Alors que les pays anglo-saxons (États-Unis et Royaume-Uni) ont déjà eu droit à plusieurs de ses films sur support Ultra HD, L’Armée des 12 singes est le tout premier long-métrage réalisé par Terry Gilliam à avoir les honneurs d’une sortie Blu-ray 4K en France dans une édition qui frise la perfection, aussi bien sur le plan technique qu’éditorial. À une exception près.

Testé à partir de checkdiscs fournis par l’éditeur.

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L’Armée des 12 singes – Édition Collector Steelbook – Blu-ray 4K Ultra HD + Blu-ray

Synopsis : Nous sommes en l’an 2035. Les quelques milliers d’habitants qui restent sur notre planète sont contraints de vivre sous terre. La surface du globe est devenue inhabitable à la suite d’un virus ayant décimé 99% de la population. Les survivants mettent tous leurs espoirs dans un voyage à travers le temps pour découvrir les causes de la catastrophe et la prévenir. C’est James Cole, hanté depuis des années par une image incompréhensible, qui est désigné pour cette mission.

Disque 1 : L’Armée des 12 singes en Blu-ray 4K Ultra HD

Spécifications techniques :

• Image : 1.85:1 encodée en HEVC 2160/24p Dolby Vision
• Langues : Anglais & Français DTS-HD Master Audio 5.1
• Sous-titres : Français
• Durée : 2h 09min 20s

Bonus (HD et VOSTF) :

• Commentaire audio de Terry Gilliam et Charles Roven (VO)
• Bandes-annonces des autres sorties 4K de l’éditeur

Disque 2 : L’Armée des 12 singes en Blu-ray

Spécifications techniques :

• Image : 1.85:1 encodée en AVC 1080/24p
• Langues : Anglais & Français DTS-HD Master Audio 5.1
• Sous-titres : Français
• Durée : 2h 09min 20s

Bonus (HD et VOSTF) :

• Commentaire audio de Terry Gilliam et Charles Roven (VO)
• The Hamster Factor – Making of d’époque (87min 32s, SD)
• La Jetée de Chris Marker (1962, 27min 58s) – Exclusivement sur l’édition Culte
• Entretien avec Terry Gilliam (22min 53s) – Exclusivement sur l’édition Culte
• Interview exclusive de Terry Gilliam (28min 40s) – Exclusivement sur l’édition Culte
• Bande-annonce originale (2min 10s, VF)
• Bande-annonce 2023 (1min 05s)

Détails techniques :

• Taille du disque : 92,19 Go
• Taille du film : 89,89 Go
• Bitrate vidéo moyen : 83,09 Mb/s (surcouche Dolby Vision : + 0,10 Mb/s)
• VO DTS-HD Master Audio 5.1 (24-bit) : 4,58 Mb/s
• VF DTS-HD Master Audio 5.1 (24-bit) : 4,54 Mb/s

« C’est de la connerie ! C’est la méthode d’Hollywood ! »

Cette déclaration choc, c’est de la bouche de Terry Gilliam que l’on peut l’entendre dans l’excellent making of, l’un des tous meilleurs qui soit, The Hamster Factor, en référence au hamster que l’on peut subrepticement apercevoir dans une cage au cours d’une des séquences futuristes de L’Armée des 12 singes (1995) dans un décorum très influencé par Brazil (1985) comme le reconnait bien volontiers le cinéaste au cours de la Masterclass enregistrée au London Film Festival en 1996. Un futur à la chronologie indéterminée (en quelle année sommes-nous, impossible de le savoir) où les humains survivent sous terre suite à une pandémie mondiale qui a décimé 5 milliards d’individus en 1997 tandis que faune et flore règnent à nouveau en maître à la surface du globe. Toute ressemblance avec des faits réels serait bien entendu totalement fortuite même si personne n’est dupe, à commencer par Terry Gilliam dans la toute nouvelle interview inédite propre à cette édition française qui reconnait qu’une certaine pandémie de COVID-19 est passée par là dans l’entrefaite. Ce qui s’apparentait alors à de la science-fiction il y a bientôt trente ans (le film les fêtera en 2025) laisse aujourd’hui à réfléchir.

