On a déjà dit tout le bien que l’on pensait du Procès Goldman lors de sa sortie en salle. Mais pour ceux qui l’ont raté au cinéma, voici une deuxième chance avec cette édition Blu-ray qui propose le film de la meilleure des façons possibles en vidéo. De la meilleure des façons oui car en VOD, sur Canal, en replay etc… jamais vous n’aurez sous la rétine cette qualité d’image et de son. Sans oublier que seul le Blu-ray est capable de proposer le film en 24i/s (pour 24 images par seconde). Soit, comme on le sait, le défilement natif d’une image cinéma. Une diff télé, un replay etc proposeront en effet le film en 25i/s. Seul un Blu-ray 4K pourrait faire mieux. Mais au moment où nous couchons ces quelques lignes, l’éditeur Ad Vitam n’a rien prévu en ce sens. Peut-être un jour en Angleterre, Allemagne ou aux États-Unis. Qui sait ?

Au cinéma le : 27 septembre 2023

Résumé : En avril 1976, débute le deuxième procès de Pierre Goldman, militant d’extrême gauche, condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages à main armée, dont un ayant entraîné la mort de deux pharmaciennes. Il clame son innocence dans cette dernière affaire et devient en quelques semaines l’icône de la gauche intellectuelle. Georges Kiejman, jeune avocat, assure sa défense. Mais très vite, leurs rapports se tendent. Goldman, insaisissable et provocateur, risque la peine capitale et rend l’issue du procès incertaine.

D’ici là, le Blu-ray édité par Ad Vitam remplit quant à lui son rôle technique haut la main. On est ainsi aux anges de retrouver la photo signée Patrick Ghiringhelli retranscrite ainsi à la perfection. Le format 1.37, le grain, les ambiances ocres, l’extrême contraste de l’étalonnage initial… tout y est pour se replonger avec délectation dans ce procès emblématique des années 70 où rien n’est laissé au hasard. On se surprend même à redécouvrir les arrière-plans que l’on avait pas mal occulté lors de la vision en salle. Ce qui permet d’encore mieux appréhender le jeu des multiples figurants et comédiens secondaires qui forment un tout homogène ou disparate en fonction des scènes. Cédric Kahn précisant d’ailleurs au sein des bonus que si le moindre des comédiens avaient des consignes strictes à respecter, les figurants eux découvraient pour beaucoup les tenants et les aboutissants de ce procès les invitant du coup à réagir selon leurs intimes convictions (pro partie civile et plaignants ou pro Goldman). C’est en effet peu de dire que chaque cadre est admirablement pensé, photographié et donc in fine structuré. On en avait l’intime conviction au ciné mais là avec la fidélité du rendu et la possibilité de s’amuser à prendre le temps de le décortiquer, c’est juste fou de constater à nouveau mais puissance dix la richesse et l’intelligence de cette mise en scène. Celle-ci est par ailleurs renforcée par le mixage sonore qui, rappelons-le, ne s’appuie sur aucune musique répondant ainsi à la mise en scène au cordeau de Kahn par une acoustique immersive faite de paroles assénées ou vociférées aux quatre coins du cadre ou entrecoupée de plages de silence éloquentes. Quand ce n’est pas le public qui du fond de la salle d’audience manifeste plus que bordéliquement son soutien à Pierre Goldman. L’encodage en DTS-HD MA 5.1 rend compte de tout cela avec une belle précision. On mettra de côté le 2.0 stéréo aussi proposé mais forcément plus contrit.

