40 ans après sa sortie en France, quelles seraient les raisons de revoir ou de découvrir Le Bal d’Ettore Scola ? Un film sans dialogue qui se décline en cinq tableaux historiques situés en un lieu unique et où la musique envahit la bande son quasiment du début jusqu’à la fin. Une telle description fera déguerpir les moins curieux mais saliver les adeptes d’expériences cinématographiques forcément un peu plus à la marge. De celles qui n’ont quasiment plus droit de cité aujourd’hui alors qu’en 1983 Le Bal avait attiré 834 962 spectateurs et était (toujours bon de le rappeler) récompensé par 3 César : Meilleur film (ex æquo avec À nos amours de Maurice Pialat), Meilleur réalisateur et Meilleure musique pour Vladimir Cosma. Le Blu-ray que sort les Editions Montparnasse propose le film dans une copie issue d’une restauration 4K. S’il vous fallait d’autres raisons pour acquérir cette édition, on vous les développe ci-dessous.

Au cinéma le : 21 décembre 1983

Résumé : Cinquante ans de danse de salon en France, depuis les années 1930 : le Front populaire, la Guerre, l’arrivée du jazz et du rock, Mai 68, le disco… Les couples silencieux se font et se défont au gré de l’histoire et de la musique.

On va commencer par le plus évident. La qualité du film d’Ettore Scola qui quatre décennies plus tard revêt un vernis intemporel qui ne se dément plus. Ne serait-ce que dans son parti pris proche du cinéma muet où l’histoire passe par les interprétations des corps et des visages. Pour être plus précis, Le Bal passe en revue les faits saillants de l’histoire de France de 1936 et l’arrivée du Front Populaire au début des années 80 avec entre les deux la période de l’occupation, la libération, les années 50, Mai 68… Le tout filmé dans un dancing parisien. Chaque période redistribuant rôles et costumes aux mêmes acteurs sans oublier la musique qui alterne de la ginguette au disco en passant par le jazz, rock et autres classiques de la chanson française. Au sein de ce maëlstrom, des couples se font et se défont, des histoires intimes se développent sous nos yeux sans jamais oublier le contexte de la grande… Histoire.

À l’origine, Le Bal est une pièce de théâtre au titre éponyme mise en scène par Jean-Claude Penchenat, un dramaturge français qui a vu défiler dans sa salle tout le gratin parisien jusqu’au Ministre de la culture Jack Lang et du Président de la République François Mitterand tous intrigués par ce dispositif tenu par des acteurs non professionnels où l’improvisation était le maître mot produisant de fait des représentations à chaque fois uniques. Jean-Claude Penchenat, on le retrouve en complément de cette édition accompagné de sa femme au cœur elle aussi de cette création via une interview enregistrée en 2023. Il revient pour nous sur cette incroyable aventure qui s’est donc terminée au cinéma avec derrière la caméra l’un des réalisateurs italiens les plus en vue à l’époque. Celui que la critique et le public avaient adoubé avec des films tels que Nous nous sommes tant aimés (1974), Affreux, sales et méchants (1976), Une journée particulière (1977), La Terrasse (1980) est lui aussi tombé sous le charme de cette pièce atypique et s’est donc attelé à la porter à l’écran. Jean-Claude Penchenat ne se privant pas alors pour nous narrer avec force et détails tous les déboires qu’aura subi la production qui de fil en aiguille a atterri dans les célèbres Studio de Cinecittà pour mener à son terme un film visiblement mal embarqué.

Le Blu-ray propose aussi un document d’époque qui nous livre des images des coulisses de la pièce de théâtre entre répétitions et réponses au débotté des acteurs et actrices que l’on retrouve par ailleurs dans le film. C’est dire que voilà une entreprise qui ne s’est pas fourvoyée dans la compromission car il en a certainement fallu des cojones pour imposer ainsi une troupe de comédiens inconnue du grand public. Pas une tête d’affiche, même pas un petit nom qui fait tilt sinon un ou deux faciès reconnaissables mais seulement parce que depuis ceux-ci ont fait carrière. On pense ainsi à Marc Berman ou encore à Jean-François Perrier. C’est aussi pour cela que Le Bal passe le temps sans prendre une ride. Impossible en effet de s’accrocher aux branches d’une quelconque similitude propre à ranger le film dans des cases que tout critique adore faire. Le Bal se regarde et surtout s’apprécie dès qu’on lâche prise. Dès que l’on fait enfin attention aux petites histoires qui se déroulent devant nous et que la caméra d’Ettore Scola se prend à son propre jeu. Celle-ci ne cachant pas en effet son plaisir de dérouler la pelote de chaque (petite) dramaturgie en des saynètes rythmées, drôles, tragiques, burlesques… sans jamais oublier le temps qui passe faisant défiler les modes, les us, les coutumes en un kaléidoscope où l’humain est roi.

Il est évident aussi que la très belle restauration 4K effectuée depuis le négatif original contribue grandement à la plénitude de cette (re)découverte. On aime particulièrement le grain qui accentue la fluidité des mouvements des danses sans jamais figer l’expression des visages. On apprécie aussi le choix du PCM pour la partie audio puisque voilà un encodage sans compression à même de rendre compte de tous les choix musicaux à commencer par la partition plutôt inspirée de Vladimir Cosma. Le Blu-ray du Bal c’est vraiment de la belle ouvrage au service d’un film qui méritait bien entendu un tel écrin.

Spécifications techniques Blu-ray :

• Image : 1.66:1 encodée en AVC 1080/24p
• Langue(s) : Musique PCM 2.0 mono / Audiodescription
• Sous-titre(s) :
• Durée : 1h51min 20s
• 1 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Bonus :

• Des histoires sans paroles : Le bal par Micheline Paintault (19min 57s – HD – 1981)
• Entretien avec Geneviève et Jean-Claude Penchenat (24min 39s – HD – 2023)