Ce qui n’est pas la moindre des qualités de L’Armée des 12 singes dont la production fut tout sauf un long fleuve tranquille comme nous le rappelle ce making of que l’on ne saurait que trop vous conseiller si vous ne l’avez pas déjà vu. Là où la plupart des reportages de ce type nous vendent des coulisses de tournage où « tout le monde il est beau, tout le monde il est génial », The Hamster Factor nous montre le « vrai » visage de la conception d’un film (pour ceux qui en doutaient encore). Une face cachée où le cinéaste doit batailler pour imposer SA vision face à des studios hollywoodiens qui raisonnent non pas en termes artistiques mais avant tout en termes de retour sur investissement. La fin du documentaire est à ce titre particulièrement éloquente avec les désormais tristement célèbres projections tests d’où les spectateurs ressortirent à l’époque en gribouillant sur leurs feuilles des appréciations du style « trop long, trop lent, on n’y comprend rien » on en passe et des meilleurs. Terry Gilliam et sa « garde rapprochée » (les scénaristes, le monteur, etc.) devront alors faire front commun pour empêcher un charcutage en post-prod où très peu de retouches seront finalement effectuées.

À l’arrivée, L’Armée des 12 singes sera un succès en salles ($168M de recettes mondiales pour un budget de $29M) contredisant ainsi les mauvaises langues des projections-tests. Même en connaissant la fin et sous couvert d’accepter le fameux paradoxe lié au thème du voyage dans le temps et ses protagonistes qui reviennent dans le passé afin d’altérer un futur peu reluisant, revoir L’Armée des 12 singes aujourd’hui confirme si besoin était combien il a su s’imposer parmi les plus grandes œuvres de SF du Septième Art. Et assurément l’un des films les plus marquants du genre au cours de ces trente dernières années aux côtés des Fils de l’homme (2006) de Alfonso Cuarón. Avec son scénario excellemment bien ficelé, son sujet post-apocalyptique qui hélas jour après jour devient de plus en plus tangible, ses interprètes, Bruce Willis et Brad Pitt en tête aussi juste qu’azimutés qui amènent le spectateur à s’interroger sur la véracité de ce que vit le personnage principal (est-il fou ou bien dit-il la vérité ?) et la mise en scène au diapason de Terry Gilliam (on y revient juste après), toutes ces qualités font donc de L’Armée des 12 singes un véritable joyau de la SF couché sur pellicule qui n’a rien perdu de sa superbe depuis 1995.

Retour à présent en 2023 avec la sortie (très attendue) de cette édition Blu-ray 4K Ultra HD (ou plus précisément deux éditions, on y revient là aussi juste après) sous la bannière de L’Atelier d’Images. Jusqu’à présent, pour se procurer le film sur support Ultra HD, il fallait se tourner du côté du Royaume-Uni ou des États-Unis avec l’édition 4K sortie chez Arrow en avril 2022 à partir d’un nouveau master 4K restaurée, celui là-même que l’on trouvait déjà sur l’édition Blu-ray sortie chez Arrow en 2018. Sans surprise, c’est de ce même master qu’est reparti L’Atelier d’Images.

Nous sommes donc ici en présence d’une image au format 1.85:1 encodée en HEVC 2160/24p Dolby Vision à partir d’un nouveau master 4K restauré en 2018 et issu du négatif original 35mm, le tout ayant été approuvé par Terry Gilliam. Dans la toute nouvelle interview, il précise d’ailleurs n’avoir jamais revu le film à l’exception de sa contribution à cette nouvelle restauration. Si tout n’est pas encore parfait (il reste bien une ou deux petzouilles de ci de là), la copie est dans son ensemble d’une propreté quasi-immaculée. Avant d’aller plus loin, il convient de rappeler que l’approche visuelle de Terry Gilliam et de son chef opérateur Roger Pratt est celle d’une photographie « évanescente / vaporeuse » couplé à un production design crasseux aux décors volontairement miteux, sales, décrépis, bardés de tags. Autre point important qu’il convient également de rappeler : L’Armée des 12 singes a été filmé sur pelloche 35mm. Et le rendu de ce nouveau master 4K restitue avec brio cette granulosité, l’une des plus belles qu’il nous ait été donné de voir depuis bien longtemps. Les habitués des images numériques lissées et autres rendus DNRisés modernes peuvent donc passer leur chemin, nous concernant, nous sommes ravis de voir (enfin) une image fidèle au souvenir de sa découverte en salles à l’époque. Il en va de même de cette photographie « vaporeuse » elle aussi parfaitement restituée et qui n’altère en rien les autres qualités visuelles, à commencer par une définition de tout premier choix aussi bien lors des gros plans sur les visages que des plans larges de Philadelphie, aussi bien ceux dans le présent que dans le futur.