La réalisatrice Laetitia Masson joue ici une experte psychiatre

Cette édition s’accompagne de deux compléments plus qu’appréciables mais non suffisants. Le premier est un entretien avec Cédric Kahn et la scénariste Nathalie Hertzberg pour le podcast Timeline 5000 ans d’Histoire. Une émission que l’on peut retrouver en cliquant ici au sein d’un podcast qui a donc pour vocation de contextualiser un événement historique en recevant celui et/ou celle qui l’aborde via un livre, une expo, un film… Ceci parmi d’autres approches comme raconter l’Histoire via de grandes émissions ou des programmes quotidiens de 5 minutes. Le problème ici c’est que le format de moins de 30 minutes ne permet pas vraiment d’aller au fond des choses. Sont abordés quelques problématiques du tournage, la motivation initiale de raconter ce procès, les recherches approfondies de la scénariste… Concernant l’affaire en elle-même on n’aura que quelques bribes d’infos historiques. Le second bonus nous permet d’avoir face caméra le réalisateur ainsi que deux de ses comédiens que sont Arthur Harari (que le cinéma français connait aussi pour ses activités de scénariste et de réalisateur) qui joue Maître Kiejman et Arieh Worthalter (totalement méconnaissable) qui joue Pierre Goldman. Forcément vont être abordés ce qui les a motivés à endosser l’habit de ces personnages et leur façon de s’y préparer. Quant à Cédric Kahn, les questions qui lui sont posés permettent de ne pas faire doublon avec ce qu’il dit déjà au sein du podcast.

L’acteur Ulysse Dutilloy-Liégeois prend les traits de Jean-Jacques Golman, demi-frère de Pierre Goldman

Comme on l’a déjà laissé entendre, il manque tout de même un doc qui contextualiserait le film via pourquoi pas des archives INA et l’intervention d’un spécialiste de la chose ou d’un historien spécialisé dans les grandes affaires judiciaires françaises. Un doc qui remettrait en lumière les enjeux de l’époque, les personnages centraux comme Maître Kiejman, la police accusée par Goldman pendant le procès d’être raciste (affirmation à peine contredite par Kiejman) ou encore la communauté antillaise de l’époque. On aurait pu aussi avoir l’intervention de la scénariste Nathalie Hertzberg qui a effectuée plus de trois ans de recherche lui donnant sans aucun doute la légitimité d’apporter ses propres éclairages et sentiments. Quid enfin de Christiane Succab-Goldman, compagne de Pierre Goldman lors de ce second procès qui deviendra sa femme alors qu’il finit de purger sa peine en prison à Fresnes en août 1976 ? Christiane Succab-Goldman avec qui il aura un enfant qu’il ne verra pas grandir puisqu’il sera assassiné le 20 septembre 1979 par des personnes qui ne seront jamais retrouvés. Christiane Succab-Goldman que Cédric Kahn montre dans son film sous les traits de l’actrice Chloé Lecerf y prend une place prépondérante. Mais ce qu’il lui fait dire est en partie réfutée par la véritable Christiane Succab-Goldman si l’on se réfère à l’entretien qu’elle a donné au journal Le Monde quelques jours après la sortie du film en salle. Un entretien que vous pouvez retrouver en cliquant ici.

Chloé Lecerf interprète Christiane Succab-Goldman

Dommage que tout cela ne soit pas au moins abordé, même survolé. Cela aurait donné de multiples pistes supplémentaires de réflexion et de recherche à ceux qui auraient voulu aller plus loin. On se doute que la production d’un tel doc a un coût et au regard du marché de la vidéo physique c’est certainement peu compatible avec une simple notion de rentabilité. Mais pour un tel film, c’est à notre avis essentiel d’autant qu’aujourd’hui (à la différence de la première décennie du 21è sicle quand le marché du DVD était à son zénith) la qualité des compléments contribue à l’acte d’achat d’un Blu-ray puisque le médium s’adresse dorénavant et essentiellement aux collectionneurs cinéphiles.

Spécifications techniques Blu-ray :

• Image : 137.1 encodée en AVC 1080/24p
• Langue(s) : Français DTS HD-MA 5.1 et 2.0 stéréo / Audiodescription
• Sous-titre(s) : Français pour sourds et malentendants
• Durée : 1h55min 54s
• 1 BD-50

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

Bonus :

• Timeline 5000 ans d’Histoire : entretien avec Cédric Kahn et la scénariste Nathalie Hertzberg via le podcast timelinepodcast.fr (2023 – 24min 02s)
• Entretien avec le réalisateur et les comédiens (2023 – 18min 20s – HD)