Dune (2020) - Image une critique

Dune (2020) – En manque d’épice !

Ce qui frappe d’entrée avec cette nouvelle incursion de la part de Villeneuve dans la psyché de son adolescence de cinéma, c’est cette volonté quasi obsessionnelle à vouloir coller le plus possible au récit foisonnant et limite indigeste imaginé par Franck Herbert. Un roman de SF au pedigree si méta qu’il reste d’ailleurs le moteur et le socle de moult déclinaisons littéraires et cinématographiques depuis sa première parution en 1965 à commencer par un certain Star Wars qui s’en est inspiré si outrageusement que Franck Herbert a voulu attaquer pour plagiat Georges Lucas sans jamais toutefois passer à l’acte. Voici donc son Dune qui en s’appuyant sur une narration ultra dense semble vouloir prendre à contre-pied l’impression « splendide coquille vide » laissée par Blade Runner 2049. D’autant que la mise en scène n’a rien perdu de sa furia grandiose en cours de route. Mais alors pourquoi a-t-on l’impression que le cinéma de Denis Villeneuve n’évolue plus depuis 2013 et Prisoners ? Pis, qu’il semble même s’enfoncer dans quelque chose de totalement régressif, atone et in fine chiant à en mourir.

Dune (2021) - Affiche

Premier indice, un manque de recul évident. Comme si Villeneuve n’avait pas su se décharger d’un trop plein d’hormones accumulés depuis l’adolescence justement. À l’image cela se matérialise par un plan définitif ou voulu comme tel toutes les dix secondes assommant le spectateur ou plutôt le sommant de comprendre qu’il a affaire ici à une œuvre d’art où le mouvement est superflu. À vouloir ainsi rendre compte d’un phrasé et d’un style déjà pas mal pompier (bien qu’en total adéquation avec les intentions du récit), Villeneuve se fourvoie dans une mise en scène ostentatoire qui à sa décharge semble aller dans le sens de sa filmo. Si on revoit au hasard Incendies qui le fait connaître du grand public en 2010, tout y est déjà. Une histoire écrasante à l’égard du personnage principal qui doit lutter contre une identité et un passé qu’on veut lui imposer le tout administré par une mise en scène qui ne fait pas dans la dentelle mais qui se justifie pleinement au regard de son sujet. Le problème avec Dune c’est que cette thématique d’une destinée toute tracée contre laquelle le héros entre en rébellion n’est qu’une des nombreuses thématiques développées par Herbert. Vouloir les traiter uniformément ainsi à l’écran est un écueil du coup rédhibitoire.

Deuxième indice. Villeneuve l’a toutefois bien compris. Ce pourquoi il a décidé de ne rien laisser sur le bas-côté lors du passage de l’écrit à l’image. Paris osé, compliqué même tant Dune (le livre) ne serait-ce que dans sa première partie que Villeneuve traite ici est à la fois une vaste exposition des enjeux à venir tout en s’affirmant déjà comme le récit épique que Franck Herbert ne cessera d’amplifier par la suite. Un déjà grand écart que l’écrit peut aisément retranscrire mais qui à l’image exige forcément des compromis ou des astuces que Villeneuve s’est refusé à adopter. Ce qui donne encore une fois des plans lourds de sens, des images « monumentales », des mouvements d’appareil imposants (complaisants ?) qu’une voix off utilisée pourtant avec parcimonie vient encore affadir. Le paradoxe c’est que malgré ce dispositif pour le moins didactique, celui qui n’est absolument pas familier avec l’univers de Franck Herbert risque de pédaler dans la choucroute. Quant aux autres, le sentiment ne sera guère mieux et pourra se résumer par un « beau mais vain ».

Troisième indice. On n’est d’ailleurs même pas certain que Villeneuve se soit fait véritablement plaisir tant les enjeux monstrueux d’un tel film se matérialisent au détour de chaque plan à l’écran. Comme si le cinéaste québécois n’avait finalement comme seul fil rouge, la volonté de ne pas décevoir les nombreux fans de l’univers absolument démentiel créé par Herbert. Il y avait pourtant la possibilité d’amener le texte au-devant des enjeux propres à notre siècle qui pour la plupart sont déjà bien présents dans le roman. On pense bien entendu à l’écologie mais aussi à la religion qui chez Herbert se traduit par le messianisme et le contrôle des religions. Des occasions manquées tant le discours ici n’est que linéaire et sans aucune aspérité bien aidé il est vrai par la prestation de Timothée Chalamet aussi charismatique qu’un mollusque agonisant sur le sol aride d’Arrakis, la planète de Dune.