Le nouvel étalonnage HDR Dolby Vision nous permet d’ailleurs d’apprécier mieux que jamais les moindres recoins des décors au cours du premier quart d’heure. À commencer par cette scène d’ouverture (le rêve de Cole) dans l’aéroport à la photographie volontairement blanchâtre et laiteuse, puis les 10 minutes suivantes dans le futur entre les bas-fonds mal éclairés et les extérieurs post-apocalyptique de Philadelphie en ruine sous la neige dans des teintes bleutées froides. Il faudra attendre la 15ème minute lorsque Cole et sa psy (Madeleine Stowe) sortent du commissariat pour découvrir enfin une lueur du jour plus « brillante ». Au cours de toutes ces séquences (et sur tout le reste du film), le rendu des couleurs est désormais renforcé sans pour autant se retrouver artificiellement boosté outre mesure avec là encore des teintes en phase avec cet univers voulu comme « sale ». Certains passages se démarquent parfois comme par exemple cette séquence dans la résidence très cosy de Christopher Plummer (70min) ou encore cette autre scène aux couleurs très chaleureuses lorsque Cole est félicité par les scientifiques du futur (81min) avec un décorum très « cocotier et vahiné ».

À noter que le disque Blu-ray présent au sein de cette édition combo « Blu-ray 4K + Blu-ray » bénéficie lui aussi du nouveau master 4K, renvoyant ainsi aux oubliettes l’image de la précédente édition Blu-ray sortie chez UGC en 2009 aux teintes délavées et à la définition d’un autre temps (voir notre comparatif en fin de ce papier).

Côté son, certains regretteront peut-être l’absence d’une nouvelle piste Dolby Atmos ou DTS:X mais les pistes françaises et anglaises DTS-HD Master Audio 5.1, celles là-même que l’on trouvait déjà sur la précédente édition Blu-ray (encodées sous 16-bits vs du 24-bits à présent), n’en donnent pas moins pleine et entière satisfaction. Les musiques de Paul Buckmaster (pas forcément le compositeur le plus prolifique au cinéma) sont toujours aussi enveloppantes et dynamiques comme en atteste le thème principal au cours du générique d’ouverture. L’utilisation des 5.1 canaux disponibles est très soutenu tout au loin du film, aussi bien dans les bas-fonds futuristes que dans le « présent » des années 90 avec moult bruitages qui viennent se nicher dans les différents canaux. Certains passages ou encore certaines scènes tirent leur épingle du jeu comme par exemple cette séquence en pleine Première Guerre Mondiale (43min) ou encore ce tir de pistolet qui se réverbère dans toutes les voies à chaque fois que ressurgit cette fameuse scène d’aéroport (25min 13s, 121min 50s). Pour ceux qui aime les effets « tourbillonnants », signalons également ces passages avec la « voix » qui s’adresse à Cole et se déplace de voie en voie (38min, 83min). Les dialogues quant à eux sont parfaitement claires et limpides en toutes circonstances. Au petit jeu des comparaisons, la VF fait presque jeu égal avec la VO même si nous avons trouvé que le placement des effets (cf. la scène avec la « voix » justement) est moins net en VF. Nous avons également décelé une légère différence de tonalité entre VO et VF, audible entre autres sur la musique du générique d’ouverture.

