Pauvres créatures - Image une fiche film

Fiche film : Pauvres créatures (2023)

Pauvres créatures adapte le roman d’Alasdair Gray au titre éponyme, paru en 1992. Le réalisateur Yorgos Lanthimos désirait en faire un film depuis longtemps, et a même été en contact avec l’auteur, aujourd’hui décédé.

Andrew Gray, le fils de l’écrivain, déclare : « Mon père et Yorgos se sont rencontrés à Glasgow et ont fait le tour de la ville, en visitant les lieux associés au roman. Alors qu’il avait auparavant refusé d’autres offres d’adaptation, il a été sensible au fait que Yorgos ait pris le temps de le rencontrer personnellement. C’était le moyen de communication qu’il préférait : marcher et montrer la ville dans laquelle il a vécu toute sa vie. Après cette rencontre, mon père a acheté le DVD de Canine, qu’il a beaucoup apprécié, et je crois que c’est sur ce film qu’il a fondé son opinion sur les talents de Yorgos. »

Pauvres créatures a obtenu le Lion d’or au Festival de Venise 2023.

Pauvres créatures (Poor Things – 2023)

Réalisateur(s) : Yórgos Lánthimos
Avec : Emma Stone, Mark Ruffalo, Willem Dafoe, Ramy Youssef, Christopher Abbott, Suzy Bemba, Damien Bonnard
Durée : 2h21
Distributeur : The Walt Disney Company France
Sortie en salles : 17 janvier 2024

Résumé : Bella est une jeune femme ramenée à la vie par le brillant et peu orthodoxe Dr Godwin Baxter. Sous sa protection, elle a soif d’apprendre. Avide de découvrir le monde dont elle ignore tout, elle s’enfuit avec Duncan Wedderburn, un avocat habile et débauché, et embarque pour une odyssée étourdissante à travers les continents. Imperméable aux préjugés de son époque, Bella est résolue à ne rien céder sur les principes d’égalité et de libération.

