tendance mélo dans la Grèce chaotique des années 30 entre Victor Lanoux et Romy Schneider avait pourtant sur le papier des qualités à faire valoir. Un casting quatre étoiles puisque, outre les deux acteurs sus cités, on peut y ajouter Philippe Noiret et des « seconds couteaux » éprouvés à commencer par Gastone Moschin qui a trainé sa sale tronche de rital mal embouché dans un nombre incalculable de (bons) films. L’adaptation du très beau roman au titre éponyme du sulfureux Pierre Drieu la Rochelle par l’écrivain communiste Jorge Semprún à qui l’on devait des chefs-d’œuvre de scénarii tels que Z (1969) et L’Aveu (1970) de Costa-Gavras. Et puis enfin la reformation du couple de cinéma Noiret – Schneider qui avait embrasé la France quelques mois auparavant avec Le Vieux fusil de Robert Enrico. À l’arrivée, s’il n’y a pas grand-chose qui marche, on a tout de même affaire à une édition Blu-ray qui tient plus que bien la route entre des bonus passionnants et une signature technique de haute volée.
Marco Ferreri est un réalisateur italien réputé pour nombre de ses films qui ont provoqués scandales et/ou incompréhensions lors de leur sortie. Tout en haut on peut y placer La Grande bouffe qui raconte comment quatre grands bourgeois confinés dans une maison parisienne se donnent la mort en s’empiffrant le temps d’un week-end « gastronomique ». Prix de la critique internationale au festival de Cannes 1973 où il choqua jusqu’à la présidente du jury Ingrid Bergman et Catherine Deneuve alors en couple avec Marcelo Mastroianni (elle ne voulut plus le voir pendant plusieurs jours), La Grande bouffe rencontra son public partout où il fut distribué à commencer par la France qui lui fit un très bel accueil avec 2 422 500 entrées pour devenir un des films représentatifs d’une décennie contestataire envers l’establishment. Pour autant, il aura fallu attendre cette fin d’année 2024 pour que La Grande bouffe se décline enfin en Blu-ray alors que jusqu’ici il n’était dispo qu’en DVD dont le plus recommandable était celui édité par feu Opening (en 2006 puis réédité en 2010) car proposant de nombreux bonus dont des images du tournage et des archives INA non repris ici par Tamasa. Les deux éditions que l’éditeur vient de sortir (collector et standard) n’ont toutefois pas à rougir de la comparaison en ce domaine d’autant que du côté de l’image et du son, la restauration 4K à laquelle le film a eu droit lui permet de franchir un gap plus qu’appréciable même si non exempte d’interrogations au regard de l’image restaurée 2K proposée par l’éditeur Arrow sur son Blu-ray paru en 2015 aux États-Unis et en Angleterre.
Pour aborder L’Attentatd’Yves Boisset, ce ne sont pas les angles qui manquent. Il y a celui historique puisque le film retrace d’une manière quasi documentaire l’enlèvement de Mehdi Ben Barka, principal opposant au roi Hassan II du Maroc alors en exil, par la police française en plein Paris. Il y a celui plus cinématographique qui nous permettrait de confronter la filmo naissante de ce cinéaste franc-tireur dans la France des années 70. Ou bien encore d’analyser l’écho d’un tel film à la fois au regard de la production cinématographique actuelle et de l’état de notre société en ce début de 21ème siècle. Et vous savez quoi, n’ayons pas peur de l’ampleur de la tâche et de la possibilité de nous planter puisque l’on va tout aborder sans oublier de vous parler de cette édition DVD qui propose le film depuis un master tout récemment restauré 4K.