Côté bonus, comme évoqué précédemment, le disque Blu-ray propose le remarquable making of, The Hamster Factor, ainsi que le tout aussi excellent commentaire audio en compagnie de Terry Gilliam et du producteur Charles Roven. Deux suppléments qui à eux seuls couvrent la totalité des coulisses de la production. Seule fausse note selon nous : l’absence de sous-titres français sur le commentaire audio. Une absence justifiée selon l’éditeur par le coût lié à la retranscription puis la traduction pour ce qui est le bonus le moins écouté par les acheteurs. À la place, L’Atelier d’Images a préféré investir dans une toute nouvelle interview inédite de Terry Gilliam lors de sa venue au Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg 2023. Jovial et blagueur, le cinéaste y revient sur les origines du projet, le tournage avec les trois comédiens principaux (Bruce Willis, Madeleine Stowe et Brad Pitt) ou encore l’approche visuelle mais ne nous apprend au final rien de vraiment nouveau par rapport au making of, au commentaire audio ou encore à la Masterclass enregistrée à Londres en 1996.

À noter que cette nouvelle interview, la Masterclass ainsi que le court-métrage La Jetée (1962) de Chris Marker ayant inspiré le scénario de L’Armée des 12 singes et qui a lui aussi fait l’objet d’une restauration à partir du négatif original 35mm pour l’image et du magnétique 35mm pour le son, sont visibles uniquement sur l’édition dite « Culte Steelbook » disponible en exclusivité sur le site de l’éditeur tandis que l’édition Collector Steelbok que l’on peut trouver dans toutes les enseignes propose « seulement » le making of, le commentaire audio et deux bandes-annonces (celle de l’époque et l’autre de 2023). L’éditeur nous a d’ailleurs bien précisé avoir conçu deux Blu-ray distincts : un pour l’édition Collector (Blu-ray qui sera également disponible à l’unité en janvier 2024) et l’autre pour l’édition Culte avec l’intégralité des bonus. L’édition Culte renferme également un facsimilé du dossier de presse cinéma d’époque ainsi qu’une affiche recto/verso du film. La précédente édition Blu-ray sortie en 2009 proposait uniquement le making of.

Pour être complet, précisons que l’édition sortie chez Arrow l’an passé contient uniquement un disque Blu-ray 4K (vs un combo Blu-ray 4K + Blu-ray pour les deux éditions françaises), ne propose aucune piste française ni aucun sous-titres français (ni sur le film ni sur les suppléments). La VO est par ailleurs proposée en DTS-HD Master Audio 5.1 et 2.0 tandis que côté bonus on trouve le commentaire audio, le making of (en HD et chapitré vs en SD non chapitré sur l’édition française), la masterclass, une interview de Ian Christie, spécialiste du cinéma et auteur d’un ouvrage intitulé Gilliam on Gilliam ainsi qu’une galerie de 240 photos, le tout dans un packaging Amaray (vs un boîtier Steelbook pour les deux éditions françaises). À noter que suite à une défaillance, Arrow avait procédé à un remplacement du disque 4K (tous les détails sur leur site). En France, certains acheteurs ont également fait part de soucis avec le disque 4K édité par L’Atelier d’Images aux alentours d’1h36 (pour plus de précisions rendez-vous sur bluraydefectueux, site spécialisé pour ce genre de pépins techniques et qui comme toujours invite les acheteurs à tester leur exemplaire sur au moins deux lecteurs distincts). De notre côté, nous n’avons rencontré strictement aucun problème avec notre lecteur Oppo UBD-203, aussi bien avec les checkdiscs envoyés par l’éditeur qu’avec l’édition Culte définitive que nous avions précommandée sur le site de L’Atelier d’Images.

Les plus

• Deux éditions Steelbook : Collector et Culte (encore plus fournie).
• Une restauration 4K magnifique proposant une image granuleuse à souhait.
• Le Blu-ray bénéficie du nouveau master 4K.
• Une interactivité conséquente : making of, court-métrage, Masterclass, etc.
• L’un des tout meilleurs making of qui soit.
• Un commentaire audio excellent…

Les moins

• … mais hélas non sous-titré.

De haut en bas :

• Blu-ray – Édition UGC 2009
• Blu-ray – Édition L’Atelier d’Images 2023 (Master 4K)
• Blu-ray 4K UltraHD – Édition L’Atelier d’Images 2023 (Master 4K)