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  • Notre avis : Pauvres créatures nous arrive précédé d’une réputation pour le moins flatteuse. Cela a commencé avec le Lion d’or décroché à Venise en septembre dernier et depuis lors via une pléthore de reviews dithyrambiques venues d’ici et d’ailleurs à commencer par les États-Unis où le film est sorti le 18 décembre récoltant au passage et à ce jour un peu plus de 17M de dollars auxquels il faut rajouter grosso modo 3M en comptant les recettes mondiales pour un budget annoncé aux alentours de 35M (sans les frais marketings). C’est d’ailleurs au passage et à date le film le plus cher de Yórgos Lánthimos. Oui Yórgos Lánthimos, ce réalisateur d’origine grecque qui en un peu moins de 10 ans a gravi pas à pas le Hollywood versant « auteur » avec The Lobster (2015), Mise à mort du cerf sacré (2017), La Favorite (2018) et maintenant Pauvres créatures devenant là-bas une figure européenne incontournable au même titre qu’un Guillermo del Toro (au hasard).
    Pour autant, cette ascension est proportionnellement inverse à l’intérêt de ses films qui semblent, sous des apparences de liberté et de créations visuelles sans limite, s’arcbouter sur des histoires de moins en moins disruptives et surprenantes. Pour s’en rendre compte il faut juste se rappeler de Canine (2009) où il mettait en scène des enfants confinées au sein d’une villa entourée d’une haute clôture. Leurs parents leur interdisant tout contact avec l’extérieur. La mise en scène de Lánthimos y était implacable, dérangeante, malaisante et toujours au service de cette histoire dont on n’est toujours pas ressortie indemne. Mais il n’est pas besoin de remonter si loin pour trouver chez Lánthimos un prolongement hollywoodien à cette pépite. Mise à mort du cerf sacré allait en effet encore plus loin dans cette recherche permanente d’une déstabilisation cette fois-ci totalement destructrice. La famille y était une nouvelle fois vécue comme un étouffement et une fin de vie en soi. Depuis, Yórgos Lánthimos semble vouloir à tout prix confronter sa mise en scène devenue brillante et incroyablement signifiante à des histoires plus linéaires et donc « lisibles ». C’était le cas avec La Favorite qui s’il mettait en valeur son trio d’actrice dont déjà Emma Stone et surtout Olivia Colman qui rafla pour la peine un Oscar, perdait au passage beaucoup du mystère créatif de ses précédents films.
    Pauvres créatures semble malheureusement accentuer le mouvement. En voulant initier une forme de remake féminin de Frankenstein, Yórgos Lánthimos se confronte certes à un roman qu’il admire et vénère depuis des lustres, mais surtout il lui permet de donner libre cours à un traitement formel des plus inventifs et radicalement imaginatifs jamais ou peu vus au cinéma. Chaque plan est un tableau somptueux, chaque séquence une composition ébouriffante. Le N&B du début abime les sens et la couleur qui vient ensuite, le tout au format 1.66 pour le moins couillu, ensorcelle la rétine. Les contrastes en N&B sont incroyables et leur pendant lors du passage en couleur dénote une science de la saturation qui s’inscrit dans une recherche formelle que l’on ne peut que profondément admirer.
    Indéniablement Yórgos Lánthimos a lâché les chevaux. On osera même avancer que le bougre s’est fait grave plaisir en octroyant d’avance à son directeur de la photo Robbie Ryan un Oscar qui lui était passé sous le nez pour La Favorite. On sera comme on l’a déjà dit plus circonspect sur ce que Pauvres créatures raconte. L’affirmation d’une femme créée en partie de lambeaux d’humanité dans un monde d’hommes. Un monde dystopique certes mais un monde réglementé par les hommes dont il faut s’affranchir d’abord inconsciemment puis avec toute la volonté consciente possible. La caractérisation était séduisante sur le papier. À l’écran elle reste artificielle malgré toute l’énergie déployée par Emma Stone (productrice itou) qui n’hésite pas à donner littéralement de sa personne. Ce qui d’ailleurs contribue aussi à ce sentiment de mécanique trop huilée et trop démonstrative pour que l’on y croit, pour que l’on rentre totalement dans l’histoire.
    On reste donc un peu à quai jusqu’à cette fin qui nous amène à nous demander : Tout ça pour ça ? tout en gardant en tête cette maestria formelle qui aurait gagné définitivement ses lettres de noblesse si elle avait été associée à une narration plus dissonante et moins démonstrative. Pauvres créatures restant du coup à guet de nos émotions pour ne s’apparenter qu’à une expérimentation formelle sans âme. Tout le contraire de ce que Yórgos Lánthimos voulait sans aucun doute faire passer comme message au sujet de sa créature dont on ne garde au final en mémoire que la démarche désarticulée du début. Promesse alors d’un tout autre film non tenu.  2,5/5
  • Box office : Avec 484 086 entrées (sur 169 copies 1ère semaine), La Favorite est à ce jour la meilleure marque au box office français pour un film de Yórgos Lánthimos. Le film était alors distribué par Fox France rachetée depuis par Disney qui prend donc le relai pour Pauvres créatures. Edit 18/01 : 1 508 entrées sur 29 copies lors de la séance 14h Paris. La Favorite c’était, à titre de comparaison, 2 487 entrées sur 25 copies. Edit 12/03 : 560 302 entrées au cumul en 7 semaines de présence sur les écrans soit dorénavant la meilleure marque pour un film de Yórgos Lánthimos en France.
  • La chronique Blu-ray et Blu-ray 4K :  Rien n’a filtré au moment où nous bafouillons ces quelques lignes mais il est certain que des éditions Blu-ray et Blu-ray 4K verront le jour. Edit 12/03 : Nos certitudes du début ont laissé place à de la perplexité. En ce 12 mars si un Blu-ray sort bien aux États-Unis chez Disney / Buena Vista avec une VF et des STF, quid de la France ? Et quant à du 4K, il n’y a pour l’instant aucune annonce de faite nulle part. Gageons que les 4 Oscars glanés donneront le LA pour remédier à ce constat pour le moins déprimant.

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