Et puis, quatrième indice, il faut aussi mentionner plus particulièrement cette impression de « stop and go » dans la mise en scène de Villeneuve. Soit une volonté évidente « d’auteuriser » un film que l’on peut qualifier « à grand spectacle » et ce jusque dans ses scènes d’action. En gros proposer un Dune sans cesse écartelé entre une vision forcément opératique du récit épique et la conception toute Villeneuvienne de ces enjeux captés selon une sémantique imprégnée de cette conception des auteurs développée par les critiques de la nouvelle vague. Ce qui à l’image se traduit lors des scènes de bataille ou de corps à corps en des chorégraphies que nous rangerons dans la catégorie « peine à jouir ». Villeneuve ne sachant jamais vraiment jusqu’où il peut aller dans un sens ou dans un autre. En temps normal cela peut donner un grand film malade un peu comme le fut la version de David Lynch qui le temps aidant prend décidément une dimension des plus passionnantes à décrypter, ou un film légèrement schizophrène sans autres enjeux que de poliment ennuyer plus de 2h30 durant. L’acquisition de l’épice et de l’avènement du Kwisatz Haderach est peut-être à ce prix. C’est en tout cas tout ce que l’on souhaite à la future deuxième partie pas encore tournée au moment où ces quelques lignes sont bafouillées.

Dune (2020) de Denis Villeneuve – 2h36 ( Warner Bros. France) – 15 septembre 2021

Résumé : L’histoire de Paul Atreides, jeune homme aussi doué que brillant, voué à connaître un destin hors du commun qui le dépasse totalement. Car s’il veut préserver l’avenir de sa famille et de son peuple, il devra se rendre sur la planète la plus dangereuse de l’univers – la seule à même de fournir la ressource la plus précieuse au monde, capable de décupler la puissance de l’humanité. Tandis que des forces maléfiques se disputent le contrôle de cette planète, seuls ceux qui parviennent à dominer leur peur pourront survivre…

Note : 2/5

3 réflexions sur « Dune (2020) – En manque d’épice ! »

  1. Blabla et gnagna, allons, allons, laissons le public juger ce film. Critique sans sens, avec beaucoup d’effets de phrases pour faire cultu !!! Qu’une nouvelle tentative d’adapter « dune », est déjà en soi faire oeuvre d’art. Oui, facile de faire de belles phrases, alors que l’auteur d’ycelles serait sans doute bien incapable de dire une réplique face caméra ou de transcrire en image la rédaction de dix lignes d’un ado boutonneux. La modestie sied aux grands, me revient en tête la critique stupide et sans fondement du film (ici écrite) « le chant du loup », critique absurde, alors que ce film fut un grand, grand succès en salle ! Et pour cause ! Critique et ridicule atteint par un des « sachants » de France Inter qui se posa cette question si bête, « je me demande pourquoi ce film a un tel succès », bah mec, parce que c’est un très bon film, et que le public se fout complètement de vos effets de manches !!
    Alors laissons le public juger. Rappelons que 2001 fut à sa sortie descendu en flammes par d’aussi piètres critiques. On sait ce qu’il est advenu, chef d’oeuvre immortel et absolu. Modeste, modeste…

  2. J’espère que l’auteur de cette critique nauséabonde a écouté l’émission fort bien faite de France Inter ce matin, « on aura tout vu », consacré en partie à « Dune ». Avec historique de ce chef-d’oeuvre et interview de l’auteur du film. Ca, c’est de la critique constructive, intelligente, trouvant – entre autre – que « Timothée Chalamet » n’est pas « aussi charismatique qu’un mollusque agonisant » mais apporte au personnage de Paul tout retenue et intériorité de ce personnage, tel qu’il en ressort dans l’oeuvre de Franck Herbert. Il faut noter que ce film reçoit des grandes plateformes de film un accueil plus que bon, que sur les réseaux sociaux on presse les spectateurs à aller voir ce film, afin de vite voir le second épisode, que suivant différentes plateformes, où les spectateurs s’expriment, entre 70 et 80 % trouvent ce film très bon. On peut ne pas aimer un film, mais l’on doit rester digne dans les phrases de critique et ne pas écrire un tas d’âneries !!! Note, dans mon précédent message, j’ai fait une petite erreur, ce n’est pas à France Inter que l’on a eut droit à la sottise que je cite, mais France Cultu, dont tout le monde sait que les « sachants » qui y officient sont tous persuadés d’avoir inventé l’eau chaude et le fil à couper le beurre ! Hé oui, les deux !!!

  3. Bravo Sandy ! Je suis tout à fait d’accord avec votre analyse du film. J’en attendais personnellement beaucoup, je pensais aller voir un très grand film et au final je me suis endormi deux fois durant sa projection. Une mise en scène sèche mais classieuse, des enjeux pafaitement expliqués, mais d’insupportables longueurs et un Chalamet au charisme de mollusque (100% d’accord !) absolument pas à sa place dans ce film, sans oublier le baron Harkonnen très très loin d’être aussi effrayant que dans la version de Lynch. C’est beau, mais ça manque de saveur, de rythme et d’audace. Contrairement aux posts de lemien, je pense que vous n’avez écrit aucune anerie, mais un article juste et drôle. Vive la liberté d’expression !!! Vive la critique libre !!!

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